Histoire de la laïcité en France

Histoire de la laïcité en France
Page d'aide sur les redirections Cet article concerne les prémisses de la laïcité en France. Pour ses applications contemporaines, voir Laïcité en France.
Devise de la République française sur le tympan d’une église

L’histoire de la laïcité en France retrace la naissance et le développement de ce principe[n 1] jusqu'à l'époque contemporaine.

La laïcité a pris corps pour la première fois pendant la Révolution française : l’abolition de l’Ancien Régime en août 1789 s’est accompagnée de la fin des privilèges ecclésiastiques et de l’affirmation de principes universels, dont la liberté de conscience et l’égalité des droits exprimés par la Déclaration des droits de l’homme.

Au xixe siècle, les lois de sécularisation ont progressivement affranchi l’État de ses liens historiques avec l’Église catholique et créé de nouvelles normes politiques et sociales bâties sur le principe de l’universalisme républicain. Ce processus, qui prenait place dans un mouvement plus large lié à la modernité, a confié au peuple souverain la redéfinition des fondements politiques et sociaux : les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, l’organisation de l’État, ses composantes et ses représentations, l’éducation, les rites de la vie civile, l’évolution du droit et de la morale, etc., indépendamment de tout dogme religieux. La Troisième République a notamment recréé l’organisation du système scolaire, en instaurant l’enseignement public, laïque et obligatoire (lois Jules Ferry). Ce processus s’est conclu par la loi sur la séparation des Églises et de l’État en 1905, qui a marqué l’aboutissement d’une laïcisation affirmée.

Au long du xxe siècle, l’État a légiféré et généralisé la laïcité en concevant de nouvelles règles de droit qui concernent la famille et l’individu. Avec la Constitution française de 1958, la laïcité fonde désormais le pacte républicain et garantit l’unité nationale.

Sommaire

Les origines de la laïcité

Sommaire de la section

La recherche des origines de la laïcité en France fait naître certaines controverses d’appréciation.

Pour Jean-Claude Barreau, essayiste catholique, « la laïcité [est] une invention chrétienne[1] ». Henri Madelin, prêtre et théologien, confirme cette approche. Selon lui, la laïcité trouverait son origine dans les textes fondateurs de la religion chrétienne ; elle aurait été inventée à l’époque des guerres de religions « pour calmer le jeu religieux dans les sociétés occidentales » : « Il faut se réjouir d’avoir des religions qui ont des principes interprétatifs, qui ont inventé un modèle où il y a un rapport entre César et Dieu, entre la politique et la religion[2]. »

Selon le philosophe Henri Pena-Ruiz : « César est une figure de la domination politique, Marianne est une figure du peuple émancipé, de la République se donnant à elle-même sa propre loi[3]. » À son sens, la laïcité ne peut se réduire à la « séparation abstraite » du temporel et du spirituel. Si elle soustrait, à partir de la Révolution, la société et ses institutions à toute tutelle cléricale[4], c’est après avoir affirmé pendant le siècle des Lumières des valeurs universelles (liberté de conscience, égalité citoyenne, loi commune) qui s’enracinent « dans le legs de toute une culture de la pensée critique » et dans « la volonté d’une pensée autonome, chère aux philosophes » de l’Antiquité[5]. Pour le professeur de droit public Jean-Michel Ducomte, la laïcité, loin de trouver sa source dans la religion, « est d’abord et essentiellement une démarche d’affranchissement par rapport aux prétentions des Églises à fonder l’ordre social et politique[6] ».

L’historien Georges Weill distingue quatre courants ayant contribué à la conception laïque de l’État[7] : « les catholiques héritiers de la tradition gallicane de la monarchie d’Ancien Régime ; les protestants libéraux ; les déistes de toutes les sensibilités ; enfin, les libres-penseurs et les athées[8] ».

Les développements ci-dessous reprennent les fondements historiques sur lesquels s'appuient ces thèses, sans pour autant les opposer entre elles.

Les fondements médiévaux de la laïcité

Les fondements de la laïcité, c'est-à-dire les bases historiques ayant permis plus tard l'émergence de la laïcité, sont par bien des points issus en premier lieu du sein même de l'Église. Ainsi, la querelle des investitures opposant au XIe siècle le pape Grégoire VII à l'empereur germanique, et où le pape cherche à définir son indépendance et celle de l'Église à côté des pouvoirs politiques, est un point fondamental : par cet épisode est entériné le fait que pouvoirs spirituels et politiques peuvent, et éventuellement doivent, être séparés.

La redécouverte de la philosophie aristotélicienne au XIIIe siècle, en contribuant à l'édification d'une pensée politique construite sur les bases de l'ordre naturel et de la raison, est également un des fondements intellectuels lointains ayant permis, plus tard et progressivement, l'émergence d'une pensée laïque et d'une mise en application politique de cette pensée[9].

Le gallicanisme et l’édit de Nantes

l’édit de Nantes — 1598

L’Église gallicane et la distinction des pouvoirs

Article détaillé : Gallicanisme.

Le gallicanisme (emprunt au latin médiéval gallicanus : « français ») est une doctrine religieuse et politique spécifiquement française, qui cherche à limiter les interventions du pape dans la gestion des affaires de l’Église catholique romaine en France. Son origine peut se lire dans la réaction du roi Philippe le Bel aux ambitions théocratiques du pape Boniface VIII[10].

Entre le xve et le xvie siècles, le gallicanisme est formalisé en un ensemble de textes (notamment la Pragmatique Sanction de Bourges) qui affirment sur les plans théologique et juridique la dépendance de l’Église française à l’État et la supériorité du pouvoir royal face à la papauté. Il est tempéré toutefois en 1516 par le Concordat de Bologne, passé entre le roi François Ier et le pape Léon X, qui permet la mainmise royale généralisée sur les nominations épiscopales et abbatiales, à l’origine du système de la commende.

Le gallicanisme trouve son expression dans la Déclaration des Quatre articles rédigée par Bossuet à l’initiative de Louis XIV, lors de l’assemblée du clergé de 1682. Le pouvoir du pape y est déclaré purement spirituel ; les monarques ne peuvent lui être soumis. Les jugements du pape sur les questions de foi doivent être validés par l’Église catholique romaine en France et ne peuvent être contraires aux coutumes du royaume. Le pape, voulant éviter une rupture similaire à celle qu’avait provoqué Henri VIII en Angleterre, à l’origine de l’anglicanisme, est contraint d’accepter cette situation.

Toutefois, Louis XIV se trouve rapidement pris au piège lorsque le gallicanisme et le jansénisme sont trop étroitement liés : le gallicanisme français a en effet un aspect conciliariste qui lui fait déclarer que l'autorité du pape est soumise à l'autorité de l'Église réunie en concile. Cette position est proche du richérisme. Les jansénistes - combattus vigoureusement par Louis XIV - infléchissent nettement le gallicanisme dans ce sens richériste. Cela devient rapidement une menace pour le roi, qui ne peut que craindre que cette demande conciliariste exprimée sur le plan religieux ne débouche sur le même type de demande politique : que les États généraux se proclament supérieurs à l'autorité monarchique, notamment. Il ne met donc pas véritablement en place ce gallicanisme et préfère s'allier au pape pour combattre le jansénisme[11].

L’édit de Nantes et la liberté de culte

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Article détaillé : Édit de Nantes.

En 1598, l’édit de Nantes marque également une étape importante vers le renforcement du pouvoir royal absolutiste en France. Dans une mesure toute relative (les juifs n’étant pas concernés par le document), il garantit la liberté de conscience religieuse partout dans le royaume, accordant aux protestants la liberté de culte dans les lieux où ils étaient installé avant 1597. Selon Pierre Joxe[12] l’édit de Nantes marque un tournant dans l’histoire des mentalités : sa signature opère une distinction entre le sujet politique, qui doit obéir à la loi du roi dans la sphère publique, et le croyant, libre de ses choix religieux, dorénavant cantonnés à la sphère privée.

La légitimité de la monarchie absolue reposait cependant sur le droit divin (matérialisé par le sacre du roi avec l’huile de la sainte ampoule) ; elle ne pouvait donc se passer de l’Église catholique. Entre 1660 et 1685, le royaume entreprend une politique de conversion des protestants au catholicisme, pouvant aller jusqu’à la persécution (dragonnades). Après l’avoir vidé de son contenu, Louis XIV révoque l’édit de Nantes en signant l’édit de Fontainebleau en 1685.

Article connexe : Édit de Fontainebleau.

Le siècle des Lumières

Fragment du frontispice de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert : on y voit la Vérité rayonnante de lumière ; à droite, la Raison et la Philosophie lui arrachent son voile (peint par Charles-Nicolas Cochin et gravé par Benoît-Louis Prévost1772
Article détaillé : Lumières (philosophie).

Bien que le terme lui-même soit plus récent, l’idée philosophique et politique de laïcité apparaît en Europe au XVIIIe siècle (appelé « siècle des Lumières ») avec la Philosophie des Lumières. Celle-ci va initier l’idée d’égalité, faire germer les droits de l’homme, développer la tolérance pour parvenir à la liberté de conscience, lutter contre l’obscurantisme et émettre le vœu d’opérer une distinction entre l’Église catholique et l’État[13].

