Guillaume III Roger de Beaufort

Guillaume III Roger de Beaufort
Guillaume III Roger de Beaufort
Dans la Chambre du Cerf du Palais des papes d'Avignon, Guillaume III Roger de Beaufort et son père chassent au faucon
Dans la Chambre du Cerf du Palais des papes d'Avignon, Guillaume III Roger de Beaufort et son père chassent au faucon

Pays Limousin
Titre Vicomte de Turenne
(7 février 1350 - 1395)
Autre titre vicomte de Lamothe, comte de Beaufort et d’Alès, Grand Chambellan du royaume de Naples
Grade militaire Capitaine pontifical, Recteur du Comtat Venaissin et Capitaine Général de la Sénéchaussée de Beaucaire
Biographie
Naissance 1332
Décès 28 mars 1395
Paris
Père Guillaume II Roger
Mère Marie de Chambon
Conjoint Aliénor de Comminges
Enfants Raymond de Turenne, Jeanne, Aliénor, Marguerite et Cécile,

Blason Raymond Roger, Vicomte de Turenne.svg

Guillaume III Roger de Beaufort (1332-1395), vicomte de Turenne, fils de Marie de Chambon et de Guillaume II Roger, vicomte de Lamothe, comte de Beaufort et d’Alès, était le neveu de Clément VI et le frère de Grégoire XI, deux des plus illustres papes d’Avignon.

Sommaire

Biographie

Un mariage prestigieux

Le château des vicomtes de Turenne
Remparts de Pertuis au XIVe siècle
d'après un dessin de Mr. Métois

Guillaume épousa Aliénor de Comminges quatrième fille du comte Bernard VIII et de Mathé de l’Isle-Jourdain. En prévision de cette union, Guillaume III avait été émancipé par son père le 28 novembre 1349 et s'était vu remettre tous les fiefs languedociens du comte de Beaufort et la moitié de la vicomté de Valernes. Le contrat de mariage entre Guillaume III et Aliénor rédigé à Narbonne, le 15 décembre 1349, avait été suivi d'un mariage par procuration.

Lors de leur union officielle, le 7 février 1350, Clément VI se fit un devoir de mettre dans la corbeille des jeunes époux la vicomté de Turenne, l’une des plus prestigieuses et des plus riches du Limousin.

La reine Jeanne, comtesse de Provence et souveraine de Naples, ayant été absoute de peine et de coulpe par le pape, après l’assassinat de son premier époux André de Hongrie, elle le remercia en donnant fiefs et dignités à sa famille. Ce fut dans ce cadre qu'elle nomma le vicomte de Turenne Grand Chambellan de son royaume de Sicile en 1351, puis qu'en janvier 1352, elle lui concéda les seigneuries de Pertuis, les Pennes, Meyrargues et Séderon.

Ce fut son oncle, Hugues Roger, le cardinal de Tulle, qui lui offrit entre 1351 et 1353 ses autres seigneuries dans le Languedoc et le Velay.

Le fidèle des Valois

Beaufort turenne.jpg

Selon les clauses du traité de Brétigny, signé le 8 mai 1360, la vicomté de Turenne devenait anglaise. Mais ce ne fut pourtant que le 8 mars 1361, que Guillaume accepta de rendre hommage au roi d’Angleterre. Cette fidélité aux Valois fut constante. Elle se renouvela au cours de l’automne 1365, quand le vicomte participa à la croisade conduite par Pierre Ier de Lusignan, contre le port égyptien d’Alexandrie. Il partit en compagnie de Jean de la Rivière, premier chambellan du roi de France, et de Philippe de Mézières, alors chancelier du roi de Chypre et futur conseiller de Charles V.

