Le syndrome Gilles de la Tourette

Le syndrome Gilles de la Tourette

Maladie de Gilles de la Tourette

La maladie de Gilles de la Tourette, aussi appelée syndrome de la Tourette, est une affection neurologique qui se traduit par les diverses manifestations suivantes, à des degrés variables :

  • troubles obsessionnels-compulsifs (TOC) ;
  • tics verbaux et sonores : la coprolalie, symptôme touchant entre 10 et 15 % des cas recensés et l'écholalie, plus fréquente ;
  • tics moteurs (spasmes musculaires) affectant le cou, les membres supérieurs, le tronc et aussi, dans plusieurs cas, le visage avec grimaces et crispations incontrôlées.

Généralement, le syndrome de la Tourette est diagnostiqué vers l'âge de 16 ans. Cependant, la maladie apparaît en général entre 3 et 8 ans[1], et on lui connait une prédominance masculine (4 garçons pour 1 fille).

La description fut publiée en 1886 par le neuropsychiatre français Gilles de la Tourette.

Il est possible d'atténuer les symptômes par des neuroleptiques tels que la rispéridone, des antidépresseurs (associés à la neurosécrétion de sérotonine) ou encore des anxiolytiques (benzodiazépines), mais il n'existe pas actuellement de traitement permettant la guérison totale.

Sommaire

Causes

La cause exacte du syndrome de la Tourette est inconnue, mais il est établi que sont impliqués à la fois des facteurs génétiques et des facteurs environnementaux. Ces deux derniers amèneraient à différents troubles et dérèglements neurologiques. Ceux-ci pourraient amener à une hyperactivité dopaminergique au niveau de la substance noire, lieu de production de la dopamine, un neurotransmetteur ayant un rôle très important dans l'inhibition de nos actions et comportements. Cette hyperactivité dopaminergique pourrait amener à l'hyperpolarisation des neurones, donc le seuil de déclenchement d'un courant électrique serait plus difficiles à atteindre. [2] Les études génétiques ont montré la transmission (génétique) du syndrome dans une très grande majorité de cas, bien que le détail de cette transmission ne soit pas encore connu, [3] et qu'aucun gène n'ait encore été identifié. [4] Dans certains cas, les tics peuvent ne pas être transmis, et on parle de cas "sporadique" du syndrome (connu aussi sous le terme anglais de tourettism) car le lien génétique est absent.[5]

Une personne atteinte du syndrome de la Tourette a 50% de probabilité de transmettre le ou les gènes impliqués à ses enfants, mais l'expression du syndrome est très variable, et tous ceux héritant du gène ne l'exprimeront pas forcément. Des membres de la famille peuvent être atteints à des degrés de sévérité très différents, voire ne pas être touchés du tout. Le(s) gène(s) peuvent s'exprimer comme un syndrome de la Tourette, comme des tocs atténués (tics chroniques), ou des troubles obsessionnels-compulsifs sans tics. Seule une minorité d'enfants ayant hérité du gène ont des symptômes suffisamment sérieux pour nécessiter une prise en charge médicale. [6] Les hommes ont tendance à exprimer plus de tics que les femmes. [7]

Des facteurs non-génétiques, environnementaux ou infectieux, sans être à l'origine de la maladie, peuvent influer sur sa sévérité. [4] Les processus autoimmuns peuvent déclencher les tics et les exacerber dans certains cas.

Le mécanisme exact provoquant le syndrome de la Tourette reste pour l'instant du domaine de la recherche, et à ce jour, l'étiologie précise est inconnue. Les tics sont supposés résulter de dysfonctionnements dans les régions corticales et subcorticales, dans le thalamus, les ganglions de la base et le cortex frontal.[2] Les modèles neuroanatomiques impliquent des lésions des circuits reliant le cortex et le subcortex dans le cerveau,[4] et les techniques d'imagerie médicale montrent une implication des ganglions de la base et du cortex frontal. [8]

Certaines formes de TOC pourraient être génétiquement liées au syndrome de la Tourette.[9] Un sous-ensemble de TOC est souvent considéré comme étiologiquement lié au syndrome de la Tourette et pourrait être une expression différente des mêmes facteurs qui provoquent l'expression des tics.[10] Le lien génétique entre ADHD et syndrome de la Tourette n'est cependant pas totalement établi.[11]

Le syndrome de Gilles de la Tourette n'évolue jamais vers la démence.