Il s’agit à l’époque, dans une Europe historiquement monarchique en vertu du droit divin, de contrecarrer le pouvoir du souverain en questionnant notamment celui du clergé. L’ébranlement de l’une des bases de la légitimité monarchique rend alors possible l’instauration de régimes aristocratiques ou démocratiques. La remise en cause de l’autorité cléricale s’accompagne aussi d’une libération morale, notamment sur le plan sexuel (libertinage).

Voltaire, à l’occasion du procès de Jean Calas écrit son Traité sur la tolérance ; il y soutient la thèse que l’ordre politique peut se passer des contraintes religieuses, tout comme Montesquieu dans De l’esprit des lois.

Jean-Jacques Rousseau, dans Du contrat social, expose l’idée de la souveraineté populaire et la notion d’intérêt général, au bénéfice duquel chacun doit consentir à l’abandon d'une part de ses « droits naturels » — cette confrontation entre l'égalité citoyenne et la liberté individuelle « exprime la tension entre le citoyen et la personne, entre l'espace public et l'espace privé[14] ».

Denis Diderot, dans La Religieuse, condamne les préjugés et les dogmes pour leur opposer une capacité éthique intrinsèque à l’homme.

Condorcet, dans Réflexions sur l’esclavage des nègres, s’oppose à l’esclavage au nom de droits naturels de l’humanité. Il défendra parallèlement l’émancipation des juifs et des femmes, développant le principe universel des droits humains.

En 1766, Le chevalier de La Barre est condamné à subir la torture ordinaire et extraordinaire, à avoir le poing et la langue coupés, à être décapité et brûlé avec l’exemplaire du Dictionnaire philosophique de Voltaire trouvé à son domicile. Son crime (supposé) est d’avoir chanté des chansons libertines irrespectueuses à l’égard de la religion, d’être passé devant une procession sans ôter son couvre-chef et de ne s’être pas agenouillé au passage de celle-ci. Voltaire et Victor Hugo, entre autres, feront du chevalier de La Barre un héros légendaire de la laïcité[15].

À l'instigation de Louis XVI, Malesherbes publie en 1785 son Mémoire sur le mariage des protestants[16], puis fait adopter en 1787 l'Édit de Tolérance[17] qui organise l’état civil des non-catholiques, initiant ainsi un début de reconnaissance de la pluralité des confessions.

L’émergence de la laïcité

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La fin de la royauté de droit divin

La Révolution française pose les principes de la laïcité : séparation de l’État et des cultes, sécularisation, égalité des cultes, liberté de conscience, etc. Ces principes seront partiellement annulés avec le concordat.

Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789

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Lors de la formation de l’Assemblée constituante, point de départ de la Révolution française, le clergé est allié au tiers état et vote avec lui la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789. Celle-ci dispose dans son article X que :

« Nul ne peut être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi[18]. »

Cet article affirme donc à la fois un droit : la liberté de conscience, et un devoir : le respect de l’ordre public.

Le 2 novembre, Talleyrand, évêque d’Autun, propose d’utiliser les biens du clergé pour éponger les dettes de la nation. Cette décision entraîne le divorce entre la Révolution et l’Église catholique.

Constitution civile du clergé

Article détaillé : Église constitutionnelle.

La Révolution française tente alors d’imposer la tutelle de l’État à l’Église par la Constitution civile du clergé. Cette constitution est proclamée le 12 juillet 1790. Auparavant, l'Assemblée a déjà commencé à intervenir au sein de l'Église de France : les biens du clergé sont confisqués et les religieux « invités » à quitter leurs couvents. Le patrimoine religieux passe sous la propriété de l'État, à charge pour celui-ci d'assurer l'entretien du clergé et des lieux de culte. Si le besoin d'argent est la raison conjoncturelle de cette disposition, qui permet ainsi de vendre la plupart des monastères comme « biens nationaux » et de récupérer de l'argent, la volonté de mettre l'Église sous tutelle de l'État est bien réelle. Les vœux monastiques sont interdits car considérés comme contraires aux droits de l'Homme, et les congrégations sont supprimées le 13 février 1790[19].

La Constitution civile du clergé a pour but d'organiser une religion « nationale » dans une France qui s'ouvre à la liberté religieuse. Tout en rappelant l'importance de la religion dans la vie de la Cité, l'Assemblée veut organiser l'Église nationale pour en faire essentiellement une source de morale publique, et non plus le fondement de la politique. Cette démarche est liée à la désacralisation du pouvoir royal, qui n'est plus considéré comme étant « de droit divin ». En tant que religion nationale, l'Église de France remodelée par la Constitution civile du clergé voit son gallicanisme s'accentuer, et est bouleversée dans son organisation temporelle : les diocèses sont remaniés selon le découpage départemental, les évêques sont élus, les curés également. La hiérarchie est calquée sur le fonctionnement politique et l'autorité temporelle du pape est très nettement affaiblie[20].

Face aux critiques de la Constitution civile du clergé par de nombreux évêques, et malgré le soutien d'une partie du clergé, l'Assemblée demande à tous les membres du clergé catholique de prêter un serment de fidélité à cette constitution à partir du 4 janvier 1791. Progressivement, les réfractaires sont réprimés, au nom du « respect de l'ordre public établi par la loi »[21].

Le pape Pie VI condamne les principes de la Révolution française en mars 1791. Il s'oppose nettement à la constitution civile du clergé et à la révocation unilatérale du Concordat de Bologne par l'Assemblée constituante. Les droits de l’homme font également l’objet d’une critique en règle, étant « contraires à la religion et à la société[22] ».

Dès 1792, le clergé réfractaire est traité en suspect et soumis à une surveillance particulière, voire emprisonné en cas de désobéissance. Puis, avec la Terreur, l’Église constitutionnelle fait elle aussi l’objet d’une sévère répression.

La Constitution de 1791, si elle garantit la liberté de culte, continue encore de financer les prêtres catholiques et eux seuls.

En septembre 1791, un projet de décret veut organiser des fêtes civiles, dont celle de la Fédération le 14 juillet. Cette manifestation, qui commémore le 14 juillet 1789, se veut la fête de la réconciliation et de l’unité de tous les Français. Le texte prévoit que toute cérémonie chrétienne est exclue de l’ensemble de ces festivités au motif que : « la sévère majesté de la religion chrétienne » ne lui permet pas de se mêler à ces manifestations profanes et à « leurs bruyants transports » (article 7).

Premiers textes et aménagements laïques

Condorcet — 1793

En 1792, Condorcet présente à la Convention un plan d’organisation de l’instruction publique basé sur les principes de la laïcité. Son Rapport sur l’instruction publique postule comme élément fondamental de l’éducation « la libération de l’esprit ». Il tient ainsi à bannir de l’école toute doctrine politique, toute autorité religieuse et tout dogme intellectuel ou pédagogique :

« La Constitution, en reconnaissant le droit à chaque individu de choisir son culte, en établissant une entière égalité entre tous les habitants de France, ne permet pas d’admettre dans l’instruction publique un enseignement qui donnerait à des dogmes particuliers un avantage contraire à la liberté des opinions[23]. »

Par la loi du 20 septembre 1792, l’état civil est enlevé au clergé pour être confié aux mairies [24], ce qui permet au juifs et aux protestants de devenir citoyens à part entière. Le divorce est autorisé. La laïcisation s’étend au mariage, au calendrier, à l’enseignement et à l’assistance publique.

Cathédrale de Clermont-Ferrand : « Le peuple français reconnoit l’Être Suprême » (inscription peinte, mise au jour lors d’une restauration)

Bien qu’incitant à la déchristianisation, la Révolution reste étrangère à la notion de laïcité et souhaite conserver l'idée d'appuyer l'unité du pays sur une religion nationale. C'est en ce sens qu'il faut comprendre les tentatives de cultes révolutionnaires[25] : Robespierre impose le culte de la Raison et de l’Être suprême, et proclame l’immortalité de l’âme par ces mots : « L’idée de l’Être suprême et de l’immortalité de l’âme est un rappel continuel à la justice ; elle est donc sociale et républicaine. »

Cependant les attaques contre la religion catholique et les cultes nouveaux ne sont pas acceptés partout et dans l’ouest de la France, la répression contre les curés réfractaires, la conscription obligatoire pour les armées de la République et l’exécution du roi le 21 janvier 1793 entraîne le soulèvement des catholiques. C’est la révolte des chouans.

La situation s’apaise à la mort de Robespierre en juillet 1794.

La République affirme la séparation complète des cultes et de l’État par la loi du 2 pluviôse an III (21 janvier 1795) :

« La République ne salarie aucun culte, ne fournit aucun local. La loi ne reconnaît aucun ministre. Interdiction de tout exercice hors de l’enceinte consacrée. »

Le 3 ventôse de l’an III (21 février 1795), la liberté de culte est établie par décret :

« L’exercice d’aucun culte ne peut être troublé. […] La République n’en salarie aucun. […] Quiconque troublerait par violence les cérémonies d’un culte quelconque, ou en outragerait les objets, sera puni. »

Ce décret permet la réouverture des églises — dont certaines ont été transformées en temples de la Raison, voire en entrepôts — signant ainsi la fin de la répression de l’expression religieuse. Les autres cultes bénéficieront aussi de ce droit. Boissy d’Anglas, promoteur du décret, accompagnera la promulgation de celui-ci par un discours sur la liberté des cultes devant la Convention nationale :

« Citoyens, le culte a été banni du gouvernement, il n’y rentrera plus. Vos maximes doivent être à son égard celles d’une tolérance éclairée, mais d’une indépendance parfaite. […] Les pratiques religieuses peuvent s’exercer aussi ; elles ne sont pas des délits envers la société. L’empire de l’opinion est assez vaste pour que chacun puisse y habiter en paix. […] Les cultes, quels qu’ils soient, n’auront de vous aucune préférence[26]. »

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Certains termes du décret du 3 ventôse seront d’ailleurs repris dans l’article nº 354 de la Constitution de l’an III, proclamée par la Convention thermidorienne le 5 fructidor an III (22 août 1795) :

« Nul ne peut être empêché d’exercer, en se conformant aux lois, le culte qu’il a choisi. Nul ne peut être forcé de contribuer aux dépenses d’un culte. La République n’en salarie aucun. »

En 1795, la loi Daunou fixe un calendrier de fêtes laïques, parmi lesquelles la fête de la République, la fête de la jeunesse, ou la fête des époux. Les deux Églises, la réfractaire et la constitutionnelle, essaient de se réorganiser indépendamment l’une de l’autre et tentent même quelques rapprochements infructueux.