Apprécié par la Cour de France, Guillaume le fut aussi par la Cour impériale. Le 8 décembre 1373, l’empereur Charles IV de Luxembourg, oncle du roi de France, lui donna en fief la cité toscane de Chiusi et les châteaux, villes, terres et pays dépendant de ce diocèse : Monteleone, Montegabbione, Sarteano, Cetona, Chianciano, Piegaro, Panicale, Paciano, Monticchiello, Camporsevolo, Castiglione del Lago, ainsi que toutes les terres appartenant à la juridiction de Cortona[1].

Le 28 janvier 1374, Guillaume III Roger de Beaufort fut institué tuteur de sa petite-file Alix des Baux, en la ville d’Avignon, par Nicola Spinelli, Sénéchal de Provence pour la Reine Jeanne.

Quand en mars 1375, les Anglais et les Français s’accordèrent pour ouvrir des négociations à Bruges, Grégoire XI désigna pour y assister son frère Guillaume et leur cousin Guillaume de Lestranges, évêque de Carpentras. Charles V y dépêcha son frère Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, Édouard III d'Angleterre, quant à lui, se fit représenter par son fils Jean de Gand.

Ce fut cette même année, le 28 octobre, que Guillaume III céda en usufruit sa vicomté à son fils Raymond VIII. Dès lors, la titulature vicomtale fut effectivement portée à la fois par Guillaume et par Raymond de Turenne.

Recteur du Comtat Venaissin et Capitaine Général de la Sénéchaussée de Beaucaire

Son frère Grégoire XI, avant son retour à Rome, en 1376, lui remit la charge de Recteur du Comtat Venaissin. Le 19 octobre, le vicomte de Turenne prit officiellement ses fonctions lors d’une réception officielle à Carpentras et s’installa dans son palais rectoral. Il le décora de somptueuses tapisseries armoriées[2]. Le vicomte assuma cette fonction jusqu’au retour à Avignon de Clément VII.

Le Château de Portes qui fut un des fiefs languedociens des Roger de Beaufort

Il s’installa alors dans son fief de Bagnols-sur-Cèze. Au cours des années 1382 et 1383, les Cévennes puis le Languedoc rhodanien virent arriver les Tuchins descendus d’Auvergne. Fin janvier 1382, la politique fiscale du rapace Jean de Berry précipita dans le Tuchinat de nouvelles recrues venues de tout le Languedoc. Pour leur faire face, le sénéchal Enguerrand d’Eudin nomma d’urgence le vicomte de Turenne Capitaine Général de la Sénéchaussée de Beaucaire et de Nîmes.

Guillaume Roger de Beaufort tenta de convaincre le duc de Berry de convoquer les trois ordres du Languedoc afin d’obtenir les subsides nécessaires pour engager enfin la lutte contre les Tuchins. Les États Généraux furent finalement réunis au cours du mois de septembre 1382 au château d’Alès. Nanti des aides financières voulues, Guillaume put lever de nouvelles troupes qu’il concentra dans sa seigneurie de Bagnols-sur-Cèze.

Thibaud de Budos, dès 1383, lui contestant son fief et son château de Portes, le vicomte n’hésita pas à faire recruter par Jean Coq, son capitaine de Bagnols, des Tuchins pour lutter contre lui. Rejoint par Raymond de Turenne, ils réussirent un coup de maître en faisant bannir leurs chefs par les Tuniques Blanches. L’unité du Tuchinat était brisée et les conditions d’une trêve réunies. Un terme fut effectivement mis à la révolte, en février 1383, lors d’une paix qui fut signée à Alès par l’assemblée des communes que présidait Guillaume Roger de Beaufort[3].

La spoliation de ses fiefs provençaux

Aux Antiques, l'arc de triomphe de Saint-Rémy tel que l'a connu le vicomte de Turenne

Le 8 mars 1383, Guillaume Roger de Beaufort, en dépit de son allégeance à Louis d'Anjou et à son épouse Marie de Blois, se vit contester par la seconde maison d’Anjou, ses fiefs provençaux en particulier Saint-Rémy-de-Provence et les Baux. Sa réaction fut insolite. Il quitta sa charge en Languedoc pour participer aux côtés de Charles VI à la guerre en Flandre. Le vicomte rejoignit l’armée royale à Orléans, le 6 août 1383. Avec six bacheliers et cinquante-trois écuyers de son hôtel, il participa à la chevauchée de Bourbourg.

