Irène de Grèce (1904-1974)

Irène de Grèce (1904-1974)
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La princesse Irène de Grèce.

Irène de Grèce (en grec moderne : Πριγκίπισσα Ειρήνη της Ελλάδας), princesse de Grèce et de Danemark et, par son mariage, duchesse de Spolète et d’Aoste, est née le 13 février 1904 à Athènes, en Grèce, et est décédée le 15 avril 1974, à Fiesole, en Italie. C'est un membre des familles royales grecque et italienne. De 1941 à 1943, elle est, par ailleurs, officiellement « reine consort de la Croatie oustachi ».

Sommaire

Famille

La princesse Irène est la fille du roi Constantin Ier de Grèce (1868-1923) et de son épouse la princesse Sophie de Prusse (1870-1932). Par son père, elle est l’arrière-petite-fille du roi Christian IX de Danemark (1818-1906), surnommé le « beau-père de l’Europe », tandis que par sa mère, elle est l’arrière-petite-fille de la reine Victoria du Royaume-Uni (1819-1901), elle-même surnommée la « grand-mère de l’Europe ». La princesse est donc une proche parente de la plupart des monarques et prétendants princiers de l’Europe de son époque.

Le 1er juillet 1939, Irène de Grèce épouse à Florence le prince Aymon de Savoie (1900-1948), duc de Spolète et futur roi fantoche de Croatie sous le nom de « Tomislav II ». Le prince est l’arrière-petit-fils du roi Victor-Emmanuel II d’Italie (1820-1878) et une personnalité importante de la Maison de Savoie.

De cette union naît un seul enfant :

  • Amédée de Savoie (1943), duc d’Aoste. Pour certains monarchistes croates, il est roi de Croatie sous le nom de « Zvonimir II » tandis que, pour certains monarchistes italiens, il est également souverain d’Italie. En 1964, il épouse la princesse française Claude d’Orléans (1943), mais il en divorce en 1982 avant de se remarier à Silvia Paternò di Spedalotto (1953).

Biographie

Une jeunesse difficile

La famille royale hellène vers 1914. Au centre, on peut voir la reine Sophie et le roi Constantin Ier de Grèce avec, autour d'eux, les futurs rois Paul Ier, Alexandre Ier et Georges II de Grèce ainsi que les futures reines Hélène de Roumanie et Irène de Croatie.

L'enfance et la jeunesse de la princesse Irène sont marquées par les nombreux drames qui ponctuent le règne de son père. La petite fille a dix ans lorsqu'éclate la Première Guerre mondiale et la politique de neutralité menée par Constantin Ier a de graves répercussions sur son pays et sa famille. De fait, la rupture entre le souverain, plutôt favorable aux empires centraux, et son ancien Premier ministre, Eleftherios Venizelos, totalement acquis aux forces de la Triple Entente, conduit la Grèce au « Grand Schisme », c'est-à-dire à une quasi guerre civile. Certes, la princesse Irène est un peu jeune pour saisir complètement la gravité de ce qui se passe autour d'elle, mais les violences qui frappent le pays ne l'épargnent pas pour autant. Ainsi, en 1916, un incendie criminel probablement organisé par des Venizelistes ravage le palais royal de Tatoï et la mère d'Irène, la reine Sophie, parvient de justesse à sauver des flammes sa dernière née, la princesse Catherine.

L'année suivante, en 1917, les pressions des Alliés sur le gouvernement grec obligent le roi à prendre le chemin de l'exil pour éviter l'invasion de son pays et le bombardement de sa capitale. Avec ses parents et plusieurs de ses frères et sœurs, la princesse Irène part alors vivre en Suisse tandis que l'un de ses frères monte sur le trône hellène sous le nom d'Alexandre Ier. Cependant, le jeune homme meurt d'une septicémie en 1920[1] et Constantin Ier est rappelé à la tête de son pays. Pendant deux ans, Irène retrouve donc la Grèce mais elle en est à nouveau chassée par les troubles de 1922-1923, qui renversent tour à tour le roi Constantin et son fils aîné et successeur, Georges II[2].

