Sex-ratio à la naissance

Sex-ratio à la naissance

Sex-ratio

Proportion d'hommes par rapport aux femmes dans la population totale par pays.      Population féminine plus importante      Populations masculine et féminine équivalentes      Population masculine plus importante      Données manquantes

Le sex-ratio ou sexe-ratio (SR) désigne le taux comparé de mâle et femelle au sein d'une espèce à reproduction sexuée, pour une génération, ou la descendance d'un individu. C'est un indice biologique important, car la proportion de mâle et femelle peut affecter le succès reproductif. Chez certaines espèces le sex-ratio peut être un indicateur de la température du milieu d'incubation (ex : tortues chez lesquelles le sex-ratio est fortement influencé dans l'oeuf par la température) ou d'exposition à des polluants qui sont aussi des perturbateurs endocriniens.

Le taux de masculinité est la proportion d'hommes dans la population totale (des deux sexes). Le concept est proche du sex ratio, défini comme le rapport du nombre d'hommes et du nombre de femmes ou bien du nombre de femmes et du nombre d'homme.

Le sex-ratio moyen observé chez l'Homme est d'environ 105 à 100, l'excédent de naissances se trouvant chez les mâles[1].

Sommaire

Formule

Taux.de.masculinite = \frac {nombre.d'hommes} {population}\times 100

Sex.ratio =\frac {nombre.d'hommes} {nombre.de.femmes}

ou

Sex.ratio =\frac {nombre.de.femmes} {nombre.d'hommes}

Par âge

Sex ratio par pays, population totale. Le bleu représente la prépondérance des femmes au-delà de la moyenne mondiale de 1,01 ; le rouge l'inverse.
Sex ratio par pays, population de moins de 15 ans.
Sex ratio par pays, population de plus de 65 ans.

Le Sex ratio par âge est le rapport du nombre de garçons au nombre de filles dans une tranche d'âge donnée. À la naissance, il est supérieur à 1 mais varie peu : de 1,03 à 1,07.

En France, il y a environ 105 garçons pour 100 filles à la naissance. En Chine, il naît autour de 120 garçons pour 100 filles.

Pour des raisons biologiques et sociologiques, il est déjà bien différent pour les enfants de moins de cinq ans (le SR5). A partir de trente ans (entre 35[2] à 49 ans[3] en France, contre 25 en 1950), la prépondérance s'inverse et le nombre de femmes l'emporte généralement sur le nombre d'hommes (huit centenaires sur dix sont des femmes), malgré de notables disparités régionales.

Phénomènes mis en avant par le taux de masculinité

Le taux de masculinité permet de mesurer les déséquilibres entre population masculine et féminine.

En Amérique du Nord et en Europe, le sex ratio est d'environ 1,05. En Inde et Asie, plutôt de 1,07.

Ces déséquilibres sont très présents en Chine et en Inde. Dans certaines régions rurales en Inde, on a environ 400 hommes pour 100 femmes.

Les inquiétantes variations au-delà des 1,10 sont récentes : on peut observer des SR5 de 1,20 en 2000 en Chine (et même de 1,32 au Henan, au sud de Pékin), de 1,13 en Corée du Sud, de 1,26 au Penjab, etc.

Les causes en sont :

  • l'avortement sélectif,
  • l'infanticide sélectif (mis au compte des mortes-nées),
  • la négligence infantile sélective (plus de soins portés aux garçons).

Il y a plusieurs explications à cela :

  • dans de nombreuses cultures orientales, lorsque la fille se marie, la famille doit verser une dot à la famille du marié
  • dans la tradition confucéenne, seul le garçon est habilité à perpétuer le culte des ancêtres et à s'occuper de ses parents en fin de vie
  • l'homme hérite du nom et de l'honneur de sa famille alors que la femme perd son nom (remplacé par celui du mari)
  • souvent dans les milieux ruraux, la fille ne peut pas travailler
  • la pauvreté de nombreuses familles en Chine et en Inde les pousse à calculer la rentabilité de leurs enfants, cela renforcé par la politique de l'enfant unique en Chine
  • la possibilité de l'avortement en connaissance du sexe du bébé (bien qu'illégal) facilite l'élimination des bébés filles, (à noter que l'infanticide est assez répandu)
  • les hommes héritent des biens familiaux alors que les femmes n'en ont pas le droit.
  • beaucoup de femmes sont déplacées des campagnes vers les villes, pour être achetées et mariées. (trafic de femmes)