Ce ne fut que quatre ans plus tard, le 23 juin 1387, qu’il mit solennellement en réserve son devoir d’obéissance. Il constitua une Ligue avec Raymond II d’Agoult. Ce traité fut dit être signé entre grands et puissants seigneurs messire Raymond d’Agoult, seigneur de Sault et vicomte de Reillanne, et messire Guillaume Roger, vicomte de Turenne, tant pour leurs personnes que pour leurs parents, amis, serviteurs et valets[4]. Le but de cette Ligue était de faire céder la régente Marie de Blois afin que les ligueurs retrouvassent leurs bénéfices et fiefs d’antan[5].

Ce fut un feu de paille puisque le 19 juillet 1387, Marie de Blois réunit son conseil. A cette réunion assistaient, outre Jean Le Fèvre, chancelier de la Régente, les évêques de Sisteron et de Vintimille, Raymond d’Agoult, le comte chambellan, et Guillaume Roger de Beaufort, vicomte de Turenne qui avaient mis leur Ligue sous l’éteignoir[6].

En dépit de ces avatars, toujours indéfectiblement fidèle aux Valois, le 9 août 1390, le vicomte, héritier de feu Guillaume Roger, son père, octroya à son frère Nicolas Roger de Beaufort, seigneur d’Herment, les châteaux et les châtellenies du Chambon et de Rosiers à condition qu’il ne les légua point à Jean de Limeuil, son fils passé au parti anglais.

Délaissant le comté de Provence, Guillaume se retira à Paris. N’acceptant pas que son fils ait refusé de marier sa petite-fille Antoinette de Turenne à Charles, le fils cadet de Marie de Blois, il décida dès lors de cesser de s’alimenter. Le vicomte testa le 26 mars 1395 et mourut de langueur deux jours plus tard. Il fut inhumé dans l’une des chapelles de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

Blason de Roger

La descendance du vicomte de Turenne

Le vicomte fut le père de cinq enfants. Ses quatre filles furent magnifiquement mariées. Jeanne, l’aînée, épousa Raymond des Baux, comte d’Avellino ; Aliénor, Édouard II de Beaujeu ; Marguerite, Armand de Polignac, et Cécile, Louis II de Poitiers, comte de Valentinois.

Son fils Raymond de Turenne (1352-1413) s’illustra en tant que Capitaine pontifical en Italie et succéda à Juan Fernandez de Heredia comme Capitaine Général des Armes du Comtat Venaissin. Le vicomte de Turenne lui laissa contester, les armes à la main, la spoliation de ses fiefs de Provence. Ce qui déclencha, durant les années 1380 / 1390, une des plus importantes guerres privées entre les Roger de Beaufort, Marie de Blois, comtesse de Provence, et les papes Clément VII et Benoît XIII.

