Jeu de Balle

Jeu de Balle

Jeu de balle (Mésoamérique)

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Joueurs de pok ta pok en tenue traditionnelle

Le jeu de balle (pok-ta-pok en maya[1], tlachtli[2] ou ullamaliztli[3] en náhuatl, ou encore taladzi en zapotèque), connu également sous le nom de jeu de pelote, est un sport rituel qui a été pratiqué pendant plus de 3000 ans par les peuples de la Mésoamérique précolombienne. On trouve de nos jours des survivances de ce sport dans cette zone culturelle.

Sommaire

Repères géographiques et chronologiques

Une des extrémités du jeu de balle de Chichén Itzá, dans le Yucatán (le plus grand)

C'est principalement dans l'aire de la civilisation maya que l'on trouve des terrains de jeu de balle : autrement dit, du sud-est du Mexique (principalement au Yucatán, mais également dans les États de Quintana Roo, Campeche, Tabasco et du Chiapas) au Honduras, en passant par le Belize, le Guatémala et le Salvador.

La première trace de jeu de balle provient de figurines trouvées dans une tombe de El Opeño (Michoacán, Mexique), datant du Préclassique ancien (1500 av. J.-C.). Le plus vieux terrain connu appartient au site de La Venta (Tabasco, Mexique) et date d'environ 1000 ans avant notre ère. Le plus grand est celui de Chichén Itzá (Yucatán, Mexique) avec 146 mètres de longueur sur 36 de large. La construction des terrains et la pratique du jeu de balle ont été stoppées par la conquête espagnole au XVIe siècle.

Les règles du jeu de balle

Marqueur du terrain de Chinkultic
Anneau du terrain de Chichén Itzá
Dessin basé sur une peinture d'un vase maya des terres basses, dont l'origine est datée entre 650 et 800 et qui est actuellement exposé au Dallas Museum of Art. Le joueur représenté est le dernier roi de Motul de San José, Sak Ch’een, dans une partie l'opposant au roi d'El Pajaral.

Bien qu'il n'y ait pas eu qu'une seule façon de pratiquer le jeu de balle dans les différentes ethnies d'Amérique Centrale, on retrouve cependant un certain nombre de règles communes.

Premièrement, il opposait deux équipes de deux à dix joueurs chacune. Ils se faisaient face de part et d’autre d’une ligne centrale, sur un terrain délimité latéralement par des murs d'une dizaine de mètres de hauteur et en général inclinés. Les terrains de l'époque classique sont en général délimités dans le sens de la longueur par une terrasse ou un mur, donnant ainsi au terrain la forme d'un I majuscule ou d'un double T majuscule aux barres transversales opposées[4].

Les joueurs devaient se renvoyer une balle de taille variable en caoutchouc (matière sacrée chez les Mayas). Ils pouvaient utiliser pour cela les genoux, les coudes, les hanches ou les fesses, en évitant de la toucher avec les mains ou les pieds. Étant donné que la balle était pleine, elle pesait jusqu'à plus de 3 kg ; les joueurs portaient donc des protections pour atténuer la violence des coups : coudières, genouillères, joug (ceinture de cuir) et parfois même un casque. Comme au volley-ball, le but était de renvoyer la balle dans le camp adverse sans qu'elle ne touche le sol.

Le décompte des points était simple : l'équipe qui ne renvoyait pas la balle correctement (c'est-à-dire hors des limites du terrain ou en utilisant une partie du corps interdite) perdait un point et l'équipe adverse en gagnait un. La partie s'achevait lorsque le nombre de points déterminé à l'avance était atteint. Dans le cas des terrains dont les murs latéraux étaient équipés d'anneaux, la partie pouvait également s'arrêter lorsqu'un joueur réalisait l'exploit (excessivement rare) de faire passer la balle dans l'anneau correspondant à son camp.

Lorsqu’il ne s’agissait pas d’un simple entraînement, les prêtres ainsi que les rois et les personnalités importantes observaient le jeu du haut des bâtiments situés autour du terrain.

Plus qu'un jeu, un rite

Certes, le jeu de balle était pratiqué par tous : certaines cités importantes, comme Chichén Itzá, ont eu jusqu’à treize terrains, et on sait par le codex Mendoza que l’empereur aztèque Moctezuma II exigeait des cités de la côte du golfe du Mexique le paiement d’un tribut annuel de 16 000 balles de caoutchouc, ce qui prouve bien que le jeu était pratiqué très régulièrement par une part importante de la population.

Mais lorsqu’il était pratiqué comme un sport, le jeu de balle n’était en fait alors qu’un simple entraînement à ce qui était sa vraie raison d’être : les cérémonies religieuses.

