Iliade

Iliade
Iliade
Achille sacrifiant à Zeus, manuscrit de l’Iliade de la Bibliothèque Ambrosienne de Milan (Ve siècle)
Achille sacrifiant à Zeus, manuscrit de l’Iliade de la Bibliothèque Ambrosienne de Milan (Ve siècle)

Auteur Homère
Genre épopée
Version originale
Titre original Ἰλιάς
Langue originale grec homérique
Pays d'origine Grèce archaïque
Lieu de parution original Grèce
Date de parution originale entre -850 et -750
Version française
Chronologie
Odyssée
Page de garde de l'édition Rihel datant de 1572.

L’Iliade (en grec ancien Ἰλιάς / Iliás, en grec moderne Ιλιάδα / Iliáda) est une épopée de la Grèce antique attribuée à l'aède Homère. Ce nom provient de la périphrase « le poème d'Ilion » (ἡ Ἰλιὰς ποίησις), Ilion (Ἴλιον / Ilion) étant l'autre nom de la ville de Troie.

L’Iliade est composée de quinze mille trois cent trente-sept hexamètres dactyliques et, depuis l'époque hellénistique, divisée en vingt-quatre chants.

Le texte a probablement été rédigé entre 850 et 750 av. J.-C. (dates déjà mentionnées par Hérodote), soit quatre siècles après la période à laquelle les historiens font correspondre la guerre mythique qu’il relate.

Le thème de l'épopée est la guerre de Troie dans laquelle s'affrontent les Achéens venus de toute la Grèce et les Troyens et leurs alliés, chaque camp étant soutenu par diverses divinités comme Athéna, Poséidon ou Apollon. Après un siège de dix ans, le sort des armes hésite encore dans de multiples combats collectifs ou individuels où s'illustrent des figures comme Ajax, Hector ou Patrocle. Finalement les Achéens l'emportent grâce à la victoire d'Achille qui tue le chef troyen en combat singulier.

Sommaire

Argument

L’Iliade

Μῆνιν ἄειδε, θεὰ, Πηληιάδεω Ἀχιλῆος
οὐλομένην, ἣ μυρί’ Ἀχαιοῖς ἄλγε’ ἔθηκε,
πολλὰς δ’ ἰφθίμους ψυχὰς Ἄϊδι προῒαψεν
ἡρώων, αὐτοὺς δὲ ἑλώρια τεῦχε κύνεσσιν
οἰωνοῖσί τε πᾶσι· Διὸς δ’ ἐτελείετο βουλή·

« Chante, ô déesse, le courroux du Péléide Achille,
Courroux fatal qui causa mille maux aux Achéens
Et fit descendre chez Hadès tant d'âmes valeureuses
De héros, dont les corps servirent de pâture aux chiens
Et aux oiseaux sans nombre : ainsi Zeus l’avait-il voulu [1]. »

« Déesse chante-nous la colère d'Achille, de ce fils de Pélée,
colère détestable qui valut aux Argiens d'innombrables malheurs,
et jeta dans l'Hadès tant d'âmes de héros,
livrant leurs corps en proie aux oiseaux comme aux chiens :
ainsi s'accomplissait la volonté de Zeus [2]. »

Le premier terme, μῆνις / mễnis, qui veut dire « colère », est toujours employé pour qualifier une colère divine, funeste. Achille est le seul mortel dont la colère soit appelée μῆνις dans tout le corpus homérique. C’est bien cette colère inhumaine qui est le thème-clef de l’épopée.

Le récit commencé dans l’Iliade se poursuit dans l’Odyssée et, d’un autre point de vue, dans l’Énéide de Virgile.

Résumé

Article détaillé : Guerre de Troie.

La guerre de Troie dure depuis bientôt dix ans. Elle oppose les Achéens venus de toute la Grèce, aux Troyens et leurs alliés. Face à la cité fortifiée, les centaines de navires des assiégeants reposent sur la plage et leur servent de campement. L’Iliade relate, dans l'ordre chronologique, six journées et nuits de la guerre ; le chant XXIV se déroule douze jours après les événements du chant XXIII[3].