En l’an V (1797), par crainte de revendications royalistes, le clergé est à nouveau inquiété, cette fois par le Directoire. Le pape est chassé de Rome à l’issue des succès militaires de Napoléon Bonaparte en Italie.

Du Consulat à la Deuxième République

Sous le Consulat et l’Empire

Les princes de l’Église prêtant le serment civil exigé par le concordat — 1801
Portrait de Napoléon Bonaparte en premier consul par Ingres — 1803

Un concordat est un accord diplomatique entre le Saint-Siège et un État souverain. Après son coup d’État du 18 brumaire, Napoléon Bonaparte veut dissocier la cause de la monarchie de celle de la religion catholique et établir l’ordre moral. Pour ce faire, il signe le concordat de 1801 qui rétablit les relations avec l’Église catholique de Rome.

Il s’agit plus ici d’un compromis entre le Consulat et la papauté que d’une véritable alliance. Par ce document, le pape reconnaît la République et renonce aux biens enlevés au clergé sous la Révolution. En contrepartie, le gouvernement de la République française reconnaît que la religion catholique, apostolique et romaine emporte l’adhésion de la très grande majorité des citoyens français, sans en faire pour autant une religion d’État[27].

Le document est succinct et relativement flou[28].

Dès l’article premier, le texte rétablit le libre exercice du culte catholique : « La religion catholique, apostolique et romaine sera librement exercée en France. »

Les archevêques et évêques sont désormais nommés par le gouvernement mais reçoivent l’institution canonique du pape. Le document dispose en outre qu’il « sera fait par le Saint-Siège, de concert avec le gouvernement, une nouvelle circonscription des diocèses français ». En échange de l’abandon des biens ecclésiastiques, « le gouvernement assurera un traitement convenable aux évêques et aux curés » (article 14).

L’Église est toutefois subordonnée au gouvernement : les évêques et prêtres doivent prêter serment de fidélité au gouvernement[n 2] (articles 6 et 7) ; ils doivent en outre faire réciter à la fin de l’office divin la formule de prière : « Domine salvam fac Rempublicam; Domine, salvos fac Consules[n 3] » (article 8).

Une loi organique du 18 germinal an X (8 avril 1802), censée préciser les termes du concordat, limite encore davantage le rôle du pape en réaffirmant la charte de l’Église gallicane de Louis XIV et en restreignant la liberté de mouvement des évêques, qui n’ont pas le droit de se réunir en assemblée. Pie VII ne reconnaîtra pas les soixante-dix-sept « articles organiques » ajoutés au concordat et limitant le pouvoir du pape — ils seront néanmoins appliqués jusqu’en 1905.

Les articles organiques, qui contiennent principalement des mesures de règlement civil, témoignent néanmoins de la subordination de l’Église vis-à-vis de l’État : l’État a le pouvoir d’empêcher la mise en œuvre de bulles ou de brefs émanant du pape (article I), et c’est le Conseil d’État qui est le dernier ressort en cas d’appel comme d’abus contre une décision d’un membre du clergé, alors que le pape voulait que ce soient les évêques (articles VI-VIII). Les évêques doivent également avoir la permission du gouvernement pour créer des séminaires (articles XI et XXXV) et c’est le préfet qui supervise les votes de budget des cultes au sein des conseils généraux et municipaux (article XXXIV)[29].

Le concordat est sur bien des points plus défavorable à l’Église que la Constitution civile du clergé. Il permet essentiellement à Napoléon Bonaparte de bénéficier du soutien du pape et de l’Église catholique, du moins jusqu’à son excommunication en 1806. En 1808, le pape est emprisonné par l’armée napoléonienne jusqu’en 1814.

Trois titres des articles organiques sont consacrés au protestantisme. Ils regroupent quarante-quatre articles réglementant l’organisation des Églises réformées.

L’Alsace et la Moselle bénéficient toujours du régime concordataire. Elles n’étaient en effet pas françaises en 1905, quand le concordat fut annulé par la loi de séparation des Églises et de l’État en 1905.

Le Consulat établit un pluralisme confessionnel à travers le système des cultes reconnus : les cultes catholique, protestant luthérien et protestant réformé, ainsi qu’israélite (à partir de 1808). Ceux-ci bénéficient de certains avantages matériels comme la rémunération de leurs ministres par l’État. Les autres cultes ne bénéficieront d’aucune reconnaissance.

Par sa vision relativement libérale des confessions, le Consulat met fin aux guerres civiles et religieuses qui avaient divisé les Français.

Sous la Restauration

À la chute de Napoléon, le pape possède un prestige très fort auprès des catholiques français ; c’est l’époque de l’ultramontanisme (le pouvoir d’au-delà des Alpes). Sur le plan politique, c’est l’avènement de la Restauration monarchique et religieuse, dernier épisode de l’alliance entre l’Église catholique et l’État français.

Le clergé reprend la main : il impose des processions, proscrit les bals du dimanche et parfois, refuse de donner les sacrements aux propriétaires de biens nationaux. Dès le début de la Restauration, l'Église catholique se voit accorder plus de moyens tandis que son influence sur l'éducation grandit[30]. Le 8 mai 1816 le divorce, considéré comme « un poison révolutionnaire », est aboli.

Cette alliance de l’Église catholique et des monarchistes va entraîner l’opposition des partis révolutionnaires, voire générer des complots visant à destituer le roi Louis XVIII.

Sous Charles X, en 1825, la loi Villèle punit de mort le sacrilège et la profanation religieuse[31].

Les libéraux s'inquiètent de la situation et reçoivent un accueil favorable des électeurs : sous le gouvernement de Martignac sont adoptées des mesures « anticléricales » telle une réduction drastique du nombre de garçons admis dans les « petits séminaires » et des mesures contre les Jésuites[32].

Article connexe : Restauration française.

Sous la Deuxième République

Victor Hugo
photographié par Charles Hugo à Jersey — 1854

La révolution de février 1848 signe la fin de la monarchie de Juillet et la naissance de la Deuxième République ; un vent de fraternité souffle sur la France et il semble alors possible de réconcilier chrétiens et républicains au nom de la concorde universelle.

Après les émeutes de juin 1848, un gouvernement conservateur prend le pouvoir. La séparation des Églises et le l’État, acquise en 1795, supprimée par le Concordat de 1801 est rejetée. Afin de conforter l’électorat conservateur et catholique, le ministre de l’Instruction publique, le comte Alfred de Falloux, projette de réorganiser complètement le système d’enseignement sous des prétextes de « liberté », pour le placer en réalité sous le contrôle de l’Église catholique. Ses intentions sont vivement dénoncées par Victor Hugo devant l’Assemblée législative, dans un discours aux accents laïques qui fera date :

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« Deux censures pèsent sur la pensée, la censure politique et la censure cléricale ; l’une garrotte l’opinion, l’autre bâillonne la conscience. […] Je veux, je le déclare, la liberté de l’enseignement, mais je veux la surveillance de l’État, et comme je veux cette surveillance effective, je veux l’État laïque, purement laïque, exclusivement laïque. […] J’entends maintenir, quant à moi, et au besoin faire plus profonde que jamais, cette antique et salutaire séparation de l’Église et de l’État qui était l’utopie de nos pères, et cela dans l’intérêt de l’Église comme dans l’intérêt de l’État. […] Je ne veux pas qu’une chaire envahisse l’autre, je ne veux pas mêler le prêtre au professeur. […] Je veux l’enseignement de l’Église en dedans de l’église et non au dehors. […]
En un mot, je veux, je le répète, ce que voulaient nos pères, l’Église chez elle et l’État chez lui. »

En 1850, la loi Falloux permet finalement aux congrégations religieuses d’assurer près de la moitié de l’enseignement primaire public. Elle oblige également les instituteurs à enseigner le catéchisme et à conduire les élèves à la messe. Les évêques siègent de droit aux conseils d’académie, l’école est surveillée par le curé conjointement avec le maire. Un simple rapport du maire ou du curé peut permettre à l’évêque de muter un instituteur à sa guise.

L’affirmation de la laïcité — les deux France

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Dans l’histoire de la France, la guerre des deux France[33],[34] désigne un long conflit entre les partisans d’une France monarchique, catholique et conservatrice, et les tenants d’une France laïque, républicaine et ancrée vers la gauche. Le camp laïque finit par l’emporter au début du xxe siècle, malgré de nombreux heurts, pour mener par la suite une politique de réconciliation lors de la Première Guerre mondiale.

