Groupe fondamental

Groupe fondamental
Page d'aide sur l'homonymie Pour les articles homonymes, voir Groupe de Poincaré.

En mathématiques, et plus spécifiquement en topologie algébrique, le groupe fondamental, ou groupe de Poincaré, est un invariant topologique. Le groupe fondamental d'un espace topologique pointé (X, p) est, par définition, l'ensemble des classes d'homotopie de lacets (arcs fermés) de X d'origine et d'extrémité p. C'est un groupe dont la loi de composition interne est induite par la concaténation des arcs.

L'examen des groupes fondamentaux permet de prouver que deux espaces ne peuvent être homéomorphes, ou topologiquement équivalents. Le groupe fondamental permet de classifier les revêtements d'un espace connexe par arcs, à un isomorphisme près.

Une généralisation des groupes fondamentaux est la suite des groupes d'homotopie supérieurs. Pour cette raison, le groupe fondamental est aussi appelé premier groupe d'homotopie[1].

Le groupe fondamental fut introduit par Henri Poincaré dans la douzième section de son article intitulé Analysis Situs, paru en 1895 et annoncé dans une note aux Comptes-rendus de l'Académie des Sciences, parue en 1892[2].

Sommaire

Définition intuitive à travers l'exemple du tore

Un lacet sur le tore bidimensionnel de point de départ p

Tout d'abord, familiarisons-nous avec l'idée du groupe fondamental à travers l'exemple du tore bidimensionnel (qu'on peut se représenter comme étant la surface d'un donut ou d'une bouée). On fixe sur le tore un point de départ p.

À partir de ce point, on peut construire des lacets, i.e des courbes fermées, qui partent du point p, se promènent sur le tore et qui reviennent au point de départ. Imaginons que les lacets soient faits à partir de caoutchouc comme un élastique et qu'il soit ainsi possible de les étirer, les déformer de telle manière que le point de départ et le point d'arrivée soient toujours p et que les lacets se déplacent toujours sur le tore. Une telle déformation s'appelle une homotopie : on dit que deux lacets qui peuvent s'obtenir l'un à partir de l'autre par une homotopie sont homotopiquement équivalents. Ce sont les lacets à déformation près qui nous intéressent : on regroupe donc les lacets dans des classes d'homotopie. Le groupe fondamental du tore est l'ensemble des différentes classes d'homotopie des lacets.

a et b ne sont pas homotopiquement équivalents

Dans la figure ci-contre, les lacets a et b ne sont pas homotopiquement équivalents : on ne peut obtenir l'un en déformant continûment le second sans le « déchirer » à un moment, ils représentent deux éléments distincts du groupe fondamental. On obtient d'autres classes d'homotopie en faisant tourner les lacets plusieurs fois autour du trou.

Concaténé de deux lacets

Comme son nom l'indique, le groupe fondamental n'est pas un simple ensemble, il est muni d'une structure de groupe : la loi de composition interne est celle qui à deux lacets associe un troisième lacet obtenu en parcourant le premier puis le second à la même vitesse (il n'y a pas de problèmes de définition puisque les lacets commencent et terminent avec le même point p). L'élément neutre du groupe fondamental est la classe d'homotopie du lacet qui reste au point p. On obtient un élément inverse en parcourant les lacets d'une classe d'homotopie dans le sens contraire.

Définition

Classe d'équivalence de lacets

Théorème-de-Brouwer-Homotopie (2).jpg

Soit X un espace topologique. Un arc continu est une application continue γ : [0 1] → X.

Soit p un point fixé dans X. Un lacet basé en p est un arc continu vérifiant de plus γ(0) = γ(1) = p.

Deux lacets γ0 et γ1 sont dits homotopes s'il existe une homotopie de l'un vers l'autre, c'est-à-dire une application continue H : [0 1]2X telle que :

  • \forall t \in [0,1], \, H(t,0) = \gamma_0(t)
  • \forall t \in [0,1], \, H(t,1) = \gamma_1(t)
  • \forall x \in [0,1], \, H(0,x) = p = H(1,x) .

La dernière condition exprime que pour x fixé entre 0 et 1 γx(t) = H(t,x) est un lacet basé en p.

Autrement dit, deux lacets sont dits homotopes si l'on peut passer continument de l'un à l'autre, à l'image de la figure de droite (le point p est situé en A sur la figure) .

