Economie de marche

Economie de marche

Économie de marché

Une économie de marché est un système économique où les biens et services sont échangés sur la base des prix relatifs grâce au mécanisme de l'offre et de la demande. Pour Robert Gilpin la dynamique de l'économie de marché tient non seulement aux prix relatifs mais également à l'importance accordée à la concurrence et à l'efficience dans l'activité économique[N 1]. Cette dynamique[1] favorise la croissance économique et l'extension géographique de l'économie de marché au-delà des frontières politiques des États. En général les auteurs (notamment Robert Gilpin et Fernand Braudel), distinguent assez nettement l'économie de marché du capitalisme. Pour Roger Guesnerie[N 2], il vaudrait mieux parler des économies de marchés plutôt de l'économie de marché, tant le système est dépendant des institutions très diverses qui soutiennent les marchés. Dans cette perspective, après la seconde guerre mondiale, la nécessité de prendre en compte les aspects sociaux a conduit à une généralisation de l'économie sociale de marché elle-même déclinée de façons différentes selon les pays. De nos jours, l'importance croissante accordée à l'environnement peut laisser penser [N 3] qu'une économie durable de marché voire une économie sociale et durable de marché pourraient voir le jour.

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Voir « économie de marché » sur le Wiktionnaire.

Sommaire

Économie de marché et capitalisme

Pour Robert Gilpin[N 4] l'essence du marché réside dans le rôle des prix relatifs dans le processus d'allocation tandis que celle du capitalisme réside dans la propriété privée des moyens de production. Au niveau théorique, une économie socialiste de marché composée d'acteurs publics et de travailleur non libres est pour lui concevable comme cela est envisagé dans le concept d'économie socialiste de marché[N 5]

Pour Fernand Braudel, il existe une tripartition : vie matérielle, économie de marché et capitalisme. Pour lui « le capitalisme dérive par excellence des activités économiques au sommet ou qui tendent vers le sommet. En conséquence, ce capitalisme de haut vol flotte sur la double épaisseur sous-jacente de la vie matérielle et de l'économie cohérente de marché, il représente la zone de haut profit »[2]. D'une façon générale Braudel[3] distingue deux types d'échanges « l'un terre à terre, concurrentiel puisque transparent » qui relève de l'économie de marché et l'autre « l'autre supérieur, sophistiqué, dominant » qui relève du capitalisme qui pour cet auteur est très lié à l'État

Fonctionnement

Ce système économique est une des formes du capitalisme, dans la mesure où il fonctionne sur la base d'investissements d'origine privée.

L'économie de marché est souvent associée au libéralisme économique. Il existe néanmoins plusieurs formes d'économie de marché, plus ou moins régulées par l'intervention publique. On peut citer l'économie sociale de marché, telle qu'elle est conçue par les sociaux-démocrates européens (Allemagne, Suède...).

L'économie de marché s'arrête difficilement au niveau d'un seul pays, si vaste soit-il. Au niveau international, elle est d'autant plus développée que les divers pays pratiquent le libre-échange.

Pratiquement tous les pays fonctionnent aujourd'hui à des degrés divers sur les bases de l'économie de marché, même si certains pays issus du collectivisme ne le revendiquent pas : la Chine s'est elle-même dénommée « Économie socialiste de marché », mais il s'agit en réalité d'une économie capitaliste étatisée et bureaucratisée.

L'économie de marché est différente de l'économie de troc, de l'économie planifiée et de l'économie théorisée du socialisme.

Elle coexiste avec :

  • l'économie souterraine qui est l'ensemble des activités productrices de biens et services qui échappent au contrôle de l'État (trafic de drogue, travail au noir, proxénétisme).
  • l'économie domestique (ex : le potager, le babysitting non rémunéré, les femmes au foyer... c’est-à-dire tout ce qui n'est pas comptabilisé de façon claire économiquement mais qui permet de contourner l'économie habituelle : acheter ses légumes, embaucher une nourrice...). Lorsque celle-ci représente une part importante de l'activité productrice, comme cela reste le cas dans certaines zones rurales du tiers monde relativement à l'écart des flux économiques, on parle d'économie de subsistance.
  • l'économie sociale.
  • le commerce équitable.
  • l'économie publique.


L'économie de marché en France

Michel Rocard se targue souvent « d'avoir mis des décennies à apprendre l'économie de marché aux socialistes »[4]. Dans ce pays, c'est avec le tournant de la rigueur survenu en 1983 que la gauche réformiste accepte de facto l' économie sociale de marché. Le retour de la droite en 1986 voit le début des grandes privatisations, et une déréglementation partielle des marchés financiers. Les privatisations ont été menées ensuite par des gouvernements de droite comme de gauche : elles ont rapporté pour 100 milliards de francs sous le gouvernement de Jacques Chirac (1986-1988), 40 milliards sous le gouvernement d'Alain Juppé, et 210 milliards sous le gouvernement de Lionel Jospin.

L'économie sociale de marché

Article connexe : économie sociale de marché.

Au départ, il s'agit d'un concept et d'une pratique liée à l'Ordo-libéralisme. De nos jours, cette expression est employée dans un sens plus large. Par exemple, Mario Monti[5] distingue les économies de marché de type Anglo-saxon des économies sociales de marché allemande ou française. Par économie sociale de marché, il entend une économie de marché soucieuse de financer la protection sociale par une imposition redistributive ainsi qu'un certain activisme des gouvernements et des Institutions européennes en faveur de l'économie dans le respect des règles européenne de la concurrence.

