Ier concile oecumenique du Vatican

Ier concile oecumenique du Vatican

Ier concile œcuménique du Vatican

Le 1er concile œcuménique du Vatican se tient du 8 décembre 1869 au 20 octobre 1870. Convoqué par Pie IX, il définit notamment l'infaillibilité pontificale. Il est interrompu quand les troupes italiennes envahissent Rome. Suspendu sine die, il n'est jamais repris.

Sommaire

Contexte

Contexte historique

Ce concile s'inscrit dans un contexte géo-politique très troublé, marqué sur le plan italien par le Risorgimento ainsi que l'un de ses corolaires, la question romaine, et sur le plan international par la Guerre franco-allemande de 1870.

Le concile prend place alors que, depuis 1861, le pape a perdu son pouvoir temporel sur les états pontificaux, à l'exception de la ville de Rome, et que Rome est elle-même sous la protection des troupes françaises de Napoléon III.

Contexte ecclésiastique

Pie IX évoque en privé, pour la première fois, la tenue d'un nouveau concile œcuménique le 6 décembre 1864, lors d'une session de la Sacrée congrégation des rites. Le précédent concile, celui de Trente, s'était clos trois siècles auparavant. Au cours de l'année 1865, le pape mène des consultations auprès de prélats de rite latin sur des questions de discipline.

Le 28 juin 1867, à l'occasion de la fête des saints Pierre et Paul, il proclame publiquement son intention de convoquer un concile. Il remet aux évêques présents un questionnaire sur l'état de l'Église.

Le 28 juin 1868, la bulle d'indiction Æterni Patris convoque les évêques catholiques pour un concile devant se tenir à Rome dès le 8 décembre 1869. La bulle trace le programme de la future assemblée : défense de la foi contre les erreurs du temps, précédemment condamnées par le Syllabus ; mise à jour des canons du concile de Trente. Une invitation est envoyée à un grand nombre de prélats, et même à des dignitaires orthodoxes.

Le concile est ouvert le 8 décembre 1869. Sur les mille évêques invités, les 3/4 sont présents. Tout de suite une majorité infaillibiliste et une minorité s'opposent, comportant toutes deux d'importants prélats. La majorité comprend notamment le cardinal Bilio, et divers évêques dont Mgr Dechamps (Maline), Mgr Manning (Westminster), Mgr Pie (Poitiers) et la plupart des évêques italiens, très nombreux (35 % des Pères). La minorité comprend notamment les cardinaux Rauscher (Vienne), Mathieu (Besançon), Schwarzenberg (Prague) et divers évêques dont Mgr Simor (primat de Hongrie), Mgr Ketteler (Mayence), Mgr Dupanloup (Orléans), Mgr Darboy (Paris), et beaucoup d'autres évêques allemands et français [1].

Suspension des travaux

Après plusieurs sessions, des travaux difficiles et des débats complexes, seules deux constitutions dogmatiques ont finalement pu être votées et ratifiées quand, le 20 septembre 1870, les troupes italiennes pénètrent dans Rome.

Le 9 octobre, ce qu'il reste des États pontificaux est réunis au reste de l'Italie par plébiscite. Le concile est matériellement empêché de se poursuivre. Le 20 octobre, Pie IX le suspend sine die.

Les deux constitutions dogmatiques

La première constitution dogmatique du Concile Vatican I, Dei Filius, est votée à l'unanimité par les Pères conciliaires et ratifiée aussitôt par le pape le 24 avril 1870.

La deuxième constitution dogmatique Pastor Æternus concerne quant à elle l'infaillibilité pontificale et la primauté du pape.

L'infaillibilité

Une partie de la presse romaine et parisienne, inspirée par l'ultramontanisme, avait développé l'idée que le but principal du concile serait de définir le dogme de l'infaillibilité pontificale.

Le pape de l'époque, Pie IX, avait publié en 1864 le Syllabus, texte officiel dans lequel il condamnait entre autres les idées modernes et la « liberté de conscience ». Pie IX revendiquait aussi dans le Syllabus la suprématie du fait religieux sur l'ordre temporel.

Dix ans auparavant, le 8 décembre 1854, Pie IX avait défini ex cathedra le dogme de l'Immaculée Conception de la Vierge Marie, sans réunir un concile comme il est d'ordinaire pour les questions concernant les dogmes.

En janvier 1870, une pétition de certains évêques demande qu'on mette à l'ordre du jour du concile la question de infaillibilité pontificale : elle recueille la signature de plus de 400 des quelque 700 évêques présents. Peu après, 136 évêques signent une pétition en sens contraire [2]. Les évêques et les cardinaux de la minorité étaient soutenus par plusieurs personnalités connues en Europe, comme l'évêque d'Orléans, Mgr Dupanloup, l'historien allemand Ignaz von Döllinger, l'évêque de Mayence, Wilhelm Emmanuel von Ketteler. Entre les deux partis les débats furent tumultueux. On évoqua en particulier quelques cas supposés d'erreurs doctrinales commises par des papes : Honorius Ier, condamné par le IIIe concile de Constantinople (680681), Libère, Vigile, Jean XXII. Les débats historiques font alors appel à d'autres travaux érudits, tels ceux de saint Alphonse de Liguori, ou ceux, plus contemporains de Rohrbacher (1789-1856) dans sa monumentale histoire de l'Église, ou encore ceux de Dom Guéranger (1805-1875), le restaurateur de l'Abbaye bénédictine de Solesmes, pour contrer les accusations portées contre certains papes évoqués ci-dessus.

