Combat de pont-de-l'arche

Combat de pont-de-l'arche

Combat de Pont-de-l'Arche

Combat de Pont-de-l'Arche
Informations générales
Date 9 juin 1940
Lieu Pont-de-l'Arche, France
Issue victoire allemande marginale
Belligérants
Flag of France.svg France Flag of Germany 1933.svg Allemagne
Commandants
Flag of France.svg Capitaine Huet War Ensign of Germany 1938-1945.svg Général Rommel
Seconde Guerre mondiale,
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Batailles
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Le 9 juin 1940, Pont-de-l'Arche, près de Rouen, fut le cadre d'un héroïque combat de retardement livré par le 4e Groupe franc de cavalerie aux unités d'avant garde de la division Rommel.

Sommaire

Le 4e Groupe franc de cavalerie

Le haut commandement français étant à court d’unités blindés, cinq « Groupes francs motorisés de cavalerie » furent constitués au 1er juin 1940, à Montlhéry où était basé le COMAM (Centre d'organisation de motocyclistes et automitrailleuses).

Ces escadrons autonomes, initialement destinés à renforcer la défense de la Somme, furent finalement déployés aux environs de Rouen le 8 juin pour protéger les ponts de la basse Seine.

Le 4e Groupe franc était commandé par l'énergique capitaine François Huet, héros des combats de Belgique du mois de mai 1940, futur commandant militaire du maquis du Vercors en juin 1944, puis général. Entièrement motorisé, le Groupe Franc, était composé de deux pelotons de canons anti-chars, d'un de mortiers, d’un de mitrailleuses, d’un autre d’automitrailleuses, d'un peloton de motos et d’un de chars (aspirant Guy Dubern, trois chars prototypes Renault de 18 tonnes, canon de 47 mm).

Le 7 juin, les Groupes francs prirent la route en direction de la Somme, via les ponts stratégiques de la Basse Seine situés à l’est de Rouen. Ils étaient parvenus là, dans cette région normande encore épargnée par la guerre et pratiquement non défendue, lorsque, le 8 juin, les nouvelles de l’effondrement du front arrivèrent jusqu’à eux. L’avant garde allemande, la 7e division blindée du général Rommel, n’était plus qu’à quelques heures de route et fonçait vers Rouen. Chaque commandant de Groupe Franc reçut l’ordre de prendre position en avant de l’un de ces ponts, incontournables points de franchissement de la Seine, seulement gardés par quelques réservistes d’un régiment territorial. La mission assignée par le haut commandement était claire : tenir sur la rive droite aussi longtemps que possible, pour permettre le repli d’un maximum de troupes françaises puis couvrir les unités du génie chargées de la destruction des ponts.

Le 4e Groupe Franc de Huet prit position dans le bourg situé en avant des ponts routier et de chemin de fer de Pont-de-l’Arche, Igoville. L’un des trois chars était en panne, sur son porte engins, les moyens étant comptés. Un régiment d’infanterie britannique, déployé à quelques kilomètres au nord, devait tenir les hauteurs, en zone rurale, puis se replier vers le bourg et le pont pour renforcer le Groupe Franc. Huet lui envoya en début de soirée un officier de liaison, à bord d’un side-car, qui revint bientôt avec des renseignements sur l’avance allemande. Quelques heures plus tard pourtant, à la liaison suivante, le régiment allié avait disparu sans prévenir, vraisemblablement vers un autre pont. Sans avoir rencontré la moindre résistance, l’ennemi commençait silencieusement à prendre le contrôle de la crête. Au cœur de la nuit du 8 au 9 juin, allait s’engager, en zone urbaine et industrielle, l’action de retardement de Pont-de-l'Arche.

Ce combat peu connu, livré à l’avant garde de la division blindée Rommel par le capitaine Huet et une centaine de jeunes gens, préfigure assez bien la défense de Saumur par les cadets quelques jours plus tard. Avec quelques canons anti-chars et mitrailleuses il tenait le bourg, soutenu par l’élément blindé mobile que constituaient sa poignée d’automitrailleuses et ses deux chars valides. Au final, lorsque le jour fut levé, que les munitions eurent été pratiquement dépensées et que l’ordre de destruction du pont lui parvint, Huet se résigna à organiser le repli de ses pelotons et à faire traverser in extremis autant de ses hommes que possible. Mais le combat n’était pas terminé.