Le fait d'être homotopes est une relation d'équivalence entre lacets (basés en p). On peut considérer l'ensemble E(p) des lacets (basés en p) de X et l'ensemble quotient π1(X,p) de E(p) par la relation d'homotopie. On notera [γ] la classe d'équivalence d'un lacet γ (aussi appelée classe d'homotopie)[3].

Intuitivement (si l'espace X est métrisable et localement compact) une classe d'homotopie de lacets est une composante connexe par arcs de l'espace E(p) muni de la topologie de la convergence compacte-ouverte. π1(X,p) est l'ensemble des classes d'équivalence d'homotopie [γ] de lacets basés en p. C'est donc l'ensemble des composantes connexes par arcs de E(p).

Structure de groupe

Homotopy group addition.svg

On souhaite donner une structure de groupe à cet ensemble π1(X,p). Si f et g sont deux lacets de X (basés en p), leur concaténation est le lacet h défini par :

h(t)=\left\{\begin{matrix} f(2t), & \mbox{si }t\in[0,1/2] \\ g(2t-1), & \mbox{si } t\in[1/2,1]\end{matrix}\right.

Intuitivement, c'est le lacet qui parcourt f puis g (chacun à vitesse double, pour arriver à parcourir le lacet en un temps unité). On notera fg le concaténé de f et de g. On peut prouver que la classe d'homotopie [fg] ne dépend que de la classe d'homotopie de f, et de celle de g. Ainsi, on peut définir une loi de composition interne sur l'ensemble π1(X,p) des classes d'homotopie des lacets basés en p de X, par [f][g] = [fg].

On peut alors prouver que l'on obtient une structure de groupe sur l'ensemble π1(X,p) : la loi est associative car les lacets (fg)h et f(gh) sont homotopes, l'élément neutre est la classe d'homotopie [γ] du lacet trivial γ défini par γ(t) = p pour tout t. L'inverse d'un lacet f est simplement le même lacet, mais parcouru dans l'autre sens (c'est-à-dire, défini par f − 1(t) = f(1 − t))

Le groupe ainsi obtenu est appelé groupe fondamental[3] (ou groupe de Poincaré) de X basé en p, et est noté π1(X,p).

Point base

Examinons le cas particulier où l'espace topologique X est connexe par arcs. Deux groupes fondamentaux basés en deux points p et q (π1(X,p) et π1(X,q)) sont isomorphes. En effet, il existe un chemin γ allant de p à q. On peut donc définir l'application suivante

   [\alpha] \mapsto [\gamma] [\alpha] [\gamma]^{-1}

qui réalise visiblement un isomorphisme du groupe fondamental π1(X,q) vers le groupe fondamental π1(X,p) dont l'isomorphisme réciproque est l'application :

[\alpha] \mapsto [\gamma]^{-1} [\alpha] [\gamma]

Ainsi, si X est connexe par arcs, par abus de langage, on parle du groupe fondamental (à un isomorphisme non unique près) de l'espace topologique X, sans préciser le point base[4], que l'on note π1(X) = π1(X,p). Cependant, l'isomorphisme entre les groupes π1(X,p) et π1(X,q) n'est pas unique et dépend du choix d'un chemin entre p et q . Ainsi on doit se souvenir que le groupe fondamental varie lorsque le point base varie dans l'espace X, les groupes restant toujours isomorphes.

Si X n'est pas connexe par arcs, les groupes fondamentaux de deux composantes connexes, sont différents. Par abus de langage, on parle néanmoins du groupe fondamental d'une composante connexe par arcs, sans préciser le point base, mais on doit se souvenir que le groupe fondamental varie lorsque le point base varie dans la composante connexe par arcs, les groupes restant toujours isomorphes. À l'inverse, un autre invariant d'un espace topologique, non nécessairement connexe par arcs, le premier groupe d'homologie, ne dépend pas du choix d'un point base ni du choix d'une composante connexe par arcs. Si le groupe fondamental (en un point) est abélien, ce qui est le cas de celui des groupes de Lie ou des espaces simplement connexes, il s'identifie naturellement au groupe d'homologie de la composante connexe du point.

Espaces simplement connexes

Article détaillé : Connexité simple.

Un espace topologique connexe par arcs dont le groupe fondamental est trivial est dit simplement connexe .

Exemples

Convexes d'un espace euclidien

Soit E un espace euclidien de dimension n, où n est un entier strictement positif. On dispose de la propriété suivante :

Si p est un élément de C, l'objectif est de montrer que π1(C,p) est le groupe trivial, ou encore que tout lacet γ basé en p est homotope au point p, c'est-à-dire au lacet constant valant p. Pour cela on définit une application H : [0 1]2C définie par :

\forall t,x \in [0,1]\quad H(t,x)= tp + (1-t)\gamma(x)

L'application H est manifestement continue, comme γ(x) et p sont deux éléments de C, pour toutes valeurs de t H(t,x) est élément de C car C est convexe. L'application H définit bien une homotopie entre le lacet constant et γ.