Les élans de la modernité

L’encyclique Quanta Cura et le Syllabus

Pie IX, adversaire de la liberté de conscience
Articles détaillés : Quanta Cura et Syllabus.

Le 8 décembre 1864, le pape Pie IX publie l’encyclique Quanta Cura[35], « condamnant l’évolution du monde moderne ».

Celle-ci dénonce les « monstruosités extraordinaires que sont les opinions » et notamment celle-ci :

« La liberté de conscience et des cultes est un droit propre à chaque homme. Ce droit doit être proclamé et garanti par la loi dans toute société bien organisée. Les citoyens ont droit à l’entière liberté de manifester hautement et publiquement leurs opinions quelles qu’elles soient, par les moyens de la parole, de l’imprimé ou tout autre méthode sans que l’autorité civile ni ecclésiastique puisse lui imposer une limite. »

Les notions de séparation des pouvoirs civil et spirituel y sont qualifiées de « principes hérétiques ». Le pape affirme qu’à l’inverse, « le pouvoir de gouverner est conféré non pour le seul gouvernement de ce monde, mais avant tout pour la protection de l’Église ». Cette lettre encyclique est accompagnée du Syllabus ou Recueil renfermant les principales erreurs de notre temps. Ce document, qui condamne les principes de la laïcité acquis depuis la Révolution, peut en être un recueil ; on peut y lire notamment :

« Il est libre à chaque homme d’embrasser et de professer la religion qu’il aura réputée vraie d’après la lumière de la raison. […]
L’État, comme étant l’origine et la source de tous les droits, jouit d’un droit qui n’est circonscrit par aucune limite. […]
La bonne constitution de la société civile demande que les écoles populaires, qui sont ouvertes à tous les enfants de chaque classe du peuple, et en général que les institutions publiques destinées aux lettres, à une instruction supérieure et à une éducation plus élevée de la jeunesse, soient affranchies de toute autorité de l’Église, de toute influence modératrice et de toute ingérence de sa part, et qu’elles soient pleinement soumises à la volonté de l’autorité civile et politique, suivant le désir des gouvernants et le niveau des opinions générales de l’époque. […]
L’Église doit être séparée de l’État, et l’État séparé de l’Église. […]
Les lois de la morale n’ont pas besoin de la sanction divine, et il n’est pas du tout nécessaire que les lois humaines se conforment au droit naturel ou reçoivent de Dieu le pouvoir d’obliger. […]
Les causes matrimoniales et les fiançailles, par leur nature propre, appartiennent à la juridiction civile. […] »

La diffusion de ce document déclenche alors un fort courant anticlérical qui traverse toute l’Europe. La condamnation du catholicisme libéral, de la liberté de la presse, ainsi que des révolutions de 1830 par l’encyclique Mirari Vos[36], fait naître chez de nombreux catholiques ce que l’on appellera la crise moderniste et provoque de la part des gouvernements des procédures de rétorsion, dont le Kulturkampf allemand (1864) et son homologue suisse (1873).

Article connexe : Mirari Vos.

La Commune de Paris

Article détaillé : Commune de Paris (1871).
Affiche de la Commune de Paris

En 1871, la Commune de Paris prend des mesures importantes en faveur de la laïcité — le terme apparaît pour la première fois le 11 novembre 1871 dans le journal La Patrie —, dont certaines seront reprises par le gouvernement de la Troisième République. Le 2 avril, la Commune décrète la séparation de l’Église (catholique) et de l’État, la suppression du budget des cultes et la sécularisation des biens des congrégations religieuses.

Édouard Vaillant, chargé de l’éducation, prévoit une réforme impliquant une laïcisation sur plusieurs plans. Il veut une éducation sécularisée : l’enseignement confessionnel est interdit et les signes religieux chrétiens sont enlevés des salles de classe. Il souhaite un accès égal des filles et des garçons à l’éducation : une commission composée de femmes est formée le 21 mai pour réfléchir sur l’enseignement des filles. Parallèlement, une égalité de traitement entre les hommes et les femmes est mise en place pour les enseignants et directeurs. Quelques municipalités d’arrondissement rendent l’école gratuite. La Commune reconnaît les droits politiques des femmes.

L’utopie finit dans le sang en mai.

Laïcisation et réactions

À partir de 1875, Alfred Naquet dépose plusieurs propositions de loi concernant le divorce (celui-ci avait disparu en 1816). Le texte final est adopté en 1884 et réglemente ensuite le divorce pendant près d’un siècle.

La réaction de l’État français à la position de l’Église catholique se manifeste à partir des élections de janvier 1879 et l’arrivée à la présidence de la République de Jules Grévy. Les changements laïques les plus importants se font dans le domaine de l’éducation, notamment sous l’impulsion de Jules Ferry (voir paragraphe suivant). En 1880, la loi qui interdisait le travail le dimanche et les jours de fête est abolie (elle sera rétablie quelques années plus tard). Cette année-là, le pape Léon XIII finit par reconnaître dans son encyclique Diuturnum[37] que les personnes au pouvoir peuvent être choisies par la volonté et le jugement de la multitude sans que la doctrine catholique y fasse obstacle.

En 1884, les prières précédant les sessions parlementaires sont supprimées. La même année, Léon XIII appelle à un rapprochement entre catholiques et républicains dans la lettre encyclique Nobilissima Gallorum Gens[n 4], tout en regrettant que la France soit « oublieuse de ses traditions et de sa mission[38] ».

Dans une deuxième période, malgré les appels à l’apaisement du pape Léon XIII, notamment dans son encyclique Inter Innumeras Sollicitudines[n 5] (aussi appelée : L’Encyclique du ralliement), de nombreux catholiques se radicalisent. C’est alors l’émergence de l’anti-républicanisme de l’Action française de Charles Maurras, et des positions anti-dreyfusardes des catholiques conservateurs.

Articles connexes : Divorce et Affaire Dreyfus.

Les « hussards » de l’école publique

À cette époque du scientisme triomphant, les républicains, souvent libres penseurs et francs-maçons ou protestants, se reconnaissent comme héritiers des Lumières.

Les congrégations religieuses, favorisées dans l’enseignement par la Loi Falloux, sont alors vues comme des entités socialement inutiles et nuisibles au progrès de la nation. C’est ainsi que Léon Gambetta déclare :

« Il faut refouler l’ennemi, le cléricalisme, et amener le laïque, le citoyen, le savant, le français, dans nos établissements d’instruction, lui élever des écoles, créer des professeurs, des maîtres. »

Jules Ferry

Article détaillé : Jules Ferry.
Jules Ferry

En ce dernier quart du xixe siècle, la France est déjà honorablement alphabétisée (72 % des nouveaux mariés peuvent signer le registre de mariage). Mais, encore marqués par la défaite de 1870, les dirigeants de la Troisième République veulent aller plus loin en donnant à l’école la tâche de former de bons républicains et de bons patriotes. Jules Ferry, avocat passionné par la chose publique, sincèrement républicain, réformera alors profondément l’organisation scolaire de la Troisième République, ce qui fera de lui une figure emblématique de la laïcité française.

En février 1879, Jules Ferry devient ministre de l’Instruction publique. En septembre 1880, il devient président du Conseil et poursuit la laïcisation de la société en s’appuyant sur une réforme de l’enseignement public (1880-1881).

Son influence se lit notamment à travers les étapes suivantes : En février 1880, les ecclésiastiques sont exclus du Conseil supérieur de l’Instruction publique ; en mars, l’enseignement catholique est exclu des jurys universitaires et les congrégations sont priées de quitter leurs instituts d’enseignement (jésuites, maristes, dominicains, assomptionnistes…) ; en décembre, c’est la loi de Camille Sée portant sur la création de collèges et de lycées de jeunes filles ; en juin 1881, sur un rapport de Paul Bert, ancien ministre de l’Instruction publique durant le bref gouvernement Gambetta, l’enseignement primaire devient gratuit.

Portrait de Clemenceau par Anatole France dans L'Humanité du 31 octobre 1906, alors qu'il vient d'être nommé Président du Conseil (cliquer sur l'image à répétition pour lire). « Gambetta (...) s'écria d'une voix de colère: « Le cléricalisme, voilà l'ennemi! » (...) Coups de clairon qui sonnaient la charge contre le vide (...) La politique religieuse des opportunistes consista toujours à composer secrètement avec les congrégations qu'on affectait de frapper au grand jour. (...) Et quand Jules Ferry, abandonnant jusqu'aux apparences de l'anticléricalisme, s'allia avec le clergé dans des entreprises coloniales, fructueuses seulement pour quelques capitalistes privilégiés (...), Clemenceau, au risque de perdre sa popularité, s'éleva contre un système de conquêtes lointaines (...). »

En 1882, Jules Ferry est à nouveau ministre de l’Instruction. Le 28 mars, la loi relative à l’obligation et à la laïcité de l’enseignement est votée[39]. Elle porte sur l’obligation d’instruction — et non de scolarisation, l’article 4 indiquant que l’instruction peut être donnée dans les établissements d’instruction, les écoles publiques ou libres ou dans les familles. L’enseignement de la morale religieuse est supprimé, au profit d’une « instruction morale et civique ». Un jour par semaine est réservé, en sus du dimanche, à l’enseignement éventuel du catéchisme.