Parce qu’il fallait bien une arrière garde au Groupe Franc pour gagner le temps nécessaire au repli, les deux chars qui défendaient l’entrée du bourg, demeurèrent sur la rive droite de la Seine, pont coupé. Un régiment d’infanterie de la division Rommel, sur side-cars, soutenu par des canons anti-chars, commençait à s’infiltrer dans les ruelles et le feu était nourri. Le char de l'aspirant Dubern ayant été touché à plusieurs reprises par des balles incendiaires, il lui fallut sortir de son blindé sous les tirs adverses pour les éteindre avec ses pieds et ses mains. Les instruments optiques de son char ayant été mis hors d’usage par un obus, il continuait à effectuer les visées et à commander le feu tourelle ouverte, jusqu’à épuisement des munitions. Lorsque ce moment fut sur le point d’arriver, chacun des chars avait tiré plus de 90 obus et des milliers de balles de mitrailleuse lourde. La position devenant indéfendable, les deux chars se regroupèrent vers la sortie du bourg, aussi près que possible de la Seine. Pour s’extraire des engins, l’aspirant Lepage, second de Dubern, donna l’exemple d’une idée astucieuse : percer doucement le mur d’une maison en marche arrière et y abriter le blindé. Avant de s’en aller, les équipages incendièrent leurs chars avec ce qui leur restait d’essence, pour les rendre inutilisables, puis les six cavaliers, légèrement armés, entamèrent leur retraite. Par bonds successifs ils parvinrent à franchir, sous le feu allemand, les dernières rues, puis les prairies de la berge, jusqu’au fleuve. Là, ils se dispersèrent pour accroître leurs chances de traverser la Seine, à l’exception d’un cavalier ne sachant pas nager qui, équipé d’autorité d’une chambre à air en guise de bouée, traversa avec le meilleur nageur, Lepage.

Les six passèrent tous mais, dispersés sur la rive gauche au cours des heures suivantes, ne rejoignirent que progressivement le 4e Groupe Franc, toujours parfaitement opérationnel. Le capitaine Huet accueillit ces hommes, portés disparus, avec émotion. “Pour le baroud ”, dans l’esprit de Saumur, les deux chars des aspirants Dubern et Lepage étaient parvenus sans soutien extérieur à stopper Rommel, pendant 2 heures 30, et le général allemand évoque ce “ surprenant retard ” dans ses mémoires. Il précise même s’être approché en personne avec des jumelles pour essayer de comprendre la situation. Les deux aspirants furent cités à l'ordre de l'armée pour cette action, qui était leur baptême du feu.

Le 4e Groupe Franc poursuivit ses actions de retardement jusqu’à l’armistice du 22 juin 1940, de façon parfaitement ordonnée, mais handicapé par une mission annexe de protection de l’État-major du général de La Laurencie. Le commandement français s’effondrait, mais Huet demeurait d’une énergie imperturbable et défendait avec ses moyens toutes les positions qui pouvaient l’être. Plusieurs fois il reçut avec colère l’ordre de décrocher et de revenir escorter l’État-major du général qui battait en retraite. Le 4e Groupe Franc s’illustra particulièrement sur la Loire, en tenant les ponts du Lyon d’Angers, bloquant les infiltrations blindées ennemies, sous de forts bombardements d’artillerie et de Stukas. Lorsque l’armistice arriva, le Groupe Franc avait pratiquement atteint la Garonne.

Ordre de bataille des 5 Groupes Francs de Cavalerie le 8 juin 1940

  • GFC n°1 = capitaine de Neuchèze. 1 compagnie d'infanterie motorisée, 1 peloton de mortiers, 1 peloton de canons anti-chars de 25mm, 4 blindés Panhard 178, 5 chars Hotchkiss et 7 AMC-35.
  • GFC n°2 = lieutenant Huot. 1 peloton de motos, 2 pelotons de canons anti-chars de 47mm, 2 blindés, 2 chars Somua S-35.
  • GFC n°3 = ??
  • GFC n°4 = capitaine Huet. 8 officiers, 19 sous-officiers et 150 cavaliers ; 1 peloton de commandement, 1 de motos, 1 de mortiers, 1 de mitrailleuses, 2 canons anti-chars de 47mm et 2 de 25mm, 1 peloton d'auto-mitrailleuses, 2 AMC-35.
  • GCF n°5 = capitaine Ricaud. 8 officiers, 241 sous-officiers et cavaliers ; 2 canons anti-chars de 47mm et 2 de 25mm, 5 chars Somua S-35, 5 blindés Panhard 178, 6 mitrailleuses lourdes et 10 légères, 4 véhicules de commandement, 4 halftracks, 14 camions légers GMC, 2 camion de munitions pour les canons anti-chars, 4 véhicules spécialisée (radio, téléphone, maintenance et cuisine de campagne), 10 motocyclettes, 25 side-cars.