Cercle

Le terme de cercle désigne ici un espace homéomorphe à l'ensemble des points situées à une distance constante non nulle d'un point c d'un plan euclidien. Ainsi, l'ensemble des nombres complexes de module 1 ou encore R/Z sont des cercles. Le cercle est noté ici S1 et est identifié aux nombres complexes de module 1.

  • Le groupe fondamental du cercle est isomorphe à Z l'ensemble des nombres entiers[3].

Intuitivement, ce résultat est évident. On considère ici π1(S1,1), c'est-à-dire que le point de base est 1. Si le chemin considéré fait n tours dans le sens trigonométrique, on a envie de lui associer par l'isomorphisme de groupe μ de Z dans π1(S1,1) qui, à la valeur m, associe une classe de lacets qui fait m tours, dans le sens trigonométrique si m est positif, et dans le sens inverse sinon. Pour construire l'isomorphisme μ, on définit les lacets em de la manière suivante :

e_m : [0,1] \rightarrow \mathbb S^1\quad e_m(t) = \exp(2i\pi mt)

On définit μ comme l'application qui à m associe [em]. Intuitivement, il semble clair que μ est un isomorphisme.

La non trivialité du groupe fondamental du cercle est à l'origine de plusieurs démonstrations de théorèmes non triviaux. Un exemple est celui de Borsuk-Ulam qui indique qu'une application continue de la sphère dans le plan possède toujours deux points antipodaux ayant même image. Ce résultat est la clé de la démonstration du théorème du sandwich au jambon qui indique qu'il existe toujours un plan qui divise deux parties de volumes égaux trois solides bornés et mesurables.

Espace produit

Si X et Y sont deux espaces connexes par arcs, l'espace topologique produit XxY est aussi connexe par arcs. Si (p, q) est un point du produit, le groupe fondamental de XxY que l'on note π1(XxY,(p,q)) est bien défini. On dispose de la propriété suivante :

  • Le groupe fondamental de l'espace produit XxY est le produit direct du groupe fondamental de X par celui de Y[6].

Les propositions précédentes permettent d'établir que le produit S1 par lui-même, généralement appelé tore de dimension 2, admet un groupe fondamental isomorphe à Z2. Plus généralement, le groupe fondamental du tore de dimension n est isomorphe à Zn.

Autres exemples

  • Pour n\geq 2, le groupe fondamental de la sphère \mathbb S^n de l'espace euclidien \R^{n+1} est également trivial. Autrement dit, les sphères de dimension supérieure ou égale à 2 sont simplement connexes.
  • Le groupe fondamental peut également contenir des éléments de torsion : par exemple, le groupe fondamental du plan projectif \R P^2 est isomorphe à \Z/2\Z (voir plus bas).
  • Le groupe fondamental n'est pas toujours commutatif : Par exemple, le groupe fondamental basé en un point p du plan privé de deux points  \mathbb R^2-\{a;b\}, est isomorphe au groupe libre à deux générateurs F2. Les deux générateurs sont ici des lacets partant de p et faisant chacun le tour d'un des points a ou b.
Théorème
On peut montrer que quel que soit le groupe G, il existe un espace topologique de groupe fondamental G. On peut en fait trouver un CW-complexe de dimension 2 ou même une variété de dimension 4 si le groupe est de présentation finie.

Fonction continue et morphisme

Une question naturelle est celle de la compatibilité du groupe fondamental vis-à-vis d'une application continue f. Soit X et Y deux espaces topologiques tel que X soit connexe par arc et f une application continue de X dans Y. La fonction f assure non seulement la connexité de Y, mais aussi sa connexité par arcs de f(X).

De plus la fonction f transforme un lacet de X en un lacet de Y. Soit α un lacet de X, l'application foα est bien un lacet de Y. Ce lacet est généralement noté f * (α).

Morphisme de groupes fondamentaux induit par une fonction continue

La fonction f induit une application f * des lacets de X dans les lacets de Y. Cette application est compatible avec la relation d'équivalence que définit l'homotopie ainsi qu'avec la loi de composition du groupe fondamental.