Histoire

Le premier cas de syndrome de la Tourette a été identifié en 1825 par Jean Itard, docteur français, qui a décrit les symptômes de la Marquise de Dampierre, femme importante de la noblesse à l'époque. Jean-Martin Charcot, influent médecin français, confia à Georges Gilles de la Tourette, neurologiste et médecin, l'étude de patients de l'Hôpital de la Salpêtrière, dans le but de définir une maladie distincte de l'hystérie et de la chorée.

En 1885, Gilles de la Tourette publia un rapport sur neuf patients, Étude sur une affection nerveuse, et conclut au besoin de définir une nouvelle catégorie clinique. Le nom choisi par Charcot fut finalement celui de "maladie de Gilles de la Tourette", en hommage à son découvreur.

Pendant un siècle, il n'y eut presque aucun progrès pour expliquer ou traiter les tics caractéristiques du syndrome, et une approche psychiatrique fut privilégiée jusque dans le courant du vingtième siècle. La possibilité que les troubles du mouvement, dont le syndrome de la Tourette, puissent être d'origine organique, ne fut envisagée qu'à partir de 1920, quand une épidémie d'encéphalites entre 1918 et 1926 entraîna ensuite une épidémie de troubles des mouvements et de tics.

Pendant les années 1960 et 1970, l'approche psychanalytique fut remise en question par la découverte de l'halopéridol (Haldol), qui permet d'atténuer les tics. Le tournant eut lieu en 1965, quand Arthur K. Shapiro, considéré comme "le père de la recherche moderne dans le traitement des tics", publia un article critiquant l'approche psychanalytique, après avoir traité grâce à l'halopéridol un patient atteint du syndrome de la Tourette.

Depuis les années 1990, une approche plus nuancée est apparue, et la maladie est généralement considérée comme la combinaison d'une vulnérabilité biologique, et d'une interaction avec des facteurs environnementaux. En 2000, l'Association américaine de psychiatrie a publié le DSM-IV-TR, qui modifie le texte du DSM-IV et n'impose plus dans la liste des symptômes que les tics provoquent une souffrance ou des mouvements incorrects.

Les découvertes depuis 1999 ont surtout eu lieu dans le domaine de la génétique, de l'imagerie cérébrale et de la neurophysiologie. De nombreuses questions restent ouvertes sur la meilleure façon de caractériser le syndrome de la Tourette et sur le degré de proximité avec d'autres troubles des mouvements, ou troubles psychiatriques. Les données épidémiologiques sont encore insuffisantes, et les traitements disponibles pour l'instant ne sont pas sans risques ni toujours bien tolérés par l'organisme.

Épidémiologie

Le syndrome de la Tourette existe parmi toutes les populations humaines, indépendamment du groupe social ou ethnique. Des cas ont été référencés dans toutes les régions du monde, et les hommes sont touchés en moyenne trois à quatre fois plus fréquemment que les femmes. Les tics apparaissent pendant l'enfance, et tendent ensuite à s'estomper ou disparaître à la maturité, si bien que le diagnostic peut être difficile chez les adultes. La prévalence est d'ailleurs nettement plus élevée chez les enfants que chez les adultes. Les enfants ont cinq à vingt fois plus de chances d'être atteints de tics que les adultes, et environ une personne sur cent a connu des tics, en incluant les tics chroniques et les tics temporaires de l'enfance.

Il existe de forts écarts dans les estimations de prévalence entre les études actuelles et les anciennes études, dus à plusieurs facteurs : biais statistiques de l'étude des seuls cas référencés cliniquement, méthodes de diagnostic qui ne détectent pas les cas légers, et différences des critères et des seuils de diagnostic. Il y a eu peu d'études réalisées sur une large échelle communautaire avant les années 2000, et jusqu'aux années 1980, les études épidémiologiques du syndrome de la Tourette étaient basées sur les personnes déjà diagnostiquées dans des cliniques spécialisées. Or, les enfants présentant des symptômes légers ont peu de chances d'avoir été diagnostiqués dans un établissement spécialisé, ce qui a introduit un biais statistique assez systématique en faveur des cas les plus sévères. Les études statistiques du syndrome de la Tourette sont vulnérables aux erreurs, à cause des fortes variations dans l'intensité et la forme des tics, qui sont souvent intermittents, et restent parfois non détectés, même par les médecins, le patient, les membres de sa famille ou ses amis. Environ 20% des personnes atteintes du syndrome de la Tourette déclarent ne pas avoir de tics. Devant la difficulté de détection et de reconnaissance des tics, les études récentes recourent souvent à l'observation directe des salles de classes, et recoupent les témoignages des proches (parents, professeurs, et personnel formé). Ces nouvelles études enregistrent ainsi un nombre plus élevé de cas que les études précédentes, qui se basaient sur des diagnostics cliniques. Le seuil et la méthode de diagnostic évoluant vers une détection accrue des cas légers, on assiste à une augmentation des estimations de prévalence.

