Initiative populaire

Initiative populaire
Page d'aide sur l'homonymie Ne doit pas être confondu avec Initiative citoyenne.

L’initiative populaire est une procédure par laquelle un groupe de citoyens peut obtenir par pétition l’organisation d’un vote au parlement ou un référendum sur un projet de loi, une révision constitutionnelle, une demande d’abrogation ou de création d'une loi. C’est une forme de démocratie directe, pouvant toutefois exister au sein d’une démocratie représentative. Elle existe notamment en Suisse et dans certains États des États-Unis et dans certains Länder allemands, en Autriche comme en Italie. Les constitutionnalistes Jean-Luc Parodi et Olivier Duhamel parlent également d’initiative minoritaire[1].

Sommaire

Contrepoids politiques

Afin d'éviter la paralysie des institutions, les États où des dispositifs d'initiative populaire existent disposent de contrepoids politiques légaux. Les expériences suisses et californiennes, ont créé les lois urgentes. Lorsque une loi est qualifiée d'urgente par le législateur l'effet suspensif d'une demande de référendum d'initiative populaire, par exemple, s'annule. Par la suite, des nuances existent. En Californie, si une loi urgente est décidée, elle sera dans ce cas définitivement soustraite au champ du référendum d'initiative populaire. Certains pays ont également prévu des domaines réservés où l'initiative populaire n'est pas autorisée. On peut ainsi observer la Constitution italienne qui exclut qu'une demande de référendum puisse être présentée contre les lois fiscales ou budgétaires. Le référendum, de manière générale peut être perçu comme un contrepoids démocratique majeur : plus on consulte le peuple, plus on s'assure de la concordance entre les lois et la volonté du Peuple. Seulement, les gouvernants peuvent abuser de ce recours au référendum pour légitimer une politique non démocratique comme l'ont très bien montrées les dictatures césaristes de notre histoire constitutionnelle. Ainsi, instaurer un référendum d'initiative populaire semble bien différent d'un simple référendum quand bien même ces deux sortes de référendums (qui se distinguent par leur origine différente) tendent à garantir un même but. La mise en place d'un dispositif d'initiative populaire pose donc la problématique d'un juste équilibre entre le droit au peuple de s'exprimer et la stabilité du régime et de ses lois.

Applications concrètes

Belgique

En Belgique, bien qu'au niveau national et donc fédéral il n'existe aucun dispositif d'initiative populaire, en revanche aux niveaux communal et provincial, il existe des référendums dits consultatifs pouvant être organisés à l'initiative des électeurs rattachés à ces collectivités territoriales.

États-Unis

Durant l’ère progressiste, plusieurs États des États-Unis se sont dotés de procédures de législation directe telles que le référendum, l'initiative populaire et la procédure référendaire de destitution. En revanche, les mesures de démocratie directes restent inexistantes à l'échelle fédérale. Les initiatives adoptées par ces États ne pourront pas être appliquées si elles sont déclarées contraires à la Constitution fédérale ou même à une loi fédérale.

Au total, il existe 6 procédures répandues de démocratie directe aux États-Unis :

Initiatives parlementaires

  • 1 - L'amendement constitutionnel d'initiative parlementaire : Même si elle n'est pas l'initiative du pouvoir exécutif, cette procédure n'est pas non plus une initiative proprement "populaire" puisque votée par les parlementaires. Elle en vigueur dans 49 états, c'est-à-dire tous sauf le Delaware ; dans 15 états, il s'agit de la seule forme de démocratie directe existante. Il s'agit de modifications à la Constitution de l'État que la législature soumet à la décision du peuple. Même si elle peut paraitre très limitée, cette procédure permet au peuple de s'exprimer souvent et sur des sujets variés, les propositions allant souvent bien au-delà de l'organisation des pouvoirs publics et des droits fondamentaux, comme le vote de crédits pour la rénovation des transports ou le mariage homosexuel.
  • 2 - La loi d'initiative parlementaire : Le pouvoir de proposer est le même que l'amendement d'initiative parlementaire, mais l'objet est différent. En l'occurrence, l'on demande au peuple de se prononcer sur une simple loi. Cela signifie que même si le peuple approuve la loi, celle-ci ne sera pas appliquée si la justice la déclare contraire à la Constitution de l'Etat. Cela signifie, dans la plupart des États également que la législature pourra amender ou abroger cette loi sans de nouveau passer par le référendum (ce n'est généralement pas le cas pour un amendement constitutionnel). 24 états allouent cette procédure.