À partir de cette date, la princesse vit en exil en Italie, aux côtés de ses parents. Mais, dès 1923, le roi Constantin trouve la mort et Irène passe plusieurs années dans la seule compagnie de sa mère, qui s'éteint à son tour en 1932. À deux reprises, elle est fiancée à des princes européens (Nicolas de Roumanie en 1923 puis Christian de Schaumbourg-Lippe en 1927) mais à chaque fois le projet d'union finit par échouer. Enfin, en 1935, la restauration de Georges II sur le trône hellène permet à la princesse de revenir vivre quelques années dans sa patrie.

Le prince Aymon de Savoie-Aoste, duc de Spolète.

Un mariage italien

En 1939, Irène de Grèce épouse un membre éminent de la Maison de Savoie, le prince Aymon d'Aoste, duc de Spolète. L'union est prestigieuse et elle doit permettre l'établissement de liens durables entre l'Italie fasciste et le royaume hellène. Les deux pays sont voisins et les dictatures de Mussolini et de Metaxas sont idéologiquement très proches. Pourtant, Athènes n'apprécie guère la présence italienne croissante à ses frontières[3] et le mariage d'Irène doit donc servir de base de rapprochement entre les deux états.

Malgré tout, lorsqu'éclate la Deuxième Guerre mondiale, les appétits italiens concernant son voisin grec ne s'embarrassent pas des liens matrimoniaux unissant le cousin du roi Victor-Emmanuel III et la sœur du roi des Hellènes. La princesse Irène se retrouve dès lors dans la triste position de devoir soutenir une politique hostile à son pays natal et d'être coupée de tout contact avec sa propre famille par la guerre italo-grecque de 1940-1941 puis par l'exil de la famille royale grecque en Afrique.

Reine de Croatie

Pour l'Italie mussolinienne, l'alliance avec l'Allemagne nazie est tout d'abord fort profitable. Non seulement Hitler permet à son alliée latine d'occuper une partie du territoire grec (et cela malgré sa défaite cuisante face aux troupes hellènes en 1940) mais encore elle lui donne l'occasion de participer au dépeçage du royaume yougoslave en 1941. Rome s'empare ainsi d'une partie de la Dalmatie, du Kossovo et du Monténégro. Ce qui reste du royaume slave est par ailleurs divisé entre un état croate satellisé par les puissances de l'Axe et une province serbe occupée par le Troisième Reich.

Ante Pavelić et le symbole des Oustachis.

Or, le 18 mai 1941, Ante Pavelić, le chef des fascistes croates (aussi appelés Oustachis), offre la couronne de son pays au prince Aymon et à la princesse Irène, qui deviennent, à cette occasion, le roi Tomislav II et la reine Irina de Croatie. Pour le dictateur, il s'agit avant tout de s'attirer les bonnes graces de l'Italie face à l'intransigeante Allemagne. Mais, une fois encore, le cadeau fait à la Maison de Savoie n'empêche pas Mussolini de s'emparer d'une bonne partie de la Croatie historique. Dans ces circonstances, la princesse Irène se doit encore de faire bonne figure. Pourtant, l'idée de monter sur le trône d'un pays gouverné hier encore par l'un de ses cousins, le régent Paul[4], et dorénavant dominé par les nazis n'est pas pour la réjouir.

Armes de l'État indépendant de Croatie.

De fait, la Croatie oustachi est un état fantoche, totalement contrôlé par les troupes germano-italiennes qui l’occupent depuis l’invasion de la Yougoslavie. Les nouveaux monarques refusent donc de gagner leur royaume et de partir se faire couronner dans la ville de Dunansko Polje, en Bosnie. Pour justifier leur attitude, ils prennent prétexte de la « question dalmate », provoquée par l’annexion par l'Italie d’un certain nombre de territoires croates situés en bordure de la mer Adriatique. Ils s'attirent ainsi les bonnes grâces de leurs sujets tout en s'écartant de toute forme de collaboration.

