Joseph Elzéar Morénas

Joseph Elzéar Morénas
Joseph Elzéar Morénas
Naissance 28 août 1776
Saint-Christol (Vaucluse)
Décès 26 septembre 1830 (à 54 ans)
Mouri, Mingrélie
Nationalité Flag of France.svg Française
Profession botaniste et orientaliste
Autres activités antiesclavagiste et littérateur

Joseph Elzéar Morénas (1776-1830), né à Saint-Christol (Vaucluse), botaniste de profession, il devint orientaliste par passion et antiesclavagiste par conviction.

Sommaire

Biographie

Enfance

Il naquit à Saint-Christol-d'Albion le 28 août 1776[1] de Christol Morénas et Louise Mézard, originaire d'Apt. Ce fut cette ville qu'il rejoignit dès qu'il fut en âge de faire ses études et il fut accueilli par son oncle maternel, un joaillier. Celui-ci voulant que son neveu puisse prendre sa boutique, dès qu'il eut 17 ans, l'envoya en apprentissage à Carpentras puis à Nîmes, en 1797[2].

Séjour aux Indes

Alors âgé de 21 ans, il constata son peu de goût pour l'orfèvrerie et décidé de monter à Paris. Il fut accueilli chez les frères Huchet de Bordeaux qui lui présentèrent le général Decaen. Celui-ci, préparant un voyage aux Indes, accepta d'engager le jeune homme qui le rejoignit en 1803[3]. Au cours d'un séjour qui dura dix ans, il s'intéressa particulièrement aux langues parlées sur place et en particulier à l'hindoustani[3].

« Il établit, le premier, une définition exacte et précise de l'hindoustani, en assigna l'étendue, les limites, le caractère, les altérations qu'il a éprouvées et les différences qui le distingue des autres idiomes parlés de l'Indus jusqu'au delta du Gange »

— C. F. H. Barjavel[3].

Ce savoir accumulé, lui permit de faire publier une véritable somme sous le titre : Des castes de l'Inde ou Lettres sur les Hindous à l'occasion de la tragédie du Paria de M. Casimir Delavigne. Suivies des notes sur les mots et les usages de l'Inde, dont il est fait mention dans cette tragédie. Terminées par les observations critiques sur les notes jointes à la traduction du voyage de Tone chez les Mahrattes et publiées en forme de glossaire par M. Langlès, professeur de persan, conservateur et administrateur des manuscrits orientaux de la Bibliothèque du Roi, membre de l'Institut, etc. par Joseph, ancien corsaire[3].

Il laissa sous forme de manuscrits un Dictionnaire hindoustani avec une grammaire et un recueil d'étymologies indiennes qu'il ne put publier faute de ressource. Aux Indes, opute sa passion pour la linguistique, il s'était intéressé de très près à tout ce qui avait trait à l'agriculture et à la botanique. Le gouvernement n'ayant pas jugé utile et nécessaire de créer pour lui une chaire d'hindoustani, il postula à un poste au Sénégal[4].

Séjours au Sénégal et à Haïti

Il y fut donc envoyé au début de 1818 avec le titre d'agriculteur-botaniste et membre de la « Commission d'exploration ». Arrivé sur place, il fut horrifié par l'esclavage et la traite des noirs que couvraient les plus hauts fonctionnaires. Il demanda à être rapatrié, ce qui lui fut accordé en juillet 1818 et dès son retour, il dénonça publiquement l'implication de la France dans ces méthodes esclavagistes[4].

Face à l'accueil mitigé qu'avaient provoqué ses révélations, il préféra prendre un peu de distance et s'embarqua pour Haïti. Sur place, il rencontra le président Boyer avec lequel il sympathisa, son père étant d'origine provençale. Ce séjour lui donna matière pour rédiger son second important ouvrage Projet d'une exploitation agricole pour introduire les végétaux étrangers qui peuvent supporter le climat de la France[4].

Expériences botaniques

L'expérience agronomique qu'il avait accumulé dans ces trois pays tropicaux, l'incita à passer à la pratique en implantant en Provence des espèces bien sélectionnées. Il choisit le mûrier de prairie, l'indigotier, le caféier et le cotonnier. Jusqu'en 1825, il s'installa à Hyères où il mit en place une plantation de mûrier avec l'espoir d'obtenir plusieurs récoltes de sois par an, fit tester le pistachier d'Alep, plus rentable selon lui que l'amandier, tenta de substituer aux cépages ordinaires des raisins apyrènes de Malaga et de Corinthe, et fit des essais concluants de culture de la canne à sucre[5].

Lutte contre l'esclavagisme

Le gouvernement ne le suivit pas. Et pour cause, en même temps qu'il mettait en place ses expériences botaniques, il s'était lance dans la lutte contre l'esclavagisme. Pour y mettre fin et faire punir les négriers, il écrivit une Pétition contre la traite des noirs, qui se fait au Sénégal et la présenta à la Chambre des députés le 14 juin 1820[6]. En dépit du soutien que lui apporta pour confirmer ses dires l'abbé Guidicelli, ancien préfet apostolique au Sénégal, en publiant « Observations sur la traite des noirs, en réponse au rapport de M. de Courvoisier sur la pétition de M. Morénas », il fut renvoyé[7].