On pensait autrefois que le syndrome de la Tourette était une maladie rare : en 1972, le NIH, l'Institut National de la santé aux États-Unis, pensait qu'il y avait moins de 100 cas aux États-Unis, et un registre de 1973 recense seulement 485 cas dans le monde. Cependant, de nombreuses études publiées depuis 2000, ont régulièrement montré que la prévalence est beaucoup plus élevée qu'on ne le croyait. Le consensus qui se dégage serait de 1 à 11 enfants touchés pour 1000, et plusieurs études donnent une fourchette plus précise de 6 à 8 cas pour 1000. Si on utilise les données du recensement de l'an 2000 aux États-Unis, une prévalence de 1 à 10 pour 1000 donne une estimation de 53 000 à 530 000 enfants touchés par le syndrome de la Tourette aux États-unis, et une prévalence de 6 à 10 pour 1000 signifierait de 64 000 à 106 000 enfants entre 5 et 18 ans touchés au Royaume-Uni. La plupart de ces enfants ne sont pas diagnostiqués et présentent des symptômes légers, sans souffrance ni perte de capacité.

Célébrités atteintes du syndrome

  • Jeremy "Twitch" Stenberg, pilote professionnel de motocross
  • Tim Howard, gardien de but de la sélection de football américaine
  • Samuel Johnson, auteur et critique britannique du XVIIIème siècle.

Notes et références

  1. orpha.net
  2. a  et b Walkup JT, Mink JW, Hollenback PJ, (eds). Advances in Neurology, Vol. 99, Tourette Syndrome. Lippincott, Williams & Wilkins, Philadelphia, PA, 2006, p. xv. ISBN 0-7817-9970-8
  3. Robertson MM (2000), p. 425.
  4. a , b  et c Zinner (2000).
  5. Mejia NI, Jankovic J. Secondary tics and tourettism (PDF). Rev Bras Psiquiatr. 2005;27(1):11–17. PMID 15867978
  6. Tourette Syndrome Association. Tourette Syndrome: Frequently Asked Questions, archive du 6 janvier 2006.
  7. Black, KJ. Tourette Syndrome and Other Tic Disorders. eMedicine (22 mars 2006). Copie du 28 juin 2006.
  8. Haber SN, Wolfer D. Basal ganglia peptidergic staining in Tourette syndrome. A follow-up study. Adv Neurol. 1992;58:145–50. PMID 1414617
    * Peterson B, Riddle MA, et al. Reduced basal ganglia volumes in Tourette's syndrome using three-dimensional reconstruction techniques from magnetic resonance images. Neurology. 1993;43:941–49. PMID 8492950
    * Moriarty J, Varma AR, et al. A volumetric MRI study of Gilles de la Tourette's syndrome. Neurology. 1997;49:410-5. PMID 9270569
  9. Pauls DL, Towbin KE, Leckman JF, et al. Gilles de la Tourette's syndrome and obsessive-compulsive disorder. Evidence supporting a genetic relationship. Arch Gen Psychiatry. 1986 Dec;43(12):1180–82. PMID 3465280
  10. Miguel EC, do Rosario-Campos MC, Shavitt RG, et al. The tic-related obsessive-compulsive disorder phenotype and treatment implications. Adv Neurol. 2001;85:43–55. PMID 11530446
  11. Denckla MB. Attention deficit hyperactivity disorder: the childhood co-morbidity that most influences the disability burden in Tourette syndrome. Adv Neurol. 2006;99:17–21. PMID 16536349

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