Bien qu'ils refusent de se rendre en Croatie pendant toute la durée de leur « règne »[5], Tomislav II et son épouse y jouissent théoriquement de pouvoirs symboliques. Ils ne peuvent cependant y prendre aucune décision importante puisque ce sont les occupants allemands et italiens qui le gouvernent, avec le soutien actif des Oustachis. Finalement, le prince Aymon, qui ne s'est jamais véritablement considéré roi, abdique son trône le 31 juillet 1943, après le retrait définitif des troupes italiennes de Croatie.

Dans les camps allemands

En septembre 1943, l'époux d'Irène, devenu entre-temps duc d’Aoste, suit son cousin le roi Victor-Emmanuel III d’Italie à Brindisi. Entrant dans la lutte contre les nazis et les fascistes, il perd tout contact avec son épouse, alors enceinte. Le 27 septembre, la princesse Irène donne naissance à son fils unique au palais Della Cisterna de Florence mais la joie qui accompagne l'événement est de courte durée. Trois semaines après la venue au monde du petit Amédée, la princesse et son fils sont arrêtés par les Allemands et conduits dans différents camps de concentration, d'abord à Pavie, en Italie, puis à Hirschegg, en Autriche. Ils partagent alors leur captivité avec la princesse Anne d'Orléans, belle-sœur d'Irène, et les deux petites filles de celle-ci, Marguerite et Marie-Christine.

La famille est finalement libérée par les soldats américains en 1945 et Irène retourne, pour une brève période, vivre auprès de son époux en Italie.

Humbert II, infortuné roi d'Italie.

Veuvage

Après la guerre, le royaume italien connaît d'importants bouleversements politiques et le nouveau souverain Humbert II est conduit à abdiquer après le référendum institutionnel de 1946. Le prince Aymon de Savoie choisit alors d'abandonner son pays et s’installe à Buenos-Aires, en Argentine, tandis que son épouse et son fils s'établissent en Suisse. Mais, dix-sept mois après le début de cet exil, l’ex-roi de Croatie meurt d'un infarctus. Irène, totalement désargentée depuis que la république italienne a mis sous séquestre les biens de la Maison de Savoie, apprend la nouvelle du décès de son mari par la radio et ne peut même pas se rendre en Amérique latine pour assister à son enterrement, faute de moyens.

Dernières années

Malgré les difficultés, la princesse Irène revient vivre en Italie dès 1948 et s’installe, avec son fils, en Toscane, où elle réussit, à force de ténacité, à récupérer l’essentiel des domaines de la branche d’Aoste.

En 1972, la princesse est déclarée citoyenne d’honneur de Florence pour l’aide qu’elle a apporté à la ville durant les terribles inondations qui l’ont touchée. Deux ans après, Irène de Grèce s’éteint près de la capitale toscane. Elle est enterrée sur les terres de sa famille, dans la localité d'Arezzo.

Bibliographie

  • Giulio Vignoli, Il sovrano sconosciuto. Tomislavo II Re di Croazia, Verlag Mursia, Florence.

Notes et références

  1. À sa mort, Alexandre Ier ne laisse qu'une fille, la princesse Alexandra de Grèce (1921-1993), future reine de Yougoslavie.
  2. Vaincue par les troupes de Mustafa Kemal Atatürk, la Grèce perd la majorité des territoires qu'elle avait gagné à la fin du premier conflit mondial. Naturellement, le désastre militaire s'accompagne d'une crise politique qui conduit à la proclamation de la république.
  3. En avril 1939, Mussolini a envahi l'Albanie et renversé le roi Zog Ier. Or, l'Italie possédait déjà, avant cette date, l'archipel du Dodécanèse et la Cyrénaïque. Le royaume hellène se retrouve donc encerclé par son voisin italien.
  4. Le prince Paul de Yougoslavie est l'époux de la princesse Olga de Grèce, cousine germaine d'Irène.
  5. Le couple vit à Florence, au palais Della Cisterna.

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