Premier jour : la querelle

Chant I : la peste et la querelle

Chrysès offrant à Agamemnon une rançon pour Chryséis, cratère apulien à figures rouges du Peintre d'Athènes 1714, v. 360350 av. J.-C., musée du Louvre

Agamemnon, le chef des Achéens, retient prisonnière Chryséis, fille d'un prêtre troyen d'Apollon et le dieu a envoyé une peste meurtrière sur l'armée. Le devin Calchas révélant la cause du mal, Achille adjure Agamemnon de rendre la prisonnière. Le roi finit par y consentir, mais décide de prendre en dédommagement Briséis, une belle Troyenne captive d'Achille. Furieux et se sentant spolié, ce dernier décide de cesser de combattre avec ses Myrmidons aux côtés des Achéens. Il invoque sa mère, la Néréide Thétis, qui obtient de Zeus la promesse d'une victoire troyenne.

Deuxième jour : trêve et bataille

Chant II : le rêve trompeur et le catalogue des vaisseaux

Trompé dans son sommeil par un songe envoyé par Zeus, Agamemnon s'éveille certain de la victoire de ses troupes. À l'agora, il raconte son rêve à ses alliés, puis pour les mettre à l'épreuve, feint de vouloir quitter le siège de Troie. Les guerriers préparent leur retrait, mais Ulysse, roi d'Ithaque, parvient à les dissuader de partir. Les deux armées s'apprêtent à combattre : les Achéens venus de toute la Grèce sur un grand nombre de vaisseaux feront face aux troupes des chefs troyens et de leurs alliés dardaniens, lyciens, phrygiens et thraces.

Chant III : début de la trêve et combat singulier entre Pâris et Ménélas

Hélène et Pâris, détail d'un cratère en cloche apulien à figures rouges, vers 380-370 av. J.-C., musée du Louvre

Le troyen Pâris, fils du roi Priam, est saisi d'effroi à la vue de Ménélas, dont il a enlevé l'épouse, Hélène, causant par là-même le conflit. Suite aux durs reproches de son frère, le vaillant Hector, Pâris propose aux Achéens un combat singulier l'opposant à Ménélas, afin d'éviter une hécatombe à son peuple. Tandis que, du haut des remparts de Troie, Hélène énonce les chefs grecs à Priam, le pacte est conclu. Le duel s'engage, tournant rapidement à l'avantage de Ménélas, combattant expérimenté, au détriment du frêle et jeune Pâris. Mais celui-ci est sauvé d'une mort certaine par l'intervention divine d'Aphrodite, qui le soustrait au combat et le dépose dans Troie.

Chant IV : la rupture de la trêve

Sur l’Olympe, Zeus souhaite faire reconnaître la victoire de Ménélas, afin qu'une paix soit conclue, épargnant ainsi la ville. Mais Héra, qui souhaite ardemment la victoire des Achéens, demande à Athéna de pousser les Troyens à violer leurs serments de paix. Athéna convainc alors Pandare de décocher une flèche à Ménélas afin de briser la trève, ce qui survient effectivement.

Pendant la revue de ses troupes, Agamemnon exhorte au combat les plus grands de ses chefs — Idoménée, les deux Ajax (Ajax fils de Télamon et Ajax fils d'Oïlée), Nestor, Ulysse et Diomède — et les combats reprennent.

Chant V : l'aristie de Diomède

Dans la furie de la bataille, les Achéens galvanisés massacrent un grand nombre de Troyens. Diomède s'illustre en particulier, soutenu par Athéna, au cours d'une aristie, en tuant, entre autres, Pandare, et en blessant Énée et sa mère, la déesse Aphrodite, venue le secourir. Les Dieux s'impliquent dans la bataille : Apollon sauve Énée et exhorte son frère Arès à s'engager aux côtés des Troyens. Ces derniers se ressaisissent et Hector, enflammé par les paroles de Sarpédon, mène ses troupes au combat. Inquiètes de ce retournement de situation, Héra et Athéna s'arment et apportent leur concours aux Achéens défaits par Arès, qui est à son tour blessé par Diomède. Enfin, dieux et déesses remontent à l'Olympe porter leur discorde devant Zeus.