En novembre 1883, Jules Ferry envoie aux instituteurs une lettre de « recommandations » sur le nouveau régime scolaire :

« La loi du 28 mars se caractérise par deux dispositions qui se complètent sans se contredire : d’une part, elle met en dehors du programme obligatoire l’enseignement de tout dogme particulier ; d’autre part, elle y place au premier rang l’enseignement moral et civique. L’instruction religieuse appartient aux familles et à l’Église, l’instruction morale à l’école. Le législateur n’a donc pas entendu faire une œuvre purement négative. Sans doute il a eu pour premier objet de séparer l’école de l’Église, d’assurer la liberté de conscience et des maîtres et des élèves, de distinguer enfin deux domaines trop longtemps confondus : celui des croyances, qui sont personnelles, libres et variables, et celui des connaissances, qui sont communes et indispensables à tous, de l’aveu de tous. Mais il y a autre chose dans la loi du 28 mars : elle exprime la volonté de fonder chez nous une éducation nationale, et de la fonder sur les notions du devoir et du droit que le législateur n’hésite pas à inscrire au nombre des premières vérités que nul ne peut ignorer. Pour cette partie capitale de l’éducation, c’est sur vous, Monsieur, que les pouvoirs publics ont compté. En vous dispensant de l’enseignement religieux, on n’a pas songé à vous enlever ce qui fait la dignité de votre profession. Au contraire, il a paru tout naturel que l’instituteur, en même temps qu’il apprend aux enfants à lire et à écrire, leur enseigne aussi ces règles élémentaires de la vie morale qui ne sont pas moins universellement acceptées que celle du langage ou du calcul. […]
Vous ne toucherez jamais avec trop de scrupule à cette chose délicate et sacrée, qui est la conscience de l’enfant[40]. »

Paul Bert

Article détaillé : Paul Bert.

Paul Bert est, avec Jules Ferry, le père fondateur de l’école gratuite, laïque et obligatoire. Sa loi du 9 août 1879[41] impose l’existence de deux écoles normales par département : une de garçons, et une de filles, pour les élèves institutrices. Les jeunes maîtres et maîtresses sortant de ces établissements seront appelés les hussards noirs.

Libre-penseur, fidèle à la devise « Ni dieu, ni maître, à bas la calotte et vive la Sociale », Paul Bert oppose la science à la religion :

« Avec la science, plus de superstitions possibles, plus d’espérances insensées, plus de ces crédulités niaises, de ces croyances aux miracles, à l’anarchie dans la nature. »

En 1880, il intervient devant la Chambre des députés en tant que rapporteur du projet de loi qui porte son nom, pour évoquer le principe de laïcité (et notamment la liberté de conscience) appliqué à l’enseignement primaire obligatoire :

« Nous édictons une loi qui peut frapper de peines assez sévères le père de famille, s’il n'envoie pas son enfant à l'école ; en présence de cette situation […] il nous a paru indispensable d’affirmer au père de famille que rien ne sera enseigné dans cette école qui puisse porter atteinte à la liberté de conscience de son enfant et à la sienne propre[42]. »

En 1886, il collabore aux côtés de Jean Macé à la direction de la Ligue de l’enseignement, qui milite pour une instruction publique, obligatoire, gratuite et laïque.

Article connexe : Hussard noir.

Ferdinand Buisson

Article détaillé : Ferdinand Buisson.

Ferdinand Buisson, directeur de l’Enseignement primaire de 1879 à 1896, supervise le travail d’écriture et de conception des lois sur la laïcité dans l’éducation. Parallèlement, il dirige la rédaction d’un Dictionnaire de pédagogie et d’instruction primaire[43] dont il rédige lui-même l’article sur la laïcité[44] :

« La législation française est la seule qui ait établi le régime de la laïcité d’une façon logique et complète : laïcité de l’enseignement, laïcité du personnel enseignant.
Que faut-il entendre par laïcité de l’enseignement ? Nous estimons qu’il faut prendre ces mots dans le sens qui se présente le premier à l’esprit, c’est-à-dire dans leur acception la plus correcte et la plus simple : l’enseignement primaire est laïque, en ce qu’il ne se confond plus avec l’enseignement religieux. »

René Goblet

René Goblet
photographié par Eugène Pirou
Article détaillé : Loi Goblet.

En 1886, la loi Goblet[45] (du nom de René Goblet, alors ministre de l’Instruction publique) interdit aux religieux d’enseigner dans les établissements publics. Plus généralement, elle redéfinit l’organisation de l’enseignement primaire.

Lors de la présentation devant le Sénat du rapport de la commission ayant étudié le projet de loi, le sénateur Jean-Baptiste Ferrouillat expose les fondements laïques du projet de « reconstruction de l’enseignement » :

« La loi du 28 mars 1882 a laïcisé les programmes. Le projet actuel impose la laïcité du personnel enseignant. On peut dire que la première réforme appelait la seconde. Il n’est pas rationnel de mettre des religieux à la tête d’une école où l’enseignement de la religion n’a plus de place. — Comment, d’ailleurs, n’être pas frappé du grave inconvénient de conserver des instituteurs qui ont deux supérieurs, dont l’un commande au nom de Dieu, et l’autre au nom de l’État, et qui, en cas de conflit entre ces deux autorités, sont naturellement portés à se soumettre à leur supérieur religieux plutôt qu’à leur supérieur civil ? — N’est-il pas même à la fois illogique et imprudent, de la part de l’État, de confier la jeunesse française, pour lui donner les notions des devoirs civiques et éveiller en elle l’amour de nos institutions, à des maîtres qui obéissent à des chefs étrangers et qui se montrent, par principe, hostiles aux institutions républicaines et aux idées de la société moderne[46] ? »

La loi Goblet contient la première référence explicite à la laïcité dans un texte légal :

« Article 17 — Dans les écoles publiques de tout ordre, l’enseignement est exclusivement confié à un personnel laïque. »

La loi de 1901

Pierre Waldeck-Rousseau
photographié par Nadar

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Article détaillé : Association loi de 1901.

En 1901, la loi sur les associations[47] (dite loi 1901, ou loi Waldeck-Rousseau) autorise la création rapide de toutes sortes d’associations, sous réserve qu’elles ne soient pas confessionnelles. Le Titre III de cette loi est anticongréganiste selon Bernard Delpal[48] :

« Toute congrégation religieuse peut obtenir la reconnaissance légale par décret rendu sur avis conforme du Conseil d’État. […] À défaut de […] justification, elles sont réputées dissoutes de plein droit. […] La liquidation des biens détenus par elles aura lieu en justice. »

Sur 160 000 religieux et religieuses, 30 000 choisissent l’exil. Il existe aussi à cette époque des communautés de diaconesses protestantes qui, n’ayant jamais demandé d’autorisation, n’ont pas l’obligation d’obtenir une reconnaissance légale[49].

Pourquoi s’en prendre ainsi aux congrégations ? Selon le professeur de droit public Jean-Pierre Machelon :

« Il était impossible de reconnaître la liberté d’association sans que s’ensuivent pour les congrégations des immunités que les responsables politiques ne pouvaient envisager d’accepter. Impossible aussi d’escompter des républicains modérés qu’ils excluent les congrégations d’un droit commun libéralisé[50]. »

En mai 1902, avec la nomination d’Émile Combes à la présidence du Conseil, le gouvernement prend une coloration fortement anticléricale. Certains militaires se rebellent, tels le grand-père d'Emmanuel Le Roy Ladurie, le commandant Barthélemy-Emmanuel Le Roy Ladurie, destitué de ses fonctions par le conseil de guerre en août 1902.

La loi de 1904

La loi du 5 juillet 1904 interdit aux congrégations religieuses le droit d'enseigner.

Au cours de l’été 1904, une série de mesures visant à combattre l’influence de l’Église sont prises : débaptisation des rues portant un nom de saint, fermeture de 2 500 écoles religieuses, promotion systématique des fonctionnaires anticléricaux et révocation des catholiques. Le 30 juillet, la rupture diplomatique avec le Saint-Siège est consommée.

Une vaste enquête secrète est réalisée par le ministre André qui réunit vingt-mille fiches sur les pratiques religieuses des hauts fonctionnaires et des gradés de l’armée. Le 11 novembre 1904, l’affaire des fiches est dévoilée par la presse d’opposition et le gouvernement Combes doit démissionner.

La loi de 1905

Caricature parue dans Le Rire
le 20 mai 1905

Sans contenir de référence explicite à la laïcité, la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État est considérée comme le pilier des institutions laïques. Elle pose le principe de la liberté de conscience et celui du libre exercice des cultes. Parallèlement, elle affirme son intention de sécularisation en confiant à l’État les biens confisqués à l’Église et en supprimant la rémunération du clergé par l’État.

Le contexte

Les partisans de la laïcité se partagent alors en deux camps : les premiers, de tradition jacobine, espèrent éradiquer l’emprise des religions sur l’espace public et promeuvent une politique clairement anticléricale (Émile Combes), voire antireligieuse (Maurice Allard) ; les seconds veulent d’une part affirmer la neutralité de l’État, et d’autre part garantir la liberté de conscience de chacun.

Alors que les premiers ont dominé les débats jusqu’à l’affaire des fiches, la loi de 1905 est l’œuvre des personnalités de l’autre camp. Mais celui-ci, qui veut respecter la liberté de conscience et de culte, se divise également entre ceux qui veulent le faire dans le cadre de l’universalisme abstrait républicain (Ferdinand Buisson, Georges Clemenceau) et les accommodeurs (Jean Jaurès, Francis de Pressensé et surtout Aristide Briand). Ce sont ces derniers qui vont faire adopter un article 4, d’origine anglo-saxonne, qui remet les églises à ceux « qui se conforment aux règles générales du culte dont ils se proposent d’assurer l’exercice » (ce qui, indirectement, respecte l’organisation hiérarchique de l’Église catholique).