Si α1 et α2 sont deux lacets ayant mêmes extrémités p, la loi de concaténation s'applique. Si les deux lacets sont homotopes, et si H(t, x) est une homotopie, alors l'application foH(t, x) est une homotopie entre f *1) et f *2)., ce qui montre que l'application f * est définie sur le groupe π1(X,p) à valeurs dans le groupe π1(Y,f(p)).

  • Il existe un unique morphisme de groupe de π1(X,p) dans π1(Y,f(p)), qui associe à la classe, notée [α], d'un lacet de X, la classe du lacet foα. Ce morphisme est appelé morphisme induit par l'application f, il est défini par[7] :
\forall \gamma \in \pi_1(X,p),\;\forall t \in [0,1] \quad f_*(\gamma)(t) = f\circ\gamma (t)

Pour montrer cette proposition, il suffit de remarquer que :

\forall \gamma_1,\gamma_2 \in \pi_1(X,p) \quad f_*(\gamma_1\gamma_2) = f_*(\gamma_1)f_*(\gamma_2)

Si Z est un autre espace topologique et g une fonction continue de Y dans Z, alors les morphismes se composent :

(g\circ f)_* = g_*\circ f_*

Il suffit de remarquer que l'application (IdX)* est l'identité du groupe π1(X,p) pour conclure que :

  • Si f est un homéomorphisme, le morphisme de groupe f* est un isomorphisme. Si deux espaces X et Y sont connexes par arcs et s'il existe un homéomorphisme de X dans Y, alors les groupes fondamentaux de X et Y sont isomorphes.

L'isomorphisme n'est en général pas unique.

Application : théorème du point fixe de Brouwer en dimension 2

Un exemple d'application des morphismes précédents est le théorème du point fixe de Brouwer. En dimension deux, il se démontre simplement à l'aide de l'étude d'une fonction continue permettant de bâtir un morphisme de groupes fondamentaux. Une définition est utile[8] :

Soit X un espace topologique connexe par arcs et A une partie de X. Une rétraction F de X sur A est une application de X dans A telle que la restriction de F à A soit l'identité. On dit que A est un rétracte de X s'il existe une rétraction continue de X sur A.
Brouwer fixed point theorem retraction.svg

Cette définition permet d'exprimer la proposition suivante, équivalente au théorème du point fixe de Brouwer en dimension 2 :

  • Il n'existe pas de rétraction continue d'un disque dans sa frontière.

Soit B2 le disque et S1 sa frontière. Supposons qu'une telle rétraction, notée F, de B2 dans S1 existe. On note InjS, l'injection canonique de S1 dans B2 et IdS l'application identité de S1. On dispose des égalités :

Id_{S} = F\circ Inj_S\quad\text{donc}\quad (Id_{S})_* = F_*\circ (Inj_S)_*

L'application (IdS) * est le morphisme identité du groupe fondamental du cercle. L'application (InjS) * est le morphisme du groupe fondamental du cercle dans le groupe fondamental du disque, qui est trivial. L'image de cette application est donc réduite à l'élément neutre. L'image par le morphisme F* du groupe fondamental du disque dans le groupe fondamental du cercle est réduite à l'élément neutre. Ce résultat est en contradiction avec le fait que l'image de (IdS) * , qui est le groupe fondamental du cercle, est non triviale car isomorphe à Z.

Le théorème de Brouwer indique que toute fonction continue f du disque dans lui-même admet un point fixe. S'il n'en avait pas, il serait aisé de construire une rétraction continue. On considérerait le segment passant par x et f(x) illustré sur la figure (si x est un élément du disque). Ce segment traverse le disque en un point, plus proche de x que de f(x). Si ce point est l'image par F du point x, alors F est la rétraction recherchée[9]. Une description plus précise est disponible dans l'article détaillé :

Degré d'une application du cercle dans lui-même  S^1 \to S^1

Article détaillé : Degré d'une application.

Autres théorèmes

Équivalence d'homotopie et espaces contractiles

Deux espaces X et Y sont dits homotopiquement équivalents s'il existe deux applications f : XY et g : YX, telles que  g\circ f est homotope à IdX et  f\circ g est homotope à IdY.

Si X et Y sont connexes par arcs et homotopiquement équivalents, ils ont des groupes fondamentaux isomorphes.

Par conséquent, un espace homotopiquement équivalent à un point est simplement connexe. Un tel espace est dit contractile.

Propriétés

Lien avec le premier groupe d'homologie

On montre que : le premier groupe d'homologie (d'un espace connexe par arcs) est isomorphe à l'abélianisé du groupe fondamental (en un point quelconque de l'espace).