Chant VI : bataille et arrivée d'Hector

Astyanax, sur les genoux d'Andromaque, essaie d'attraper le casque de son père Hector, cratère à colonne apulien à figures rouges, v. 370-360 av. J.-C., Musée national du palais Jatta à Ruvo di Puglia (Bari)

Le combat continue de faire rage, les meilleurs guerriers des deux camps s'affrontant mortellement. Cependant, après avoir évoqué les liens d'hospitalité qui unissaient naguère leurs ancêtres, Diomède et Glaucos le Lycien cessent leur duel. Hector se retire du combat et regagne la ville où il demande à Hécube, sa mère, de prier Athéna pour la victoire des Troyens. Les femmes rejoignent le temple de la déesse. Près des portes Scées, Hector fait ses adieux à son épouse, Andromaque, et à son tout jeune fils Astyanax. Il retrouve ensuite son frère Pâris et le convainc de rejoindre la bataille avec lui.

Chant VII : duel entre Hector et Ajax

Guidé par les plans d'Apollon et d'Athéna, Hector provoque les chefs grecs en duel. C'est Ajax, le fils de Télamon qui est tiré au sort pour l'affronter. À la faveur de la nuit, le duel doit cesser sans qu'un vainqueur ne puisse être désigné, bien qu'Hector soit blessé. Les deux hommes, en signe d'estime et de respect, s'offrent de nombreux présents. Une trêve temporaire est décidée par les deux camps. Elle est mise à profit pour honorer les nombreux morts qui jonchent le champ de bataille. Les Achéens décident et mettent en œuvre la construction d'un fossé et de solides remparts devant leurs navires déposés sur la plage.

Troisième jour : l'ambassade à Achille et la Dolonie

Chant VIII : nouvelle bataille et succès troyens

Au petit jour, Zeus exige des dieux qu'ils restent neutres. Depuis les sommets du mont Ida surplombant le champ de bataille, il pèse sur sa balance d'or les destinées des deux armées. Celle-ci penche en faveur des Troyens et de fait, dès la reprise des combats, ils prennent l'avantage grâce à la fougue d'Hector, qui pousse ses troupes vers le rivage et les remparts des Achéens. Athéna et Héra ne peuvent rester sans agir face au repli des Grecs. Elles désobéissent à Zeus en secourant ces derniers, mais sont rapidement et vertement rappelées à l'ordre. Quand la nuit tombe, pour ne pas perdre leur avantage, cinquante mille Troyens campent dans la plaine.

Chant IX : l'ambassade auprès d'Achille

Dans le campement achéen, l'inquiétude est grande. Agamemnon évoque la possibilité d'abandonner le siège et rejoindre la Grèce, ce à quoi Ulysse et Nestor sont farouchement opposés. La solution serait de ramener Achille à la raison et de le convaincre de se joindre au combat. Agamemnon est prêt à s'excuser, à rendre Briséis et à couvrir Achille de présents. Il lui envoie Ulysse, Ajax et Phénix en ambassade afin de le convaincre. Achille reçoit dignement et écoute ses compagnons mais reste inflexible : il a l'intention de regagner sa patrie dès le lendemain, et propose à Phénix de se joindre à lui. Ulysse et Ajax s'en retournent annoncer la mauvaise nouvelle à Agamemnon.

Chant X : la Dolonie

Dolon vêtu de sa peau de loup, lécythe à figures rouges, v. 460 av. J.-C., musée du Louvre

Afin de connaître les intentions des Troyens, le chef des Achéens, sur les conseils du sage Nestor, décide d'envoyer Diomède et Ulysse espionner leurs ennemis. Dans le camp adverse, Hector envoie Dolon en reconnaissance près du campement des Grecs. Mais Dolon est capturé par les deux espions achéens puis exécuté par Diomède après avoir livré des renseignements stratégiques. Durant le retour de cette expédition, Ulysse et Diomède massacrent les chefs thraces, alliés des Troyens, endormis près du feu et ramènent leurs chevaux auprès des navires. Cet exploit ravive l'espoir d'une victoire prochaine parmi les Achéens. Cet épisode est appelé la « Dolonie » d'après le nom de Dolon.