En Chine (1,3 milliard), on estime le déficit à environ quarante millions de femmes. Autant en Inde selon Amartya Sen (lauréat du "prix Nobel d'économie" en 1998) qui a bien analysé les causes et les conséquences d'une telle évolution : sociologiquement, l'enfant mâle est valorisé pour des raisons de patronyme et de culte aux ancêtres ; économiquement, la force de travail d'un garçon et sa « rentabilité » économique sont mieux considérées. D'où, avec la pratique de la restriction sévère de la natalité, ces choix parentaux proches du « sexocide ». La pratique de l'IAC (insémination artificielle entre conjoints) accroît la dérive du sex ratio. La conséquence la plus évidente à terme sera un déséquilibre sur le marché matrimonial.

Pour pallier cette dérive, l'Inde offre une prime aux parents n'ayant qu'une fille, par exemple en Andhra Pradesh (province du sud du Dekkan). Il n'y pas de solution simple en vue tant que la transition démographique ne sera pas effectuée. La situation du Bangladesh, pays où la densité est la plus élevée au monde (près de 1000) et de grande pauvreté, reste préoccupante.

Autre exemple de sex ratio

Pour les copépodes le rapport des sexes (ou sex-ratio) est rarement voisin de 1, mais le plus souvent en faveur des femelles[4].

Histoire

Le débat sur le taux de masculinité apparaît au XVIIIe siècle dans un souci tantôt plutôt scientifique et tantôt davantage théologique. C'est un auteur allemand qui remarque la surreprésentation des garçons à la naissance à cette époque[5].

Au départ, s'interroger sur le phénomène qu'il relève n'est pas une chose évidente, et un certain nombre d'auteurs tels que d'Alembert et Adolphe Quételet estiment qu'il n'y a pas à étudier la question. Parmi les arguments avancés, la surmortalité masculine dans la jeunesse, qui fait disparaître la différence entre filles et garçons avec le temps et transforme donc les spéculations en pur exercice de style. D'après Éric Brian et Marie Jaisson, auteurs contemporains spécialistes du sex ratio, cette vision qui faisait de l'un des deux phénomènes la compensation de l'autre valorisait en fait inconsciemment le modèle monogamique du mariage défendu par l'Église catholique : l'idée qu'il y aurait un équilibre naturel presque magique des deux sexes à l'âge nubile invitait à penser la fidélité conjugale comme une évidence qu'il n'y avait pas de raison de remettre en cause, chacun pouvant trouver un partenaire pour former un couple dans le mariage chrétien[5].

Cette vision n'empêche pas, cependant, le développement d'hypothèses. Pour Laplace, qui compare le taux de masculinité à Paris et à Londres, la variable est déterminée par une cause physique, climatique par exemple. De son côté, Condorcet ne croit pas aux explications déterministes et est le premier à envisager une intervention humaine sur le taux de masculinité dans le cadre d'une politique morale. Mais sa position, pour avoir été rédigée à la main, se perd, ce qui permet la perpétuation des considérations les plus naturalistes au XIXe siècle[5].

Au début du XXe siècle, Maurice Halbwachs se penche à nouveau sur la question à la faveur d'une démographie comparée de l'espèce humaine commandée par une encyclopédie. À la fois disciple d'Émile Durkheim et d'Henri Bergson, il développe une approche mixte qui l'amène à s'interroger sur l'influence de la différence d'âge entre les parents, l'âge étant pour lui un terme médian entre le social et le biologique, et donc tout indiqué pour étudier le problème. Son hypothèse ne tient pas, car il n'y a pas de relation entre le sex ratio et la différence entre l'âge des parents, mais il se distingue néanmoins par son approche qui ne privilégie plus l'explication naturelle[5].

En outre, Maurice Halbwachs est le premier à faire le constat d'une augmentation du taux de masculinité à la fin de la Première Guerre mondiale alors même que depuis 1846 il avait jusqu'alors tendance à diminuer de façon régulière. Depuis lors, les chercheurs ont pu constater une reprise de la baisse tendancielle et une interruption momentanée à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, ce qui laissait entrevoir des variables nouvelles à considérer. Néanmoins, d'après Éric Brian et Marie Jaisson, le débat s'est éteint en faveur du préjugé qui fait du plus grand nombre de garçons à la naissance une constante que ne sauraient remettre en cause les différences géographiques, considérées comme des défauts localisés créés de toute pièce, par exemple par la politique de l'enfant unique en Chine[5].