Voulue comme une loi d’apaisement, la loi concernant la séparation est destinée à mettre fin à plus de vingt-cinq ans de tensions entre l’Église catholique et la République.

Le texte

Première page du projet de loi concernant la séparation des Églises et de l’État — 1905

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Dès l’article premier, la loi rappelle l’article 10[n 6] de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 :

« La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public. »

S’agissant de la liberté de conscience, l’État reste garant de la liberté de chacun de pratiquer la religion qu’il souhaite (ou de n’en pratiquer aucune), tant que cet exercice se fait dans le respect de l’ordre public. C’est dans cet esprit que sont prévues certaines dispositions libérales, qui sont décriées par les laïques les plus radicaux, comme la gratuité de la mise à disposition des édifices religieux par les communes ou la création d’aumôneries dans les casernes, lycées, prisons, hôpitaux, etc.

Concernant les cultes, l’article deuxième dispose que :

« La République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte. »

Ainsi, le catholicisme perd-il, aux yeux de la République, sa prééminence passée sur les autres religions — d’aucuns reprocheront d’ailleurs à la laïcité son manque de reconnaissance des « racines chrétiennes » de la nation[51].

À l’opposé, les religions et spiritualités plus confidentielles se retrouvent à rang égal avec les courants religieux principaux, le mot « culte » étant pris ici dans le sens commun de « religion ».

L’État renonce de surcroît à tout droit de regard sur l’organisation des Églises et des religions mais il exige en contrepartie la formation d’associations cultuelles qui seront les interlocuteurs exclusifs de la République. Plus généralement, les pouvoirs publics s’interdisent toute intervention, positive ou négative, dans les questions religieuses, ce qui marque une rupture importante avec le régime concordataire précédent.

Sur le plan financier, la loi paraît contraignante pour les Églises : les associations cultuelles ne peuvent remplir de rôle caritatif, pas plus qu’elles ne peuvent enseigner, ce qui les prive d’une manne importante. En outre, elles ne peuvent recueillir ni dons ni legs. Elles doivent assurer la gestion des biens confisqués à l’Église, devenus propriété de l’État. Enfin, les ministres du culte ne sont plus salariés par l’État. Finalement, la prise en charge de l’entretien des bâtiments par l’État sera très avantageux pour l’Église catholique — paradoxalement, les protestants qui ont accepté la loi seront moins favorisés.

Les conséquences

Manifestation devant Notre-Dame des Champs — 1905
Article connexe : Querelle des inventaires.


La loi met fin à la tradition qui datait de Clovis, d’une « France fille aînée de l’Église ». Elle est donc saluée par les anticléricaux, comme en témoigne une allocution de René Viviani à la Chambre :

« Tous ensemble, par nos pères et par nos aînés, par nous-mêmes, nous nous sommes attachés dans le passé à une œuvre d’anticléricalisme, à une œuvre d’irréligion. Nous avons arraché les consciences humaines à la croyance. Lorsqu’un misérable, fatigué du poids du jour, ployait les genoux, nous l’avons relevé, nous lui avons dit que derrière les nuages il n’y avait que des chimères. Ensemble, et d’un geste magnifique, nous avons éteint dans le ciel des lumières qu’on ne rallumera plus. Voilà notre œuvre, notre œuvre révolutionnaire. Est-ce que vous croyez que l’œuvre est terminée ? Elle commence au contraire. »

Globalement bien accueillie par les juifs et les protestants (dont Wilfred Monod), la loi est combattue par le pape Pie X, notamment dans son encyclique Vehementer Nos[52] :

« Qu’il faille séparer l’État de l’Église, c’est une thèse absolument fausse, une très pernicieuse erreur. Basée, en effet, sur ce principe que l’État ne doit reconnaître aucun culte religieux, elle est tout d’abord très gravement injurieuse pour Dieu. […] Nous lui devons donc, non seulement un culte privé, mais un culte public et social, pour l’honorer. »

Des fidèles catholiques (parfois extérieurs à l’Église, comme l’Action française à Paris) et des ecclésiastiques s’opposent parfois violemment aux inventaires de 1906, qui peuvent être menés, selon Patrick Cabanel, « avec un zèle mesquin[53] ». Devenu président du Conseil, Georges Clemenceau décide rapidement de ne faire les inventaires qu’aux endroits où l’on n’attend pas de résistance. En janvier et mars 1907, deux nouvelles lois sont prises sous l’égide d’Aristide Briand, alors ministre des Cultes, pour ne pas créer un « délit de messe », malgré le refus d’appliquer la loi de la part de bon nombre de catholiques.

Associations cultuelles
Article détaillé : Association cultuelle.

Les associations cultuelles peuvent être considérées, d’un point de vue de la laïcité stricte, comme un droit particulier exorbitant du cadre associatif général, qui avantagerait les religions. En effet, celles-ci bénéficient de certains avantages fiscaux (ainsi que de la prise en charge de l’entretien des lieux de culte par les pouvoirs publics) ; il en va de même pour les dons et legs qui leur sont faits. Ces avantages ont pu être à l’époque considérés par des personnalités politiques de tendances diverses comme étant en contradiction avec l’esprit de la loi — Jean Jacques, du Parti radical, reprend les propos de Jules Méline, de la droite modérée, affirmant que « les associations cultuelles [allaient] devenir l’état-major du parti catholique[54] ».

Profitant de la liberté religieuse et des nouvelles libéralités qui leur sont consenties par la loi de 1905, deux cents associations cultuelles catholiques se développent, en dépit de l’opposition de la hiérarchie romaine. Elles se regroupent et s’organisent au sein de la Ligue des catholiques de France, puis du Secrétariat des associations cultuelles catholiques ; elles seront agressivement combattues par les catholiques conservateurs. Sous prétexte de ramener l’ordre public, les églises qui avaient été confiées au clergé gallican lui sont progressivement retirées. Du fait de l’absence de soutien de l’État, qui veut éviter de brusquer davantage le pape, le mouvement se désagrège alors lentement. Le catholicisme gallican ne subsistera que dans les lieux où les fidèles auront les moyens de bâtir leurs propres églises[55].

En août 1906, le pape Pie X interdit aux fidèles de créer des associations cultuelles par son encyclique Gravissimo Officii Munere[n 7]. Il y affirme qu’il est « absolument impossible de créer des associations cultuelles sans violer les droits sacrés touchant à la vie même de l’Église ». Mgr Louis Duchesne surnomme alors cette encyclique Digitus In Oculo (« doigt dans l’œil »), pour signifier que la laïcité est acceptée par une partie du clergé et du laïcat français. L’opposition du pape à la loi française aura pour conséquence le transfert de la presque totalité des biens immobiliers de l’Église au profit de l’État.

Le gouvernement accepte finalement en 1924 d’autoriser la création d’associations diocésaines composées d’ecclésiastiques et soumises à l’autorité de l’évêque. Le 8 juillet 1941, une loi permet aux associations cultuelles, après autorisation administrative, de recueillir des dons et legs. Cette disposition marque la fin de la contestation de la loi par l’épiscopat.

À long terme, la loi de 1905 fut reconnue comme globalement bénéfique pour l’Église catholique romaine, puisqu’elle ôte à ses adversaires un de leurs reproches principaux : sa puissance financière incontrôlable. D’autre part, les ministres du culte, et en particulier les évêques, ont aussi gagné en indépendance par rapport à l’administration. Enfin le mode d’attribution des autorisations administratives et le quasi monopole de jouissance des édifices religieux lui permettront de limiter l’apparition de cultes concurrents.

Exceptions à la loi de 1905

Alsace-Moselle

L’Alsace et la Moselle n’étant pas françaises au moment de la promulgation de la loi, elles sont toujours sous régime concordataire.

Cet élément du droit local alsacien et mosellan reconnaît et organise les cultes catholique, luthérien, réformé et israélite. Les quatre cultes reconnus sont administrés par des établissements publics du culte qui sont autofinancés, les dépenses étant supportées par les cotisations des fidèles. Toutefois, les collectivités territoriales sont tenues d’assurer le logement des ministres du culte, de subvenir à l’insuffisance éventuelle de budget de l'établissement public, et de contribuer aux financement des constructions ou des grosses réparation des lieux de culte[56]. Les ministres des cultes sont salariés par l’État mais n’ont pas le statut de fonctionnaires[57].

Les évêques de Strasbourg et Metz ainsi que le président de l’Église protestante de la Confession d’Augsbourg d’Alsace et de Lorraine sont nommés par le chef de l’État. Les membres laïcs élus des consistoires israélites des trois départements doivent avoir l’agrément du Premier ministre.

Cette dérogation au principe constitutionnel de laïcité provoque des réactions contradictoires. Le sociologue Jean Baubérot, partisan d’une « laïcité inclusive », y voit une « tête de pont, à partir de laquelle on adapterait la France à l’Europe[58] ». Pour Mgr Joseph Doré, ancien archevêque de Strasbourg, le régime concordataire d’Alsace-Moselle pourrait « constituer un modèle pour toute la France[59] ». À l'opposée, selon le philosophe Henri Pena-Ruiz : « La logique concordataire, qui reproduit toutes les ambiguïtés de la posture gallicane, est aux antipodes de la laïcité[60]. » Pour Alain Bauer, alors grand maître du Grand Orient de France, il faut appliquer la loi de 1905 partout en France ; par conséquent, « l’Alsace-Moselle devrait rentrer dans le régime général des cultes[61] ».