Quatrième jour : la déroute des Achéens et la mort de Patrocle

Chant XI : nouveaux succès troyens

Au matin, la bataille reprend, et sous la pression des exploits d'Agamemnon, les Troyens reculent jusqu'aux remparts de leur cité. Mais Zeus envoie sa messagère Iris assurer Hector de son soutien et lui indiquer de contre-attaquer dès qu'Agamemnon sera blessé, ce qui finit par survenir. Ulysse, Diomède, Machaon et Eurypyle sont touchés à leur tour et les Grecs se replient vers leurs tentes. Patrocle, le fidèle ami d'Achille, inquiet de voir revenir tant de braves guerriers durement blessés, s'inquiète de la tournure que prennent les évènements. Sur les conseils de son compagnon, il court s'informer auprès du vieux sage Nestor qui lui demande d'aller convaincre Achille de reprendre le combat. Mais Patrocle va porter secours à Eurypyle dans sa tente. Le moral des Achéens est à nouveau au plus bas.

Chant XII : les Troyens assiègent le campement achéen

Ayant poursuivi les fuyards dans la plaine, ce sont désormais les Troyens et leurs alliés qui assiègent leurs ennemis avec une grande force. Sous les violents assauts d'Asios, de Sarpédon et Glaucos, les remparts vacillent, malgré la résistance héroïque des meilleurs combattants achéens. Enfin, Zeus accorde à Hector de franchir le large fossé à la tête de ses troupes et de fracasser les lourdes portes du campement. Les combattants troyens se ruent dans cette brèche. À l'intérieur des remparts, Hector fait rage, selon les desseins de Zeus.

Chant XIII : intervention de Poséidon

Poséidon, plaque corinthienne à figures noires, v. 550-525 av. J.-C., musée du Louvre

Refusant la défaite imminente des Achéens et la mise à sac de leur camp et de leurs navires, Poséidon lui-même s'engage dans la bataille. Ainsi stimulés, Idoménée et Mérion, en furie, massacrent de nombreux Troyens, parmi lesquels Asios et son aurige Alcathoos. Les Troyens Énée, Pâris, Hélénos et Déiphobe s'illustrent également par leur bravoure et leurs ravages.

Malgré ces actes valeureux, les combattants troyens se replient temporairement sous une contre-attaque des grecs. Mais épaulés par Zeus, ils reprennent le dessus et réinvestissent rapidement le campement achéen.

Chant XIV : la ruse d'Héra

La situation est désespérée et Agamemnon propose à nouveau de sonner la retraite, mais Poséidon exhorte les grecs, leur redonnant confiance. Héra, aidée d'Aphrodite, détourne Zeus de la bataille en le séduisant et le laisse endormi sur les cimes du Gargare : c'est la scène de la Dios apatè (la « tromperie de Zeus »). Zeus ainsi neutralisé, Poséidon peut désormais secourir efficacement les Achéens, qui mènent une contre-attaque rageuse et victorieuse, tuant de nombreux Troyens. Hector lui-même est blessé et doit être évacué par ses compagnons auprès du fleuve Scamandre.

Chant XV : bataille près des navires achéens

A son réveil, Zeus, furieux d'avoir été trompé par sa femme Héra, intime à Poséidon l'ordre de se tenir à l'écart de la lutte. Préoccupé par le sort d'Hector, il envoie à son chevet Apollon, qui a tôt fait de le guérir et l'inspirer. Le valeureux Troyen peut alors à nouveau semer la mort et la panique dans les rangs des Grecs. Patrocle, effrayé, quitte son ami Eurypyle pour accourir vers Achille. Malgré une résistance héroïque d'Ajax auprès des navires, les Achéens épuisés cèdent et Hector arrive jusqu'aux nefs pour y mettre le feu.

Chant XVI : exploits et mort de Patrocle

Devant l'urgence de la situation, Achille autorise Patrocle à mener les Myrmidons au combat à condition qu'il se contente de repousser les assaillants sans chercher à prendre la cité de Troie. Ayant revêtu les armes divines qu'Achille lui a prêtées, Patrocle exhorte les Myrmidons. Il parvient à faire reculer les combattants troyens et tue Sarpédon que Zeus ne parvient pas à sauver. Apollon est envoyé pour récupérer son corps sans vie, et pour donner à Hector de l'ardeur au combat. Grisé par ses succès, Patrocle désobéit à Achille et pousse sa contre-attaque jusqu'aux remparts de Troie tuant encore le conducteur du char d'Hector. Il est alors sauvagement tué par le prince troyen.