Après de longs débats théologiques, le 13 juillet 1870, c'est encore un quart de l'assemblée qui exprime son désaccord. Les tractations reprennent, des précisions sont apportées, mais sans rallier pourtant l'ensemble de la minorité : 55 évêques de la minorité décident alors de s'abstenir et de quitter Rome plutôt que de voter non. Le 18 juillet 1870, le concile, par les voix de 533 des 535 Pères présents, affirme la primauté universelle du pape comme de droit divin et définit que l'infaillibilité pontificale est une vérité de foi divinement révélée[3]. Cette infaillibilité est strictement et précisément délimitée : elle concerne le cas où le pape, en vertu de sa charge et en matière de foi ou de morale, prononce solennellement et ex cathedra qu'« une doctrine doit être tenue par toute l'Eglise »[4]. Les deux Pères qui avaient voté non et ceux qui s'étaient abstenus se rallient alors, après la ratification par le pape du vote du concile[5]. Le monde catholique suivit dans son ensemble, à l'exception de quelques-uns dont le plus fameux fut l'historien et théologien Ignaz von Döllinger.

Voir aussi

Notes et références

  1. Cf. Jean-Yves Lacoste (dir), Dictionnaire critique de théologie, 1998, PUF, article « Vatican I », par Claude Bressolette.
  2. Cf. H. Rondet, Vatican I, le concile de Pie IX. La préparation, les méthodes de travail, les schémas restés en suspens, Lethielleux, Paris, 1962, p. 122.
  3. Cf. constitution dogmatique Pastor Æternus.
  4. Depuis le concile Vatican I, la seule occasion où le pape s'est prononcé par une telle définition ex cathedra fut la proclamation du dogme de l'assomption de la Vierge Marie par le pape Pie XII, en 1950. Cf. Munificentissimus Deus, constitution apostolique définissant le dogme de l'assomption.
  5. Cf. Jean-Yves Lacoste (dir), Dictionnaire critique de théologie, 1998, PUF, article « Vatican I », par Claude Bressolette.

Articles connexes

Bibliographie

  • Cl. Bressolette, « Vatican I », in Dictionnaire critique de théologie, Jean-Yves Lacoste (dir), 1998, PUF, pp. 1200-1202 ;
  • Y. Congar, L'Église. De saint Augustin à l'époque moderne, Paris, Cerf, 1997, notamment pp. 440-450 ;
  • Ch. Theobald, « La constitution dogmatique Dei Filius du concile de Vatican I » in Histoire des dogmes, T. 4, B. Sesboüé (dir), Cerf, 1996, pp. 259-313 ;
  • Ch. Theobald, « Première constitution dogmatique sur l'Eglise du Christ : Pastor Aeternus du concile de Vatican I » in Histoire des dogmes, T. 4, B. Sesboüé (dir), Cerf, 1996, pp. 315-344 ;
  • K. Schatz, La primauté du pape. Son histoire, des origines à nos jours, Cerf, 1992, notamment les pp. 225-242 ;
  • G. Thils, Primauté et infaillibilité du Pontife romain à Vatican I et autres études d'ecclésiologie, Presses de l'Université de Louvain, Louvain, 1989 ;
  • J. Gadille, « Vatican I, concile incomplet ? », Le Deuxième concile du Vatican, Actes du colloque de l'École française de Rome, Rome, 1989, 33–45 ;
  • G. Thils, La Primauté pontificale. La doctrine de Vatican I, les voies d'une révision, Duculot, Gembloux, 1972 ;
  • V. Conzemius, « Pourquoi l'autorité pontificale a-t-elle été définie précisément en 1870 ? », Concilium, n° 64, 1971 ;
  • J. Gadille, Albert du Boys. Ses « Souvenirs du Concile du Vatican », Nauwelaerts, Louvain, 1969 ;
  • G. Thils, L'Infaillibilité pontificale, Gembloux, 1969 ;
  • R. Aubert, « La Composition des commissions préparatoires du Ier Concile du Vatican », in Reformata reformanda, t. II, Münster, 1965 ;
  • R. Aubert, Vatican I, L'Orante, Paris, 1964 (avec bibliographie) ;
  • H. Rondet, Vatican I, le concile de Pie IX. La préparation, les méthodes de travail, les schémas restés en suspens, Lethielleux, Paris, 1961 ;
  • R. Aubert, Le problème de l'acte de foi, Louvain, 1952 ;
  • E. Cecconi, Histoire du concile du Vatican, Librairie Victor Lecoffre, 1887. Disponible en PDF sur ce site.
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