Autres territoires

Trois autres territoires français ont un régime dérogatoire.

Les îles de Wallis-et-Futuna sont soumises au régime ancien ; l’Église catholique y est officiellement chargée de l’enseignement.

À Mayotte, dans les Comores, à population majoritairement musulmane, la principale autorité religieuse (le mufti) est désignée par le préfet qui nomme aussi des juges (les cadis). Ceux-ci sont chargés d’appliquer le droit musulman en vigueur pour ce qui concerne le statut personnel. Selon les principes de l’« organisation de la justice indigène », la charia (loi islamique) s’applique selon le recueil de jurisprudence (le minhadj) ; même si l’on observe que le droit coutumier local opère un glissement vers le droit commun[62].

En Guyane, le régime des cultes qui remonte à Charles X ne reconnaît que le culte catholique. Les prêtres, et eux seuls, sont financés par le département.

Depuis 1945 : la laïcité constitutionnelle

Après avoir été remise en cause sous le régime de Vichy (qui favorise l’enseignement catholique, reconnaît les congrégations et subventionne l’école privée), la laïcité de l’État est affirmée dans la Constitution de 1946 puis dans celle de 1958. Le corpus législatif poursuit lui aussi la laïcisation de la société, notamment en matière d’éducation, de politique familiale, dans l’équité entre hommes et femmes, etc.

Désormais, le socle républicain de la laïcité se résume à trois termes :

« La liberté de conscience, puisque l’État ne persécute aucun culte, l’égalité en droit de ces cultes, qui oblige à les traiter tous de manière identique, la neutralité enfin, du pouvoir politique, qui s’abstient de toute ingérence dans les affaires spirituelles, comme il entend que les Églises s’abstiennent de revendiquer le pouvoir temporel, notamment dans les choses de l’éducation[63]. »

L’article premier de la Constitution de 1958

Article détaillé : Constitution française de 1958.
Constitution française avec le sceau de la République Française.

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Depuis la loi constitutionnelle du 4 août 1995[64], la laïcité ne relève plus de l’article 2 de la Constitution, mais de l’article premier, ce qui est loin d’être sans conséquences.

« Article premier — La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. »

De ce fait, l’architecture de la Constitution et sa lecture s’en trouvent modifiées. Selon Geneviève Koubi :

« L’article premier n’est pas situé dans un titre particulier, il précède le titre premier — De la Souveraineté. Il supervise la lecture du texte constitutionnel. En conséquence, toutes les institutions de la République doivent répondre aux caractères d’un État laïque, à commencer par le président de la République, puisqu’il assure par son arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics[65]. »

La République française est laïque, les épithètes « indivisibles, démocratique et sociale » présentées dans l’article premier ne suscitent de débats que dans le cadre de leur application : la concrétisation du texte de normes qu’est la Constitution engage alors la discussion sur la portée de l’adjectif laïque, qui a souvent été le point d’appui de débats de société. Il fait l’objet de nombreuses interprétations, et certains auteurs pensent que ce qualificatif n’indiquerait qu’une continuité historique formelle de la République, sans en être un attribut[65]. D’autres, comme Louis de Naurois, ancien professeur à l’Institut catholique de Toulouse, estiment que la laïcité est formée de deux idées simples : le pouvoir politique est sécularisé et l’activité religieuse est renvoyée à la sphère privée[66].

Pour le Conseil constitutionnel, l’article 1er de la Constitution contient le « principe d’unicité » du peuple français ; ses principes « s’opposent à ce que soient reconnus des droits collectifs à quelque groupe que ce soit, défini par une communauté d’origine, de culture, de langue ou de croyance[67] ».

On peut procéder à une interprétation combinée des articles premier et 89 de la Constitution permettant de voir dans la laïcité un élément consubstantiel à « la forme républicaine du gouvernement [qui] ne peut faire l’objet d’une révision ». Cette formule a d’ailleurs été empruntée à la Troisième République[n 8]. La formulation de la Constitution de 1958 est radicale, d’autant que le Conseil constitutionnel a assigné des limites au pouvoir constituant. Dès lors, vouloir modifier son caractère laïc reviendrait à modifier la substance même de la République.

De surcroît, l’activité de production normative et les procédures de contrôle sont soumises à la compréhension du principe de laïcité, source d’une règle de droit constitutionnel. La laïcité est donc un attribut du droit et de la République, ce qui les rend indissociables l’une de l’autre. Pour Robert Badinter, « la République est laïque, ce qui veut dire que la laïcité est républicaine ».

Les applications contemporaines de la laïcité en France se trouvent dans Laïcité en France.

Annexes

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Bibliographie

Ouvrages généraux

Ouvrages spécialisés

Articles et documents

Notes

  1. Un principe est une vérité générale et fondamentale sur laquelle d’autres reposent ou dont elles sont dérivées. À la différence d’une loi qui est précise et provisoire, un principe a une portée plus large, voire intemporelle.
  2. « Je jure et promets à Dieu, sur les Saints Évangiles, de garder obéissance et fidélité au gouvernement établi par la Constitution de la République française. Je promets aussi de n’avoir aucune intelligence, de n’assister à aucun conseil, de n’entretenir aucune ligue, soit au dedans, soit au dehors, qui soit contraire à la tranquillité publique ; et si, dans mon diocèse ou ailleurs, j’apprends qu’il se trame quelque chose au préjudice de l’État, je le ferai savoir au gouvernement. »
  3. « Seigneur, protégez la République ; Seigneur, protégez les Consuls. »
  4. « La très noble nation française »
  5. « Au milieu de tant de sollicitudes »
  6. « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi. »
  7. « Une très grave obligation de notre charge »
  8. En effet, l’article 2 de la loi du 14 août 1884 portant révision partielle des lois constitutionnelles, avait ajouté à l’article 8 de la loi du 25 février 1875 relative à l’organisation des pouvoirs publics cette mention : « La forme républicaine du gouvernement ne peut faire l’objet d’une proposition de révision ». On peut noter par ailleurs que la Constitution du 27 octobre 1946 confirmait déjà l’idéologie républicaine du système politique français, puisque son article 95 reprenait mot pour mot les dispositions de l’article 8 modifié de la loi du 25 février 1875.

Références

  1. Collectif, sous la direction de Jacques Myard, La Laïcité au cœur de la République, L’Harmattan, 2003 (ISBN 2-7475-5716-2), p. 26.
    « La laïcité était une invention chrétienne, la distinction du temporel et du spirituel, de la politique et de la religion naît dans le judaïsme à l’époque évangélique. »
     