Chant XVII : bataille autour du corps de Patrocle

S'engage alors une âpre bataille autour du corps de Patrocle : Hector et Énée tentent de s'en emparer ainsi que des chevaux d'Achille. Mais les Achéens, et Ménélas en particulier, défendent héroïquement la dépouille de leur compagnon. Hector parvient cependant à en arracher les armes d'Achille, son casque et son armure. Inspiré par Zeus, il repousse les combattants achéens vers les nefs, qui, soutenus par Mérion et les deux Ajax, finissent par emporter le corps de Patrocle dans leur campement.

Chant XVIII : les armes et le bouclier d'Achille

Thétis donne à son fils Achille ses armes nouvellement forgées par Héphaïstos, détail d'une hydrie attique à figures noires, v. 575-550 av. J.-C., musée du Louvre

C'est à Antiloque que revient la lourde tâche d'informer Achille de la mort de son compagnon. Accablé de douleur, Achille jure de le venger et demande à sa mère Thétis de trouver Héphaïstos pour qu'il lui forge de nouvelles armes. Le dieu se met au travail. Achille quitte sa tente et bondit hors du camp pour crier sa douleur et sa rage, et ses hurlements épouvantent les Troyens. De leur côté, ceux-ci tiennent conseil, et le sage Polydamas prodigue à Hector des conseils de prudence que ce dernier ignore. Son labeur achevé, Héphaïstos remet à Thétis un bouclier magnifiquement orné, une cuirasse, un casque et des cnémides splendides pour Achille.

Cinquième jour : le retour d'Achille au combat et la mort d'Hector

Chant XIX : la réconciliation

Devant l'armée achéenne, Achille se réconcilie avec Agamemnon. En échange de sa bonne volonté, il reçoit comme prévu un grand nombre de présents, dont la belle Briséis, qu'Agamemnon jure n'avoir jamais possédée. En préparation de la bataille à venir, les guerriers se restaurent, mais Achille, voulant se consacrer uniquement à la vengeance de son compagnon, refuse toute nourriture. Équipé de ses nouvelles armes, il souhaite partir au combat sur le champ, malgré les avertissements de son cheval Xanthos qui lui promet une mort prochaine.

Chant XX : retour d'Achille au combat

La discorde règne chez les dieux, que Zeus autorise à intervenir dans la bataille. Chacun choisit son camp et fourbit ses armes. Malgré l'épouvante des Troyens à la vue d'Achille, Enée s'élance vaillamment contre lui, inspiré par Apollon. Loin d'égaler Achille au combat, il est vaincu mais sauvé par Poséidon. Hector et Achille, parvenus à portée de voix, commencent à s'affronter, mais Apollon, inquiet pour la vie d'Hector, fait disparaitre celui-ci du champ de bataille. Furieux, Achille fait un grand massacre parmi les Troyens affolés.

Chant XXI : exploits d'Achille et bataille des dieux

Sous les coups d'Achille, de nombreux combattants de Troie se jettent et périssent dans le fleuve Scamandre, révolté d'être ainsi souillé du sang des guerriers. Aidé du fleuve Simoïs, le Scamandre combat farouchement Achille, manquant de le noyer. Héra envoie alors Héphaïstos, qui parvient à faire reculer le fleuve de son souffle brûlant. Dans la bataille, Apollon dresse Agénor contre Achille, puis finit par prendre sa place et simulant la fuite, autorise ainsi la retraite des Troyens vers leur cité.

Chant XXII : duel d'Achille et d'Hector

Hector, malgré les supplications de ses parents Priam et Hécube, s'est résolu à combattre Achille, et l'attend seul, devant les remparts de Troie. Mais à la vue de son ennemi, il est épouvanté et prend la fuite. Tandis qu'Achille poursuit Hector le temps de faire trois fois le tour de la cité, Zeus pèse sur sa balance d'or les destinées des deux guerriers : Hector est condamné. Athéna, déguisée, ramène Hector à la raison et le convainc d'affronter son destin et Achille. Le combat ne dure guère mais avant de mourir, Hector révèle à Achille qu'il périra sous les coups de son jeune frère Pâris. Le vainqueur se saisit de la dépouille de son ennemi qu'il attache à son char et traîne jusqu'aux vaisseaux grecs sous les yeux éplorés des Troyennes, parmi lesquelles Andromaque, l'épouse d'Hector.