Initiatives populaires

  • 3 - L'amendement constitutionnel d'initiative populaire : Son objet est le même que celui d'initiative parlementaire, mais c'est le pouvoir de proposer qui est différent. Au lieu d'appartenir à législature, il appartient au peuple par le biais d'une pétition ayant été signée par un nombre de personnes fixée par la Constitution. Il est permis dans 18 états.
  • 4 - La loi d'initiative populaire : L'objet est le même que pour la procédure 2 et le pouvoir de proposer le même que pour la procédure 3. Elle est permise dans 22 états.
  • 5 - Le référendum abrogatif (veto referendum) est une forme restreinte de loi d'initiative populaire. Son objet ne peut être que l'abrogation d'une loi existante, et non l'adoption d'une loi nouvelle. Cette procédure est permise dans 25 états dont les 22 qui admettent l’initiative populaire mentionnée en 4.
  • 6 - Le recall est une procédure de démission forcée d'une personne soumise à un poste éligible avant l'expiration de son mandat. Il est en vigueur dans 18 états. Le dernier exemple en date fut la destitution du gouverneur Gray Davis en 2003, gouverneur de Californie.

Par exemple, en Californie, il faut au moins 5 % des personnes ayant participé à la dernière élection du gouverneur pour enclencher une initiative populaire, soit 433 971 électeurs. Si l'initiative populaire a pour but de modifier la Constitution, ce seuil est porté à 8 % (694 354). Pour organiser un recall, il faut 12 %.

Voir aussi Ballotpedia (en), un site encyclopédique sur les rendez-vous électoraux.

France

L'initiative parlementaire pouvant être soutenue par le peuple sera instaurée en France quand la révision de la Constitution de juillet 2008 entrera en vigueur. Les modalités de ce référendum sont controversées. Son fonctionnement est décrit dans l’article 11 de la Constitution. La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 viendra donc renouveler la définition d'une loi référendaire : il fut un temps où l'initiative d'un référendum n'appartenait quasiment qu'aux gouvernants. Notons, comme cela est brièvement mentionné dans cette page, que, sur ce sujet, la France est en retard par rapport à d'autres pays européens qui permettent à des partis politiques ou à une certaine portion du peuple d'être à l'initiative d'un référendum.

Olivier Duhamel parle spécifiquement de « référendum d'initiative minoritaire » pour cette procédure, car à l'inverse de l'Italie par exemple, il y a possibilité de référendum si l'on a une demande d'un dixième des citoyens français et d'un cinquième des parlementaires. Il ne s'agit donc pas d'une initiative purement et uniquement populaire. Cette réforme a été jugée par de nombreux constitutionnalistes[Qui ?] comme inutile et insuffisante, car elle n'introduit pas une initiative populaire mais bien parlementaire (à savoir, 1/5 du parlement, soit 184 parlementaires). L'aval du peuple n'est qu'une condition supplémentaire (1/10, soit 4 500 000 électeurs environ, c'est-à-dire neuf fois plus qu'en Italie qui a pourtant une population presque aussi nombreuse). Le peuple n'a donc pas la possibilité de mener l'initiative seul, il doit la quémander. Il n'a toujours pas explicitement le pouvoir de déposer une proposition de loi à l'Assemblée en recueillant un certain seuil de signatures.

Mais en outre, même dans l'hypothèse improbable où les conditions requises pour faire aboutir une initiative populaire seraient respectées, l'initiative ne serait soumise au référendum que si, aux termes mêmes de la constitution « la proposition de loi n’a pas été examinée par les deux assemblées dans un délai fixé par la loi organique ». En somme, les parlementaires pourront se contenter d'examiner la proposition, fut-ce pour la rejeter intégralement, et le référendum n'aura ainsi jamais lieu[2].