Lui et l'abbé furent traités d'imposteurs et menacés d'être traduits en justice comme calomniateurs pour avoir dénocé comme négriers des agents de l'état[7]. Morénas contre-attaqua avec une Seconde pétition contre la traite des noirs, à nouveau présentée aux députés, le 19 mars 1821[8] et à la Chambre des Pairs le 26 du même mois[7].

Cette seconde requête n'ayant pas aboutie, il quitta la Provence et retourna à Paris où il s'installa 55 rue de Vaugirard. Ce fut là, qu'il de mit à rédiger un véritable acte d'accusation qu'il publia en 1828, sous le titre Précis historique de la traite des noirs et de l'esclavage colonial[8]. Il y argumenta contre l'esclavage quitte à transformer la réalité historique en affirmant qu'il n'avait jamais été pratique courante chez les Égyptiens ou chez les Hindous[9].

Dans cet ouvrage, dédié à Jean-Pierre Boyer, le président d'Haïti, il décrivit avec précision les trois formes d'esclave alors pratiquées en Afrique noire. Il y a d'abord ceux qui deviennent esclaves pour dettes, ceux qui sont prisonniers de guerre, et enfin les esclaves de case, c'est-à-dire les enfants nés d'esclaves attachés au service de la maison de leur maître[9]. Et surtout, il a tenu à ce qu'il fut illustré des trois portraits des antiesclavagistes Cyrille Bissette, Louis Fabien et Jean-Baptiste Volny qui venaient d'être condamné aux galères à perpétuité par la Cour royale de Martinique[7].

Séjour en Russie

Il fit parvenir son ouvrage au Ministère de la Marine en y joignant un mémoire dans lequel il proposait de le charger d'une mission d'exploration au Sénégal. Sa demande resta sans réponse. Il revint à la charge en demandant cette fois d'être affecté en Corse afin d'y acclimater des espèces tropicales. Ce lui fut refusé. Il pensa alors s'exiler au Mexique. Ce projet devint caduc quand le général Antoine de Jomini, au service du tsar, le contacta à Paris pour lui proposer ses expériences botaniques en Russie[10].

Il partit en 1829 en Géorgie où son acclimatation de nouvelles espèces végétales connu un tel succès qu'il eut droit aux gros titres dans les journaux parisiens, en particulier dans l'édition du Journal du Commerce du 7 avril 1830 et dans celle du Moniteur du 10 avril[11].

Sa passion de l'exploration le reprit et il se lança dans une série d'excursions en dépit d'une fièvre tenace qui le minait. Il y succomba arrivé à Mouri en Mingrélie, le 26 septembre 1830. Il fut inhumé dans l'église de la Nativité, à proximité de la ville, sur les rives de la rivière Tskhenitskhali[11]. En reconnaissance, le tsar, Nicolas Ier fit à sa sœur une rente viagère de 1 200 roubles[1].

Œuvres

  • Seconde pétition contre la traite des noirs, présenté à la Chambre des Députés, le 19 mars 1821, Imprimerie de Mme Jeunehomme-Crémière, Paris.
  • Projet d'une exploitation agricole pour introduire les végétaux étrangers qui peuvent supporter le climat de la France, Éd. Moreau, Paris, 1821.
  • Des castes de l'Inde ou Lettres sur les Hindous, Imprimerie de Mme Jeunehomme-Crémière, Paris, 1822.
  • Précis historique de la traite des noirs et de l'esclavage colonial, Éd. Firmin Didot, Paris, 1828.
  • Précis historique de la traite des noirs et de l'esclavage colonial, Éd. Slatkine Reprints, Genève, 1978,

Bibliographie

  • C.-F.-H. Barjavel, Dictionnaire Historique, Biographique et Bibliographique du Département de Vaucluse, Tome II, L. Devillario, Carpentras, 1841, 1841 
  • Jules Courtet, Dictionnaire géographique, géologique, historique, archéologique et biographique du département du Vaucluse, Christian Lacour, Nîmes (réed.), 1997, 1997 (ISBN 284406051X) 

Notes et références

  1. a et b Jules Courtet, op. cit., p. 285.
  2. Barjavel, op. cit., p. 197.
  3. a, b, c et d Barjavel, op. cit., p. 198.
  4. a, b et c Barjavel, op. cit., p. 199.
  5. Barjavel, op. cit., p. 200.
  6. Joseph Elzéar Morénas, défenseur des droits de l'Homme
  7. a, b, c et d Barjavel, op. cit., p. 201.
  8. a et b Deux œuvres de Joseph Elzéar Morénas
  9. a et b Citations contre l'esclavage de Joseph Elzéar Morénas
  10. Barjavel op. cit., p. 202
  11. a et b Barjavel, op. cit., p. 203.

Voir aussi

Liens internes

Liens externes


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