Sixième jour : les funérailles de Patrocle

Chant XXIII : funérailles et jeux funèbres de Patrocle

Corps d'Hector ramené à Troie, bas-relief d'un sarcophage romain, v. 180-200, musée du Louvre

Patrocle apparait en songe à son compagnon. Tous les Achéens se consacrent au deuil : de nombreux sacrifices sont consentis et la dépouille du jeune homme est brûlée selon la tradition. Un tombeau est élevé, et les cendres et os de Patrocle sont recueillis en attendant d'être réunis avec ceux d'Achille. Ce dernier organise des jeux funèbres qu'il dote de nombreux prix. Ainsi les guerriers peuvent montrer leur valeur à la course de char, à la lutte ou encore à la course à pieds.

Douze jours après : les funérailles d'Hector

Chant XXIV : ambassade de Priam et funérailles d'Hector

Achille ne peut trouver le sommeil. Pendant dix jours, il traîne chaque matin le corps d'Hector avec son char autour du tombeau de Patrocle. Mais les dieux, prenant en pitié la famille du Troyen, réprouvent son comportement et, par un procédé divin, conservent à la dépouille son bel aspect. Zeus exige de Thétis qu'elle aille convaincre son fils de rendre la dépouille à Priam. Priam, protégé par Hermès, traverse en secret les lignes ennemies pour être reçu dans la tente d'Achille. Là, il supplie ce dernier au nom de Pélée de lui rendre son fils en échange de présents. Achille y consent et propose à Priam le gîte et le couvert. Conciliant, Achille accepte également de retenir les troupes achéennes pendant douze jours, le temps pour les Troyens d'organiser des funérailles décentes à Hector. De retour à Troie, le corps du prince est présenté à la foule en larmes et de longues funérailles sont organisées.

Les personnages de l’Iliade

Article connexe : Catalogue des vaisseaux.
Carte de la Grèce homérique.

Dans son récit, Homère cite un grand nombre de héros de chaque camp, mais les Dieux et autres divinités sont également présents et influents.

Grecs

Troyens

Divinités

Nombre de morts par héros dans l'Iliade

Tandis que 150 troyens sont tués, seulement 44 achéens meurent au cours de l’Iliade.

L'héroïsme d'Achille

Statue de la personnification de l’Iliade, placée dans la Bibliothèque de Pantainos à Athènes, Musée de l'Agora antique d'Athènes

Poème de la guerre ou « poème de la force » (Simone Weil)[4], il résume parfaitement, selon les Grecs anciens, leur modèle aristocratique en la figure d’Achille, prêt à sacrifier une longue vie à une gloire impérissable. Henri-Irénée Marrou, dans son Histoire de l’éducation dans l’Antiquité (1948), explique ainsi :

« Beaucoup plus que l’Ulysse du Retour, c’est la noble et pure figure d’Achille qui incarne l’idéal moral du parfait chevalier homérique ; il se définit d’un mot : une morale héroïque de l’honneur. C’est dans Homère que chaque génération antique a trouvé ce qui est l'axe fondamental de cette éthique aristocratique : l'amour de la gloire. »

Deux types de gloires, d’honneurs (τιμή / timḗ) sont montrées dans l’Iliade :

  • l’honneur du chef, celui d’Agamemnon, le rang social ;
  • l’honneur du guerrier, la gloire personnelle, celle que recherche Achille.

L’Iliade voit le triomphe de la gloire vantée par Achille, κλέος ἄφθιτον / kléos áphthiton, la « gloire impérissable »[5] qui s’acquiert par une « belle mort », jeune, sur le champ de bataille.

Plus tard, cet amour de la gloire personnelle sera transformé. Tyrtée, le poète spartiate, chante ainsi la gloire immortelle qu'il y a à défendre sa patrie : pour le guerrier mort ainsi, « jamais sa noble gloire ne périt, ni son nom, mais bien qu’il demeure sous terre, il est immortel » (9 D, 27 sq., trad. C. Patro). Dans l’Iliade, Achille n’est pas un guerrier patriote. Quand il reprend les armes, ce n'est pas pour les Grecs qu’il combat. Son départ pour Troie, ses combats, sa colère et sa décision de reprendre les armes sont profondément individuels, voire égoïstes. Et quand il décide d’affronter Hector, sachant qu’il mourra ensuite s’il le fait, ce n’est pas pour les Grecs mais pour venger Patrocle.