Notes

  1. Connu en Toscane sous le nom de Villata (villageois, paysan, habitant du pays), Guglielmo di Beaufort ne garda ses fiefs italiens que six ans et les revendit pour 20 000 florins d’or à Cione di Sandro Salimbeni. Lorsque Venceslas de Luxembourg, roi des Romains et fils de l’empereur Charles IV, voulut se faire reconnaître officiellement comme successeur de son père sur le trône impérial en 1378, il en appela à Grégoire XI. Pour intervenir, avec quelques chances de succès auprès du Souverain Pontife dépossédé du droit de regard sur l’élection de l’empereur depuis les Bulles d’Or, l’héritier présomptif quémanda, entre autres, l’aide du vicomte de Turenne.
  2. Des fragments de ces tapisseries se trouvent aujourd’hui dans les musées européens de Limerick, Glasgow, Amsterdam et Castagnola-Lugano. D’autres sont exposées outre-Atlantique au Metropolitan Museum of Art de New York, au Museum of Fine Arts de Boston, à la Rhode Island School of Design de Providence et dans la collection Alaister Bradley Martin au Brooklyn Museum. La tapisserie du musée Hunt à Limerick
  3. Selon Pierre Flandin-Bléty, ce commandement aurait été fort mal exercé par le vicomte de Turenne qui s’en remit aux délégués des trois sénéchaussées (Beaucaire, Carcassonne et Toulouse) réunis en février 1383. Celles-ci en appelèrent à l’intervention militaire du roi (Cf. Trahison ou pacification ? À propos d’une rémission de 1389, 111e Congrès national des Sociétés savantes, Poitiers, 1986). Il lui fut aussi reproché, en novembre 1382, d’avoir accueilli à Bagnols, Bernard Régis, Vachon, Verchière et Étienne Augier, dit Ferragut, capitaines tuchins, et leurs Tuniques Blanches qui défilèrent en musique et bannières déployées. Le vicomte entama même le dialogue avec Verchière, un ancien officier de son père, puis invita ses compagnons à venir boire un gobelet de vin en son Hôtel. Cf. Vincent Challet, Au miroir du Tuchinat, relations sociales et réseaux de solidarités dans les communautés languedociennes à la fin du XIVe siècle, Cahiers de Recherches Médiévales, 2003.Site Internet
  4. Rédigé en provençal, ce traité est conservé aux Archives départementales des Bouches-du-Rhône sous la cote B 589.
  5. Cf. R. Veydarier, Raymond de Turenne, la deuxième maison d’Anjou et de Provence : étude d’une rébellion nobiliaire à la fin du Moyen-Âge, thèse de l’Université de Montréal (Québec), 1994.
  6. Cf. Journal de Jean Le Fèvre, évêque de Chartres, chancelier des rois de Sicile Louis 1er et Louis II d’Anjou, Éd. Henri Moranvillé, Paris, 1887.

Bibliographie

  • Ch. Justel, Histoire généalogique de la Maison de Turenne, Preuves, T. I et II, Paris, 1645.
  • Charles Cottier, Notes historiques concernant les Recteurs du ci-devant Comté Venaissin, Carpentras, 1808.
  • J. F. André, Histoire du gouvernement des Recteurs dans le Comtat, Carpentras, 1847.
  • A. Vayssière, Documents relatifs à l’histoire de la maison de Turenne, Bulletin de la Société scientifique, historique et archéologique de la Corrèze, 1885.
  • C. Faure, L’entrée du recteur Guillaume de Beaufort, vicomte de Turenne, à Carpentras, Mélanges archéologique et historique, 1906.
  • C. Faure, Études sur l’administration et l’histoire du Comtat Venaissin du XIIIe au XIVe siècle (1229 – 1417), Paris-Avignon, 1909.
  • T. Pataki, Hommages rendus au vicomte de Turenne (1350 – 1351), Bulletin de la Société scientifique, historique et archéologique de la Corrèze, 1969.
  • L. D. Denoix, Études et documents sur les Turenne du XIVe au XVe siècle, Bulletin de la Société scientifique, historique et archéologique de la Corrèze, 1975.
  • Jean-Pierre Saltarelli, Les véritables portraits de Clément VI, Grégoire XI et des Roger de Beaufort, vicomtes de Turenne ?, Bulletin de la Société scientifique, historique et archéologique de la Corrèze, 2006.
Précédé par Recteur du Comtat Venaissin Suivi par
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Armoiries Comtat Venaissin.png Guillaume III Roger de Beaufort Blason Raymond Roger, Vicomte de Turenne.svg
(13761379)
Henri de Sévery

Voir aussi

Liens internes

Liens externes

Les fiefs de Guillaume III Roger de Beaufort, vicomte de Turenne.


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