Économie de marché et développement durable

L'économie de marché non régulée n'est pas forcément compatible avec les exigences du développement durable. En effet, la recherche de la maximisation du profit par les entreprises ne va pas spontanément dans le sens d'un développement durable, car elle conduit à des raisonnements de court terme, et elle tend à la satisfaction des intérêts des seuls actionnaires des entreprises.

La perspective de l'Église catholique

L'encyclique Caritas in Veritate de Benoît XVI (juillet 2009) indique que les acteurs de la vie économique ne peuvent se limiter au marché seul, mais que l'économie doit aussi impliquer l'État et la société civile :

« La vie économique a sans aucun doute besoin du contrat pour réglementer les relations d’échange entre valeurs équivalentes. Mais elle a tout autant besoin de lois justes et de formes de redistribution guidées par la politique, ainsi que d’œuvres qui soient marquées par l’esprit du don. L’économie mondialisée semble privilégier la première logique, celle de l’échange contractuel mais, directement ou indirectement, elle montre qu’elle a aussi besoin des deux autres, de la logique politique et de la logique du don sans contrepartie.
Mon prédécesseur Jean-Paul II avait signalé cette problématique quand, dans Centesimus annus, il avait relevé la nécessité d’un système impliquant trois sujets : le marché, l’État et la société civile. »[6]

L'État

Article connexe : État.

L'intervention de l'État, qui représente les intérêts publics, est nécessaire. Elle se fait actuellement de la façon suivante :

  • Définir de nouvelles règles du jeu :
    • C'est ainsi qu'en France, l'État a demandé par la loi que les entreprises cotées en bourse rendent comptent des conséquences sociales et environnementales de leur activité (article 116 de la loi sur les Nouvelles Régulations Économiques),
    • L'État a défini un bonus-malus écologique pour les véhicules automobiles,
    • Mettre en place une finance du carbone.

Toutefois, les études qui ont été faites sur la mise en œuvre de la loi sur les Nouvelles Régulations Économiques en France ont montré qu'assez peu d'entreprises se conformaient réellement aux exigences de la loi. En effet, le non-respect de la loi n'entraîne aucune sanction vis-à-vis des entreprises. Il s'agit d'un droit mou.

On pourrait imaginer d'autres actions des États :

La société civile

Article connexe : société civile.

La société civile intervient par l'intermédiaire de ses représentants, organisés en parties prenantes (organisations professionnelles, organisations syndicales, organisations non gouvernementales, ...). Par exemple, en matière environnementale, les parties prenantes représentatives sont les ONG environnementales (WWF, Amis de la Terre, ...).

Les parties prenantes peuvent se concevoir par rapport aux autorités politiques, ou bien par rapport aux entreprises.

La perspective sociale libérale

Par rapport à la perspective catholique, les sociaux-libéraux s'interrogent sur la notion même d'État. La distinction société civile/État leur pose un problème car elle suppose, à la manière de ce qui existe dans l'Église, une prépondérance donnée à la hiérarchie de l'État sur les citoyens.

Critique du terme

Pour l'économiste Jacques Sapir ce terme « n'appartient pas à la tradition économique, mais bel et bien au vocabulaire politique [...] le terme d'"économie de marché" ne renvoie donc à rien de précis sur le plan scientifique. »[7]

Notes et références

Notes

  1. « Three charactéristics of a market economy are responsible for its dynamic nature (1) the critical role of relative prices in the exchange of goods and servives, (2) the centrality of competition as a determinant of individual and institutional behavior, and (3) the importance of efficiency in determining the survivability of economic actors » in Gilpin, 1987, p.19
  2. « À l'aune de l'esquisse qui est faite ici d'une économie de marché -des marchés appuyés sur la monnaie et le droit-, nombre d'économies historiquement datées ont droit au label d'économies de marché » Guesnerie, p.25
  3. Sur ce point on pourra se reporter à l'article sur Nicholas Stern
  4. « The concept of "market is thus broarder than that of "capitalism". The essence of a market, defined in greater detail below, is the central role of relative prices in allocative decisions. The essence of capitalism, as noted above, is the private ownership of the means of production and the existence of free labor » cité in Gilpin p.16
  5. « Theoretically, a market system could be composed of public actors and unfree labor as envisioned in the concept of market socialism »cité in Gilpin, 1987, p.16

références

  1. Gilpin, 1987, pp.19-20
  2. Braudel, p.117
  3. Braudel, p.66
  4. Les Echos du 26/08/2009, p.28
  5. Le Monde des 7 et 8 juin 2009, M.Monti : "Relancer l'Europe en réconciliant marché et social", propos recueillis par Arnaud Leparmentier
  6. Encyclique Caritas in Veritate, chapitre III, § 37 et 38
  7. Jacques Sapir, La Fin de l'eurolibéralisme, Le Seuil, 2006, p. 82.

Bibliographie

  • Robert Gilpin, 1987, The Political Economy of International Relation, Princeton University Press.
  • Fernand Braudel, 1985, La dynamique du capitalisme, Paris, Arthaud, 1985 (ISBN 2080811924)
  • Roger Guesnerie 2006, L'économie de marché, Le pommier.
  • Michel Lafitte, 2007,développement durable et économie de marché, (ISBN 2863254782)
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