  2. Collectif, sous la direction de Jacques Myard, La Laïcité au cœur de la République, L’Harmattan, 2003 (ISBN 2-7475-5716-2), p. 15-17 
  3. Collectif, sous la direction de Jacques Myard, La Laïcité au cœur de la République, L’Harmattan, 2003 (ISBN 2-7475-5716-2), p. 21 
  4. Henri Pena-Ruiz, Dieu et Marianne, philosophie de la laïcité, PUF, coll. « Fondements de la politique », 2005, 386 p. (ISBN 978-2-13-054857-7), p. 169-172 
  5. Henri Pena-Ruiz, Histoire de la laïcité, genèse d’un idéal, Gallimard, coll. « Découvertes / Culture et société », 2005, 144 p. (ISBN 2070300382), p. 44 
  6. Collectif, sous la direction de Jacques Myard, La Laïcité au cœur de la République, L’Harmattan, 2003 (ISBN 2-7475-5716-2), p. 29 
  7. Georges Weill (préf. Jean-Michel Ducomte), Histoire de l’idée laïque en France au xixe siècle, Paris, Hachette, coll. « Littératures / Pluriel, Histoire », 1929 (réimpr. 2004), 412 p. (ISBN 978-2012792203) [présentation en ligne] 
  8. Alain Gresh, « Aux origines de la laïcité » sur Le Monde diplomatique, décembre 2004
  9. Bertand Badie, « La pensée politique vers la fin du XVIe siècle : héritages antique et médiéval », in Nouvelle histoire des idées politiques, dir. Pascal Ory, Hachette Pluriel, 1987, pp. 16-17.
  10. Adrien Baillet, « Histoire des démeslez du pape Boniface VIII. avec Philippe le Bel roy de France » sur Google, recherche de livres, François Barois, 1718
  11. Dale K. Van Kley, Les origines religieuses de la Révolution française, Points-Seuil, 2002, pp. 62-67.
  12. Pierre Joxe, L’Édit de Nantes, une histoire pour aujourd’hui, Hachette, coll. « Littératures », 1998 
  13. Henri Pena-Ruiz, Qu’est-ce que la laïcité ?, Gallimard, coll. « Folio / Actuel inédit », 2003, 347 p. (ISBN 2-07-030382-9), « La laïcité aujourd’hui », p. 138-139 
  14. Dominique Borne, Jean-Paul Delahaye, « État, laïcité, religions », dans Regards sur l'actualité, no 298, février 2004, p. 29 
  15. Henri Pena-Ruiz, Histoire de la laïcité, genèse d’un idéal, Gallimard, coll. « Découvertes / Histoire », 2005, 143 p. (ISBN 2-07-030038-2), « L’émancipation laïque, un processus tourmenté », p. 47 
  16. Sur Google.books
  17. Édit de Versailles (7 novembre 1787)
  18. Les représentants du peuple français, constitués en Assemblée nationale, « Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 » sur Assemblée nationale, août 1789
  19. Jean Baubérot, Histoire de la laïcité française, p. 11.
  20. Jean Baubérot, Histoire de la laïcité française, p. 12 ; Rodney Dean, L'Église constitutionnelle, Napoléon Ier et le Concordat.
  21. Jean Baubérot, Histoire de la laïcité française, p. 13.
  22. Pie VI, Écrits sur la Révolution française (1775 - 1798), Expéditions pamphiliennes (ISBN 2351150066) 
  23. Nicolas de Condorcet, « Rapport et projet de décret relatifs à l’organisation générale de l’instruction publique » sur Assemblée nationale, 21 avril 1792
  24. Le bicentenaire du mariage civil Population & Sociétés, INED, n° 271, septembre 1992
  25. Jean-Marie Mayeur, La question laïque, Fayard, 1997, p. 14
  26. François-Antoine de Boissy d’Anglas, « Discours à la Convention nationale sur la liberté des cultes » sur Assemblée nationale, 21 février 1795
  27. Assemblée nationale française, « La séparation des Églises et de l’État — Quelques repères chronologiques » sur Assemblée nationale, 2005
  28. Le gouvernement français et le pape Pie VII, « Le concordat de 1801 » sur Revue de droit canonique de l’Institut de droit canonique de Strasbourg, 15 juillet 1801
  29. Rodney J. Dean, L’Église constitutionnelle, Napoléon et le concordat de 1801, Paris, Éditions Picard, avril 2004, 740 p. (ISBN 2-7084-0719-8), p. 460-461 
  30. Emmanuel de Waresquiel, Benoît Yvert, Histoire de la Restauration (1814-1830) : naissance de la France moderne, Perrin, 2002, p. 224-225.
  31. Emmanuel de Waresquiel, Benoît Yvert, Histoire de la Restauration (1814-1830) : naissance de la France moderne, Perrin, 2002, p. 377-379.
  32. Jérôme Grondeux, « Débats et enjeux de la Restauration au Second Empire » dans La laïcité : des débats, une histoire, un avenir (1789 - 2005), colloque tenu au Sénat le 4 février 2005.
  33. Liberté, laïcité: la guerre des deux France et le principe de la modernité, Emile Poulat, 1988
  34. Le Monde des Religions n°35, 1er mai 2009[1]
  35. Pie IX, « Quanta Cura — Lettre encyclique condamnant l’évolution du monde moderne » sur Editions Anovi, 8 décembre 1864
  36. Grégoire XVI, « Mirari Vos — Lettre encyclique sur le libéralisme et les maux de l’Église » sur Centre français pour la justice et les droits fondamentaux de la personne humaine, 15 août 1832
  37. Léon XIII, « Diuturnum — Lettre encyclique sur l’origine du pouvoir civil » sur Les Bons Textes, 29 juin 1881
  38. Léon XIII, « France, fille aînée de l’Église — Appels des papes — Nobilissima Gallorum Gens » sur Spiritualité chrétienne, 8 février 1884
  39. Jules Ferry, « Loi n° 11,696 qui rend l’enseignement primaire obligatoire » sur Assemblée nationale, 28 Mars 1882
  40. Jules Ferry, « Lettre adressée aux instituteurs » sur La Vie publique, 17 novembre 1883
  41. Paul Bert, « Loi relative à l’établissement des écoles normales primaires » sur Sénat, 1er août 1879. « La nécessité de répandre largement l’instruction, d’en relever le niveau, est maintenant universellement reconnue ; elle s’impose au législateur. Depuis 1871 surtout, un élan unanime pousse les jeunes enfants aux écoles qui s’ouvrent chaque jour plus nombreuses. Malgré ce qui a été fait, il reste encore beaucoup à faire, surtout pour l’instruction des jeunes filles. Le nombre des institutrices est insuffisant, leur recrutement difficile. »
  42. Paul Bert, « Le Principe de laïcité appliqué à l’enseignement primaire obligatoire » sur Assemblée nationale, 4 décembre 1880
  43. Ferdinand Buisson, « Nouveau dictionnaire de pédagogie » sur Institut national de recherche pédagogique, 1911
  44. Ferdinand Buisson, « Nouveau Dictionnaire de pédagogie — Définition de « Laïcité » » sur Institut national de recherche pédagogique, 1911
  45. Parlement français, « Loi n°1886-10-30 portant sur l’organisation de l’enseignement primaire » sur Légifrance, 30 octobre 1886
  46. Jean-Baptiste Ferrouillat, « Loi du 30 octobre 1886 sur l’organisation de l’enseignement primaire » sur Sénat, 7 mai 1886
  47. Assemblée nationale, « Loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association — Naissance d’un grand texte » sur Assemblée nationale, 2001
  48. Collectif, sous la direction de Patrick Cabanel et Jean-Dominique Durand, Le Grand Exil des congrégations religieuses françaises (1901-1914), Cerf, coll. « Histoire », 2005, 490 p. (ISBN 2-204-07469-1) [lire en ligne] [présentation en ligne], « La législation anticongréganiste », p. 59-87 
  49. Jean Baubérot, « La laicite entre pacte laique et lutte anticongreganiste », dans Histoire, 2005, p. 415-426 (ISSN 0769-2633) 
  50. Jean-Pierre Machelon, 1901, les congrégations hors la loi ?, Letouzey et Ané, 2002 
  51. Élie Barnavi, « Une nouvelle laïcité — D’accord, mais sans toucher à la loi de 1905 » sur Causeur, 27 décembre 2007. « Aussi bien, il n’y aurait aucun mal à reconnaître les « racines chrétiennes » de la France et de l’Europe. Convaincu qu’on ne saurait bâtir l’avenir si l’on tourne le dos à son passé, avec ce qu’il a de grand et de mesquin, de généreux et de meurtrier, j’avais moi-même pris position pour la mention de ces fameuses racines dans le préambule du Traité constitutionnel. Je pense aussi que les cultes ont parfaitement le droit de se faire entendre dans l’agora — le moindre club de pétanque l’aurait, mais pas l’Église catholique ? »
  52. Pie X, « Vehementer Nos — Lettre encyclique au peuple français » sur Vatican, 11 février 1906
  53. Jean-Pierre Chantin et Daniel Moulinet, La Séparation de 1905 — Les Hommes et les lieux, Paris, Éditions de l’Atelier, coll. « Patrimoine », 2005, 272 p. (ISBN 2708237861) [présentation en ligne] 
  54. Jean Jacques, « Le Journal de Mantes — Associations cultuelles » sur Strabon — Académie de Versailles, 13 décembre 1905. « Le curé, agent naturel de cette caste s’insinue partout : au catéchisme, il pétrit le cerveau de l’enfant ! Au confessionnal, il régente la femme, il intéresse l’homme aux conférences d’hiver et à l’heure dernière, il accapare la conscience du vieillard... Puissance colossale hier, effrayante demain. »
  55. Thierry Teyssot, « La loi de 1905 » sur L’Église gallicane, 1997
  56. Parlement français, « Code général des collectivités territoriales — Article L2543-3 » sur Légifrance, 30 mai 1908
  57. La Documentation française, « État, laïcité, religions — Le Régime concordataire d’Alsace-Moselle : exception à la laïcité française » sur La Documentation française, février 2004
  58. Pierre Gauvrit — Clubs UNESCO, « Le combat pour la laïcité » sur Clubs Unesco
  59. Yamina Benguigui et Henri Pena-Ruiz, « L’exigence laïque du respect mutuel » sur Le Monde diplomatique, janvier 2002
  60. Histoire de la laïcité, genèse d’un idéal, Gallimard, coll. « Découvertes / Culture et société », 2005, 144 p. (ISBN 2070300382), « Témoignages et documents », p. 106 
  61. Alain Bauer, Jean-Arnold de Clermont et Guy Coq, « La Laïcité, condition du vivre ensemble » sur Protestants, mai 2003
  62. Marie Sawiat, « L’Islam à Mayotte » sur Radio France outremer/, 18 février 2005. « L’application du droit local aux côtés du droit républicain avait toujours nécessité des aménagements entre les valeurs coutumières et celles de la République française. Aujourd’hui Mayotte assiste socialement à un glissement du droit local vers le droit commun, ce qui bouleverse, entre autres, les habitudes structurelles de l’organisation de l’homme et de la femme dans la société. »
  63. Christian Poncelet, « La Laïcité : des débats, une histoire, un avenir (1789 - 2005) » sur Sénat, 4 février 2005
  64. Loi constitutionnelle nº 95-880 sur Légifrance, 4 août 1995. « Art. 8. - I. - L’article 1er de la Constitution est abrogé. — II. - Le premier alinéa de l’article 2 de la Constitution est placé avant le titre Ier et devient l’article 1er. »
  65. a et b Geneviève Koubi, « La Laïcité dans le texte de la Constitution », dans Revue de droit public et de la science politique en France et à l’étranger, no 5, 1997, p. 1311 
  66. Louis de Naurois, « Laïcité », dans L’Année canonique, vol. XXVI, 1982, p. 247 
  67. Conseil constitutionnel, « Décision nº 99-412 DC » sur Conseil constitutionnel, 15 juin 1999


Voir aussi

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