En effet, le jeu de balle était avant tout un rite symbolisant la cosmogonie méso-américaine : la trajectoire de la balle correspondait à la course du soleil qui ne devait pas s’arrêter ; les anneaux de pierre servant de cibles, le plus souvent disposés à l'Est et à l'Ouest, représentaient le levant et le ponant. Le terrain, lui, représentait la plate-forme terrestre séparant le Monde Supérieur (le ciel) de l’Inframonde (semblable aux Enfers), où l’homme doit lutter contre les forces des ténèbres pour rejoindre, avec le soleil, le Monde Supérieur (cf. ci-dessous le mythe fondateur raconté dans le Popol-Vuh). D’une manière générale, la pratique cérémonielle du jeu de balle servait à révéler la volonté des dieux : pour trancher des débats voire des conflits politiques (le terrain du jeu de balle servait également de forum social), et pour, en cas de problème (agricole en particulier), donner des indices d’ordre divinatoire aux prêtres, qui suivaient le jeu avec attention pour en déchiffrer les signes.

De plus, ces cérémonies se terminaient systématiquement par la décapitation de l’équipe perdante ou du moins de son chef (à ce titre on comprend pourquoi c’étaient des prisonniers de guerre qui participaient le plus souvent à cette pratique rituelle) : ce sacrifice visait clairement à invoquer l’aide des dieux, le sang versé pouvant qui plus est être rattaché à la fertilisation des terres. Il existait même une structure, le tzompantli (ou autel de crânes), servant à recueillir les offrandes de ces têtes tranchées, exposées sur de longues traverses de bois.

Selon certains historiens, ce sont les vainqueurs du jeu qui étaient sacrifiés aux dieux, puisque cet acte était un honneur suprême.

Le mythe originel

Le Popol-Vuh, texte sacré des Mayas raconte le mythe suivant :

Les deux jumeaux Hunhunahpú et Vucub Hunahpú, conviés à jouer à la balle avec les seigneurs du Monde Inférieur, y perdent la vie à la suite de nombreuses épreuves. Par la suite, la tête de Hunhunahpú, suspendue à un calebassier, profitera de la désobéissance de Xquic, fille d’un des seigneurs ayant bravé l’interdiction de s’approcher de l’arbre, pour lui cracher dans la main. Xquic tombe alors enceinte et se réfugie sur terre pour échapper aux représailles de ses semblables. Elle y donnera naissance aux jumeaux Hunahpú et Xbalanqué.

Ces derniers, ayant récupéré l’équipement de leur père et de leur oncle, se mettent à jouer à la balle. Les seigneurs de Xibalbá les font alors eux aussi descendre dans le Monde Inférieur, mais les jumeaux arrivent à déjouer les pièges tendus par leurs adversaires, jusqu'à ce que Hunahpú se fasse décapiter par une chauve-souris. Les seigneurs décident d'utiliser sa tête comme balle mais Xbalanqué arrive, par ruse, à la remplacer par un lapin et à ressusciter son frère. Les jumeaux sont finalement vainqueurs et tuent les seigneurs des ténèbres. Ils ressusciteront également leur père et leur oncle, et monteront au ciel pour devenir l’un le Soleil et l’autre la Lune.

Notes et références

  1. Kendall Blanchard, The anthropology of sport, p.103.
  2. Duverger 1978, p.44.
  3. Aguilar-Moreno 2007, p.224.
  4. Duverger 1978, p.44.

Annexes

Bibliographie

  • (en) Aguilar-Moreno, Handbook to Life in the Aztec World, Oxford University Press, 2007, 464 p. (ISBN 0195330838) 
  • Nicolas Balutet, Le jeu sacré maya, Le Manuscrit, Paris, 2006 (ISBN 2748156196) [présentation en ligne] 
  • Jacqueline de Durand-Forest et Georges Baudot, Danse avec les dieux. Mille ans de civilisations mésoaméricaines des Mayas aux Aztèques, L'Harmattan, 1995 (ISBN 273843066X) 
  • (es) María Teresa Uriarte, El juego de pelota en Mesoamérica, Siglo Veintiuno Editores, 1992, 420 p. (ISBN 9682318378) 
  • (es) El juego de pelota en el México precolombino y su pervivencia en la actualidad, Ajuntament de Barcelona, 1992, 306 p. (ISBN 8476095376).
    Catalogue de l’exposition présentée au Museu Etnologic de Barcelone du 16 juillet au 31 octobre 1992.
     
  • (en) Vernon L. Scarborough et David R. Wilcox, The Mesoamerican Ballgame, University of Arizona Press, 1991, 404 p. (ISBN 0816511802) [présentation en ligne] 
  • Éric Taladoire, Les terrains de jeu de balle (Mésoamérique et sud-ouest des Etats-Unis), Mission archéologique et ethnologique française au Mexique, coll. « Études mésoaméricaines », 1981, 733 p. 
  • Duverger, L'esprit du jeu chez les Aztèques, Walter de Gruyter, 1978 (ISBN 9027976643) 

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