Huet et Ricaud venaient de combattre deux semaines en Belgique, puis dans le Nord-Pas de Calais, chacun à la la tête d'un escadron du 1er GRDI (groupe de reconnaissance de la 5e DIM), régiment commandé par le colonel Préaud. Le 1er GRDI disparut le 31 mai 1940 et une partie de ses hommes et matériels furent affectés aux 4e et 5e GFC.

François Huet

Brillant saint-cyrien, François Huet (1905 + 1968) séjourne longuement au Maroc avant guerre. L’influence de Lyautey marquera profondément sa vision du rôle de l’officier. Au cours des campagnes de Belgique et de France, il se montre un chef incomparable d’audace et de sang-froid. Après l'armistice, le capitaine Huet est chargé de commander un escadron de Saint-Cyr, repliée à Aix-en-Provence (école commandée par le colonel, puis général Préaud). Il dirige ensuite la mission de liaison entre l’armée et les Chantiers de jeunesse. Il apparaît comme le symbole d’une génération d’officiers qui assuma le rôle ingrat de tirer toutes les conséquences du désastre militaire, dans le seul souci de forger des hommes pour la Revanche. Secrétaire général des “Compagnons de France”, pépinière de futurs résistants, et responsable du réseau “Alliance”, animé par Marie-Madeleine Fourcade, il sera en 1944 l’organisateur et l’âme de l’héroïque lutte qui opposa le maquis du Vercors à une puissante force allemande. Général de brigade en 1956, chef de la 7e division mécanique rapide en Algérie, général de corps d’armée en 1962, commandant la région militaire de Lille, il disparaît en 1968, laissant à tous ceux qui l’ont connu, selon un mot du maréchal Koenig, « mieux qu’un souvenir et qu’un nom, une clarté ».

Comme François Huet, le capitaine de Neuchèze (1904 + 1944), commandant le 1er GFC, fut un cadre éminent de la Résistance au sein de l'armée d'armistice (camouflage de matériel militaire, etc.) puis, après novembre 1942, sous couverture des Eaux-et-Forêts (responsable de la Résistance militaire dans le Gers). Arrêté, évadé, puis passé en Afrique du Nord à bord d'un sous-marin en septembre 1943, il fut promu commandant et débarqua en Provence avec le 2e Dragons en août 1944. Il tomba pour la France près d'Autun en septembre 1944.

Il faut encore citer le lieutenant Pierre Heilbronn, commandant le 2e GFC, chevalier de la Légion d'honneur en 1918 à l’âge de 23 ans, tué le 9 juin 1940 et promu officier de la Légion d’honneur avec la citation suivante « Officier d’un courage éprouvé. S’est brillamment conduit au cours des combats qui eurent lieu au pont des Andelys. A été pour ses hommes, le plus bel exemple de courage et de sang froid. Chargé de la défense de la Seine a trouvé une mort glorieuse en dirigeant personnellement le tir de ses canons anti chars ».

Sources

  • René-Gustave Nobécourt, Les Soldats de 40 dans la première bataille de Normandie, Bertout, Luneray, 1986, 397 p. (ISBN 286-743-045-3)  ;
  • François Broche, François Huet, chef militaire du Vercors 1944 - Une vie au service de la France, préface d’Henri Amouroux, Éditions Italiques, 2004 ;
  • aspirant Guy Dubern, lettres à ses parents, 1940 (états de service et documents sur le GFC n°4) ; M. Dubern servit comme chef de peloton au sein de la 1re DB en 1944-45 ;
  • lieutenant Robert Marius Gueiroard, "Tank Fighter Team", 1943, utilisé pour l'entraînement des troupes américaines ; M. Gueiroard, vétéran du GFC n°5, émigra aux États-Unis où il servit comme officier instructeur.
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