C'est un cas particulier du théorème d'Hurewicz.

Groupe fondamental et théorie des revêtements

Il y a équivalence entre les sous-groupes à conjugaison près du groupe fondamental et les revêtements à isomorphisme près. Dans cette équivalence, les sous-groupes normaux correspondent aux revêtements galoisiens.

En théorie des revêtements, on montre que si l'espace admet un revêtement simplement connexe (en particulier si l'espace est semi-localement simplement connexe c'est-à-dire si l'espace n'est pas trop "sauvage", par exemple s'il est localement contractile) son groupe fondamental est isomorphe au groupe des automorphismes d'un de ses revêtements universels.

Méthodes de calcul et applications

Théorème de van Kampen

Calculer le groupe fondamental d'un espace topologique qui n'est pas simplement connexe est un exercice difficile, car il faut prouver que certains lacets ne sont pas homotopes. Le théorème de van Kampen, également appelé théorème de Seifert-Van Kampen, permet de résoudre ce problème lorsque l'espace topologique peut être décomposé en des espaces plus simples dont les groupes fondamentaux sont déjà connus. Ce théorème permet de calculer le groupe fondamental d'un éventail très large d'espaces.

Article détaillé : Théorème de van Kampen.

En termes abstraits, ce théorème dit que si deux sous-espaces, tous les deux ouverts ou tous les deux fermés, de X contiennent le point p et ont une intersection connexe par arcs, le groupe fondamental de la réunion des deux espaces pointés en p est la somme amalgamée (dans la catégorie des groupes) des groupes fondamentaux des deux espaces, en p, somme amalgamée le long du groupe fondamental de leur intersection.

\pi(V_1 \cup V_2, x) = \pi(V_1, x) \underset{\pi(V_1 \cap V_2, x)}{\bigstar}\pi(V_2,x).

Théorème du cône et groupe fondamental des espaces projectifs

Si X est un espace topologique, on définit le cône de X comme l'espace quotient \frac{I\times X}{0\times X}I désigne le segment [O;1]. Si X est un cercle, on obtient une partie d'un cône de révolution. Le groupe fondamental du cône d'un espace connexe par arc est trivial, autrement dit, si X est connexe par arcs, C(X) est simplement connexe. On a une inclusion canonique X=1\times X\subset C(X).

Si f est une application continue entre deux espaces topologiques f : X\to Y, on définit le cône de l'application f : C(f) comme l'espace obtenu en recollant X\sub C(X) et f(X)\sub Y le long de X.

Exemple : Si f est l'application de degré 2 dans le cercle S^1\to S^1 : z\mapsto z^2, on obtient C(f)=P_2(\mathbb R). Le cône de f est le plan projectif réel.

Le théorème du cône affirme que le groupe fondamental de C(f) est isomorphe au quotient de π1(Y) par le normalisé du sous-groupe de π1(Y) image de f.

Application : les espaces projectifs (réels) P_n(\mathbb R) pour n\ge 2 ont des groupes fondamentaux isomorphes à \mathbb Z/2\mathbb Z.

Groupe fondamental des graphes, des surfaces et des polyèdres

  • Le groupe fondamental des graphes est un groupe libre.
  • Le groupe fondamental des polyèdres admet une présentation par générateurs et relations. Une relation étant fournie par chacune des faces du polyèdre.
  • Le groupe fondamental d'une surface compacte orientable admet une présentation avec 2g générateurs a_1,\ b_1,\ a_2,\ b_2,\ldots\  a_g,\ b_g et une seule relation ( a_1b_1a_1^{-1}b_1^{-1} \ a_2b_2a_2^{-1}b_2^{-1}\ldots\ a_gb_ga_g^{-1}b_g^{-1}=1, on peut aussi choisir la présentation a_1\ldots\ a_g\ b_1\ldots\ b_g\ a_1^{-1}\ldots\ a_g^{-1}\ b_1^{-1}\ldots\  b_g^{-1}=1 ). L'entier g est uniquement déterminé par la surface et est appelé genre de la surface.

Théorie des nœuds

En théorie des nœuds, on cherche à distinguer les différents nœuds (ceux qui ne sont pas homotopiques). Le groupe fondamental du complémentaire d'un nœud fournit un invariant des nœuds, qui permet de distinguer certains d'entre eux.