Pourtant, on connaît désormais plusieurs variables pertinentes, outre les guerres : les naissances en ville sont plus féminines que les naissances à la campagne, peut-être par une promiscuité plus importante et aujourd'hui par une exposition à des perturbateurs endocriniens plus présents en ville qu'ailleurs. Par ailleurs, la légitimité des naissances et le taux de fécondité a également un impact sur le taux de masculinité. Ces données laissent penser que le taux de masculinité à la naissance a à voir avec les variations du degré d'investissement dont fait l'objet la femme enceinte et le nouveau-né selon les milieux. Ainsi, si le taux de masculinité est plus faible au Mexique qu'en France, c'est sans doute parce que la prise en charge de la grossesse s'exerce dans un contexte masculin dans le pays d'Europe alors qu'il est nettement plus féminin en Amérique centrale : en France, la grossesse est médicalisée et les médecins sont avant tout des hommes ; au Mexique, pays marqué par l'émigration masculine, elle est davantage gérée par les femmes de l'environnement de la personne enceinte. Or, les études montrent qu'il y a un net surinvestissement médical et des hommes en faveur des garçons qui vont naître ou viennent de naître[5].

Ces explications interviennent dans un contexte qui voit la remise en cause de la surmortalité des nouveau-nés masculins par les historiens, qui considèrent qu'il y a un biais de déclaration : l'enfant masculin étant plus désiré, la perte de celui-ci à la naissance est davantage déclarée que celle d'une petite fille, qui demeure sous-déclarée[5].

Localement, un autre biais statistique peut provenir d'une sous-déclaration des fausses-couches ou du fait que des nouveau-nés "anormaux" soient tués à la naissance (par exemple chez certaines populations amérindiennes exposées au mercure de l'orpaillage. Traditionnellement, les handicaps physiques qui pourraient affecter la survie en forêt ne sont pas acceptés dans ces tribus)[réf. nécessaire].

Le principe de Fisher

Le principe de Fisher[6] explique pourquoi, pour la plupart des espèces, le sex-ratio est approximativement de 1:1.
Il suppose que le "coût de production" soit identique pour produire un mâle ou une femelle.

William Donald Hamilton donna cette explication fondamentale dans son article "Extraordinary sex ratios" [7] de 1967 :

  1. Supposons que les naissances mâles soient moins fréquentes que les naissances femelles. La population comprend moins de mâles que de femelles.
  2. Un nouveau-né mâle a alors des chances d'accouplement plus élevées qu'une nouveau-née femelle. Par conséquent il peut s'attendre à avoir plus de descendants (qu'une femelle).
  3. Donc les parents génétiquement disposés à produire des mâles ont tendance a avoir un nombre de petits enfants plus élevé que la moyenne.
  4. Par conséquent, les gènes qui tendent à produire des mâles se répandent, et les naissances mâles deviennent plus fréquentes.
  5. Lorsque le sex-ratio s'approche de 1:1, l'avantage donné à la production de mâles diminue jusqu'à disparaître complètement.
  6. Ce raisonnement est identique si les rôles des femelles et des mâles sont inversés.

Par conséquent, 1:1 est le sex-ratio d'équilibre.

En langage moderne, le sex-ratio 1:1 est la stratégie évolutionniste stable.

Notes et références

  1. http://www.nationmaster.com/graph/peo_sex_rat_tot_pop-people-sex-ratio-total-population : détails par pays
  2. Lexique de la Cité des Sciences et de l'Industrie
  3. selon la revue de l'INED Population et sociétés
  4. Sex ratio des Copépodes planctoniques marins
  5. a , b , c , d , e , f  et g Le sexisme de la première heure, Éric Brian et Marie Jaisson, Raison d'agir, octobre 2007 – ISBN 978-2912107369
  6. Ce paragraphe est la traduction de la section "Fisher's principle" de la page en anglais Sex_ratio
  7. Hamilton, W.D. 1967 Extraordinary sex ratios Science 156: 477-488, article en anglais et payant


Bibliographie

François Héran, « Les raisons du sex-ratio. À propos de Le Sexisme de la première heure : hasard et sociologie d'Éric Brian et Marie Jaisson », La Revue internationale des livres et des idées, n° 4, mars-avril 2008 (article en accès libre).

Voir aussi

Lien externe

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