En même temps, l’Iliade représente une lente décomposition des valeurs et des codes héroïques et chevaleresques, le cosmos (κόσμος, univers ordonné) pour basculer dans la sauvagerie, le chaos. Ainsi, selon Jean-Pierre Vernant (Entre mythe et politique, Seuil, 1984), les héros grecs comme troyens cessent progressivement de considérer l’adversaire comme le partenaire d’un combat loyal pour le transformer en proie — témoin la mutilation sauvage par Achille du corps d’Hector. Cette sauvagerie n’est rédimée qu’à la fin de l'épopée, quand Priam vient réclamer le corps de son fils et qu’Achille, selon Vernant, comprend les limites du monde héroïque dans lequel il se meut.

Réception de l’Iliade dans l'Antiquité

Avec l’Odyssée, l’Iliade est le texte majeur de la littérature grecque. Dans l’Antiquité, il était appris par cœur, in extenso, par les jeunes gens de bonne famille, ce qui faisait d’Homère, selon le mot du personnage Socrate (qui déplorait son influence dans La République de Platon) , l’« éducateur de la Grèce » [6].

De nombreux poètes et artistes prennent l’Iliade pour modèle ou s'en inspirent. Dès l'époque archaïque, la Batrachomyomachia, Combat des grenouilles et des rats, que les Anciens attribuaient aussi à Homère, compose une parodie héroïcomique des combats épiques comme ceux de l’Iliade. Au Ve siècle, un dramaturge (peut-être Euripide) reprend dans la tragédie Rhésos l'histoire de Dolon, rapportée au chant X de l’Iliade.

À l'époque romaine, le poète latin Virgile prend Homère pour modèle dans la composition de son épopée, l’Énéide, qui relate le mythe des origines troyennes de Rome et glorifie indirectement Auguste. L'histoire prend la suite d'Homère sur plusieurs plans : sur le plan narratif, puisque le principal héros, Énée, est un prince troyen qui apparaît dans l’Iliade ; et sur le plan thématique, puisque la première moitié de l’Énéide relate un voyage en mer dans le style de l’Odyssée, tandis que la seconde moitié décrit les batailles menées par Énée pour s'établir dans le Latium, dans le style de l’Iliade[7].

Postérité de l’Iliade après l'Antiquité

L’Iliade, comme l’Odyssée, acquiert le statut de classique dès l'Antiquité gréco-romaine et exerce une influence durable sur la littérature et les arts en général. Aujourd'hui encore, elle inspire de nombreux artistes dans tous les domaines de la culture.

Littérature

Au Moyen Âge, la guerre de Troie est connue par le biais de l’Iliade, notamment grâce à des traductions latines de l'original grec, comme l’Ilias Latina qui remonte sans doute au Ier siècle. Mais l’Iliade ne raconte que quelques jours de la dixième année de la guerre. Le reste des événements avait été relaté à l'origine par les épopées du cycle troyen, mais celles-ci se sont perdues pendant l'Antiquité. En revanche, d'autres récits composés plus tard dans l'Antiquité sont encore connus au Moyen Âge (et sont parvenus jusqu'à nous), comme l’Histoire de la destruction de Troie attribuée à Darès le Phrygien et l’Éphéméride de la guerre de Troie attribuée à Dictys de Crète[8]. Vers 1165, Benoît de Sainte-Maure compose Le Roman de Troie qui relate l'ensemble des événements de la guerre de Troie (et ne se limite donc pas aux événements relatés par l’Iliade)[8]. En 1450-1452, Jacques Millet compose une pièce intitulée Histoire de la destruction de Troie la grande, composée de 30 000 vers, qui connaît un grand succès jusqu'au XVIe siècle[9].

L’Iliade continue à fournir de nombreux sujets aux poètes et aux dramaturges à la Renaissance. Certaines tragédies développent des sujets liés à la guerre de Troie mais qui décrivent les suites de la guerre, dans la lignée des tragiques antiques : c'est le cas par exemple de La Troade de Robert Garnier (1579). Mais d'autres s'inspirent directement de l’Iliade, comme Hector d'Antoine de Montchrestien (1604)[10].