Italie

En Italie, les lois en vigueur peuvent être abrogées par un référendum d'initiative populaire.

Une demande d'initiative populaire en Italie doit avoir été présentée par au moins 500 000 électeurs pour être valide (article 75 de la Constitution)[3]. Il faudra ensuite que la Cour de cassation valide les signatures et que la Cour Constitutionnelle valide la constitutionnalité de la proposition. Le référendum a lieu le 15 avril et le 15 juin, souvent plusieurs propositions sont soumises au vote le même jour. L'abrogation ne peut être entérinée que si au moins 50 % des inscrits ont voté.

Bien que cela soit possible théoriquement depuis les années 50, le premier référendum abrogatif n'eut lieu qu'en 1974. Ce jour là, 79,3 % des votants se sont opposés à l'abrogation de la loi légalisant le divorce[4].

De 1995 à 2011, les propositions ont toutes été rejetées car bien qu'il y eut à chaque fois plus de 60 % de "oui", le taux de participation était inférieur à 50 %. L'exemple le plus frappant s'est déroulé en 1997, où 91,5 % des électeurs s'étaient déclarés favorables à l'abrogation du scrutin proportionnel aux élections, mais seuls 49,6 % des inscrits s'étaient déplacés. En 2011 en revanche, pour la première fois depuis plus de quinze ans les italiens ont approuvé 4 abrogations, notamment concernant l'immunité pénale du chef du gouvernement et le nucléaire civil.

Suisse

L’initiative populaire est un droit civique qui existe en Suisse et permettant à des citoyens de proposer un texte de loi (initiative législative au niveau cantonal) ou une modification de la constitution (initiative constitutionnelle, au niveau fédéral et cantonal). Le texte est ensuite soumis à une votation populaire qui l'acceptera ou non. Dans le cas d'une initiative législative, une consultation populaire et cantonale est demandée pour approuver une nouvelle loi ou modifier une loi existante conformément aux vœux des initiants. Là encore, les conditions varient selon les contextes institutionnels[5]. En Suisse, une fraction du corps électoral peut, par référendum, demander l'adoption de textes législatifs. Le référendum donne également aux électeurs suisses un droit de veto sur certains textes que le Parlement vient d'adopter. Nombre d'électeurs nécessaire pour la mise en œuvre d'une demande de modification de la Constitution : 100 000. Pour adopter une loi : 50 000 électeurs.

Union européenne

Article détaillé : Initiative citoyenne européenne.

Le traité établissant une Constitution pour l’Europe qui a été rejeté par les Néerlandais et les Français en 2005 et qui n'était toujours pas valide juridiquement prévoyait qu’une pétition signée par un million de citoyens européens pouvait être présenté devant la commission européenne[6].

Le Traité de Lisbonne entré en vigueur le 1er décembre 2009 prévoit l'initiative citoyenne européenne dans son article 11 TUE (Traité sur l'Union Européenne)[7] qui dispose que « Des citoyens de l'Union, au nombre d'un million au moins, ressortissants d'un nombre significatif d'États membres, peuvent prendre l'initiative d'inviter la Commission européenne, dans le cadre de ses attributions, à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu'un acte juridique de l'Union est nécessaire aux fins de l'application des traités ».

Les règles d'application de l'initiative citoyenne ont été fixées par un règlement communautaire le 14 février 2011 conformément à l'article 24 TFUE (Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne)[7] selon la procédure législative ordinaire (art. 294 TFUE)[7] qui ne prendra effet qu'en 2012 afin de laisser le temps aux gouvernements nationaux de prendre les dispositions nécessaires à la garantie de l'application de ce règlement.

Critique

L'expression d'initiative populaire a été critiquée, par exemple par le philosophe austro-britannique Karl Popper. Dans La Leçon de ce siècle (1993), il écrit que « l'expression d'initiative populaire est trompeuse et relève de la propagande »[8]. En effet, dans tous les cas, il s'agit de l'initiative de quelques individus et non d'une inexistante entité populaire. À l'inverse, Popper défend la notion de « jugement par le peuple », par les mécanismes démocratiques des élections.

Notes et références

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes



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