Généralisations

Groupoïde fondamental (ou groupoïde de Poincaré)

Une catégorie est appelée un groupoïde si les objets et les flèches forment un ensemble (c'est une « petite catégorie ») et si toutes les flèches sont inversibles (sont des isomorphismes). Les groupoïdes forment une catégorie dont les morphismes sont les foncteurs entre groupoïdes. Les groupes sont des groupoïdes (avec un seul objet).

Soit G un groupoïde, on définit la relation d'équivalence x\equiv{}\,y si l'ensemble G(x,y) des morphismes de x vers y est non vide. L'ensemble quotient (dont les objets sont les classes d'équivalences) est noté π0(G). Si f est un morphisme de groupoïdes, f est compatible avec la relation d'équivalence \equiv{}. Par passage au quotient, π0 définit un foncteur (le foncteur composantes connexes) de la catégorie des groupoïdes vers la catégorie des ensembles.

Soit G un groupoïde, et x un objet de G (on dit aussi un point de G). La loi de composition entre les flèches de G(x,x) restreinte à ce sous-groupoïde est une loi de groupe. On note π1(G,x) ce groupe. Remarque : π1 ne définit pas un foncteur de la catégorie des groupoïdes vers la catégorie des groupes.

À chaque espace topologique X, on associe de façon fonctorielle un groupoïde πX : soit X un espace topologique, on prend pour ensemble d'objets πX l'ensemble sous-jacent à X. Les flèches de source x et de but y sont les classes d'homotopie des chemins (= arcs continus) de x vers y. La relation d'homotopie est compatible avec la composition des chemins et définit donc un groupoïde πX appelé le groupoïde fondamental de X. Le théorème de Van Kampen s'exprime également simplement en utilisant les groupoïdes fondamentaux.

Le groupe fondamental est défini par π1(X,x0) = π1X,x0)

Groupes d'homotopie supérieurs

Le groupe fondamental est en fait le premier groupe d'homotopie, d'où l'indice 1 dans la notation π1(X).

Groupe fondamental et géométrie algébrique

Dans la théorie des revêtements d'un espace X, on définit la fibre d'un revêtement \pi_E~:~E\to X au point p comme l'ensemble \pi_E^{-1}(p) qui est aussi noté E(p). La correspondance E~\mapsto~E(p) définit un foncteur de la catégorie des revêtements de base (X; p), dans la catégorie des ensembles. Le groupe fondamental peut être défini de manière abstraite comme le groupe des automorphismes du foncteur fibre, qui, à un revêtement de base (X,p), associe E(p).

Cette définition alternative ouvre la voie à la généralisation en géométrie algébrique, où la définition donnée précédemment en termes de lacets de base p ne s'applique pas naturellement. Dans cette généralisation, les revêtements étant remplacés par les morphismes étales : le groupe fondamental de l'espace pointé (X,p) est le groupe des automorphismes du foncteur fibre qui, à un morphisme étale E\to X, associe la fibre E(p) au point p. Cette généralisation est due à Alexandre Grothendieck et Claude Chevalley.

Cette théorie permet d'expliquer le lien entre la théorie de Galois des revêtements des surfaces de Riemann (groupe d'automorphismes…) et la théorie de Galois des corps de fonctions.

Bibliographie (en français)

  • Adrien Douady et Régine Douady, Algèbre et théories galoisiennes [détail des éditions]
  • Claude Godbillon, Éléments de topologie algébrique [détail des éditions]
  • Pierre Dolbeault (de), Analyse complexe
  • Michel Zisman, Topologie algébrique élémentaire
  • Jean Dieudonné, Éléments d'Analyse, tome 3
  • André Gramain, Topologie des Surfaces

Notes et références

  1. Dolbeault, Analyse complexe, ed. Masson, page 120.
  2. J. Dieudonné, A History of Algebraic and differential Topology, 1900-1960, pages 17-24
  3. a, b et c Cette définition est reprise de : J. Lannes Groupe fondamental École Polytechnique
  4. Claude Godbillon, Elements de topologie algébrique, page 76
  5. Le site suivant traite le cas plus général d'un espace étoilé p 8 : H. Cartan Algèbre et géométrie Groupe fondamental, revêtements Orsay (1968-1969)
  6. J. Lannes Groupe fondamental École Polytechnique p 8
  7. Adrien Douady et Régine Douady, Algèbre et théories galoisiennes [détail des éditions] p 237 (dans l'édition Cassini 2005)
  8. On la trouve dans : Adrien Douady et Régine Douady, Algèbre et théories galoisiennes [détail des éditions] p218
  9. J. Lannes Groupe fondamental École Polytechnique p 12

Liens externes


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