En 1716, Marivaux publie un Homère travesti ou l’Iliade en vers burlesques qui est une parodie burlesque des événements de l’Iliade, où les guerriers sont ridicules et les combats bouffons ; Marivaux, ignorant le grec, n'a pas lu Homère dans le texte, mais a travaillé à partir d'une traduction française en douze chants par Houdar de La Motte[11].

En 1990, Derek Walcott publie Omeros, une réécriture de l’Iliade qui se déroule aux Caraïbes.

L’Iliade inspire aussi les auteurs des littératures de l'imaginaire. Dans Ilium (2003) et Olympos (2006), l'auteur américain Dan Simmons réalise une libre transposition de l'épopée homérique dans un univers de science-fiction qui se réfère aussi à d'autres classiques de la littérature.

Cinéma

Dès les débuts du cinéma, l’Iliade fait l'objet de nombreuses adaptations en péplums. En 2004, Troie, réalisé par Wolfgang Petersen, relate l'ensemble de la guerre de Troie en accordant une place importante aux événements relatés par l'épopée homérique, mais en s'écartant parfois beaucoup du mythe antique.

Traductions en français

Références

  1. Les extraits de L’Iliade sont issus de la leçon de Paul Mazon (Belles Lettres). Les extraits traduits viennent de la traduction de Frédéric Mugler, Actes Sud, 1995.
  2. Traduction de Robert Flacelière pour la Bibliothèque de la Pléiade (éd. Gallimard) en 1955.
  3. Les éléments de structure de l’Iliade sont donnés par Saïd, Trédé et Le Boulluec (1997), p.  35-37.
  4. http://www.scribd.com/doc/2319868/Liliade-ou-le-poeme-de-la-force
  5. Chant IX, 413)
  6. τὴν Ἑλλάδα πεπαίδευκεν / tḕn Helláda pepaídeuken, République, X, 606e
  7. Hubert Zehnacker et Jean-Claude Fredouille, Littérature latine, PUF, 1993, p. 147.
  8. a et b Eissen (1993), p.  283.
  9. Eissen (1993), p.  284.
  10. Eissen (1993), p. 286-288.
  11. Eissen (1993), p. 288-289.

Voir aussi

Bibliographie

Manuels généraux
  • Ariane Eissen, Les Mythes grecs, Belin, 1993.
  • Suzanne Saïd, Monique Trédé et Alain Le Boulluec, Histoire de la littérature grecque, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 1997 (ISBN 2-13-053916-5) 
Études
  • Jean-Louis Backès, Iliade d'Homère,Gallimard, Foliothéque, 2006, (ISBN 2-07-030511-2).
  • Rachel Bespaloff, De l’Iliade, Alia, 2004 (1re éd. 1943) (ISBN 978-2-84485-161-1).
  • David Bouvier, Le Sceptre et la lyre. L'"Iliade" ou les héros de la mémoire, Grenoble, Jerôme Millon, 2002
  • Paul Demont, L'Iliade et l'Odyssée, Chêne, 2005
  • Sylvie Humbert-Mougin, L'Iliade, Nathan, 1997
  • (en) Geoffrey S. Kirk (dir.), The Iliad: A Commentary, Cambridge University Press, 6 vol., 1985-1993.
  • Bernard Knox, L'"Iliade" d'Homère, Arléa, 2005
  • Hubert Laizé, Leçon littéraire sur l'Iliade, Paris, PUF, 2000.
  • Paul Mazon, Introduction à l'"Iliade", Les Belles-Lettres, 1948
  • Hélène Monsacré, Les Larmes d’Achille. Le héros, la femme et la souffrance dans la poésie d’Homère, Albin Michel, 1984.
  • James Redfield, La Tragédie d’Hector. Nature et culture dans l’Iliade, Flammarion, 1984.
  • Jacqueline de Romilly :
    • Hector, De Fallois, 1997.
    • Perspectives actuelles sur l'épopée homérique,Paris, 1984
  • Guy Samama, collectif, Analyses et réflexions sur L'Iliade (chants XI à XXIV), Ellipses, 2000, (ISBN 2-7298-0241-X)
  • André Sauge :
  • Pierre Vidal-Naquet, « L’Iliade sans travesti », introduction à l’Iliade, trad. Paul Mazon, Gallimard, coll. « Folio », 1975.
  • Simone Weil, « L’Iliade ou le poème de la force », dans La Source grecque, Gallimard, 1953

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