Henri Guillemin

Henri Guillemin
Henri Guillemin
Portrait par Erling Mandelmann (1980)
Portrait par Erling Mandelmann (1980)

Activités Critique littéraire, historien
Naissance 19 mars 1903
à Mâcon (France)
Décès 4 mai 1992
à Neuchâtel (Suisse)
Langue d'écriture Français
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Henri Guillemin, né le 19 mars 1903 à Mâcon et décédé le 4 mai 1992 à Neuchâtel en Suisse, est un historien et un polémiste français considéré comme anticonformiste.

Sommaire

Biographie

Fils d'un agent voyer, pur produit de la méritocratie républicaine[1], Guillemin est d'abord élève au lycée Lamartine de Mâcon avant d'intégrer le lycée du Parc de Lyon, puis l'École normale supérieure en 1924 (27e sur 30). En 1923, il devient le secrétaire de Marc Sangnier et s’engage résolument en faveur du catholicisme social. Rue d'Ulm, il se lie d'amitié avec Jean-Paul Sartre.

Agrégé de Lettres en 1927, il enseigne pendant huit ans au lycée tout en consacrant sa thèse (sous la direction de Daniel Mornet) au Jocelyn de Lamartine. À trente-trois ans, il est nommé professeur à l’université du Caire (d'octobre 1936 à juin 1938), puis à l'université de Bordeaux (1938-1941). La guerre et l'occupation mettent fin à ce parcours jusque là académique : dénoncé par Je suis partout, au moment de la publication de son livre sur Rousseau, Cette affaire infernale, Guillemin fuit la France en juillet 1942 et se réfugie en Suisse à Neuchâtel[2]. À la Libération, après avoir tenté, en vain, d'obtenir un poste à la Sorbonne, il devient attaché culturel à l'ambassade de France de Berne (jusqu'à sa retraite, en 1962). Il partage ensuite sa vie entre la France et la Suisse.

Narrateur hors pair et passionné, il excellait dans l’art de la conférence et a enregistré plusieurs conférences historiques pour la Télévision suisse romande (notamment Jean Jaurès en 1962; 18 clips d'env. 30 min chacun sur Napoléon Bonaparte, dont 3 ont été perdus, en 1968; Léon Tolstoï en 1969; Jeanne d'Arc en 1970; la Commune de Paris en 13 clips en 1971) et pour la Radio Suisse Romande. En 1982, il enregistre une série de huit conférences (d'à peu près 30 min chacune) sur Pétain et Vichy également pour la Télévision suisse romande dans le cadre de l'émission Les dossiers de l'histoire. Radio-Canada a aussi diffusé en 1968 Napoléon vu par Guillemin, une série de 3 conférences sur Napoléon Bonaparte, sa vie, son œuvre, ; l'énigme Jeanne-d'Arc, série composée de plusieurs épisodes, a été diffusée en 1971 tandis que Portraits de révolutionnaires (Lénine, Staline) a été diffusée en 1983. Il est à noter que les téléspectateurs français n'ont guère eu accès au talent oratoire de Guillemin, dont l'anticonformisme gênait - le mot est faible - l'O.R.T.F. (il faut ainsi attendre 2005 pour que la chaîne Histoire diffuse l'intégralité de ses émissions sur Napoléon)[3].

Il était marié à Jacqueline Rödel, fille de l'ancien secrétaire du Sillon Jacques Rödel. Son témoin de mariage était François Mauriac.

Une œuvre éclectique

Henri Guillemin est avant tout un spécialiste du XIXe siècle, qu'il aborde au départ par la littérature (sa thèse sur Lamartine en 1936, puis ses travaux sur Flaubert, Victor Hugo, Zola ou Jules Vallès). Il poursuit ensuite ses recherches sur l'histoire du XIXe siècle, notamment sur la question sociale sous la IIe République et les relations entre l'Église et l'État (Histoire des catholiques français au XIXe siècle, 1947). Pour Guillemin, l'histoire doit être au service du peuple, non des puissants. Dans la plupart de ses livres (sa trilogie sur la guerre de 1870 ou encore son analyse de l'affaire Pétain), il met en évidence la responsabilité des élites politiques (gauche et droite) et financières (« les gens de bien »), qui à deux reprises, en 1870 et en 1940, ont fait le choix de la défaite (en préférant l'ennemi extérieur) pour mieux écraser le peuple, « l'ennemi intérieur. » Prenant le contre-pied de ce qu'il appelle « l'histoire bienpensante », il n'hésite pas à écorner les mythes (comme Napoléon).

Très éclectique, son œuvre s'intéresse autant à des grandes figures révolutionnaires qu'à des grands noms de la littérature qu'il n'hésite pas à malmener (Benjamin Constant, Alfred de Vigny). On lui a d'ailleurs reproché de « détruire de grands noms par des petits moyens ». De ses coups de cœur, ressort le portrait d'un Guillemin anticlérical, chrétien de gauche, exigeant dans ses admirations, mais, aux dires de certains historiens, peu exigeant sur la méthode historique. La médiéviste Régine Pernoud à propos de son ouvrage sur Jeanne d'Arc n'hésitera d'ailleurs pas à parler à son propos d'« antihistoire » dans Jeanne devant les cauchons (éditions du Seuil, 1970)[4].

Soixante ans de travail

Les Éditions d'Utovie sont devenues l'éditeur exclusif des œuvres de Henri Guillemin. Elles remettent à disposition l'ensemble des ouvrages parus - plus de quatre-vingt - dont la plupart étaient devenus introuvables.

  • Le Jocelyn de Lamartine. Étude historique et critique avec des documents inédits, Paris, Boivin, 1936, 858 p.
  • Les visions. Poème inachevé de Lamartine (thèse complémentaire pour le doctorat ès-Lettres), Paris, Les Belles Lettres, 1936, 255 p.
  • Flaubert devant la vie et devant Dieu, Paris, Plon, 1939, 235 p. Préface de François Mauriac. Réédition Utovie.
  • Lamartine, l’homme et l’œuvre, Paris, Boivin, 1940, 166 p. Réédition Utovie.
  • Une histoire de l’autre monde, Neuchâtel, Ides et Calendes, 1942. Réédition Utovie.
  • Connaissance de Lamartine, Fribourg, Bibliothèque de l’université, 1942, 312 p. Réédition Utovie.
  • « Cette affaire infernale ». Les philosophes contre Jean-Jacques. L’affaire Rousseau-David Hume, 1766, Paris, Plon, 1942. Réédition Utovie.
  • Un homme, deux ombres (Jean-Jacques, Julie, Sophie), Genève, Au milieu du monde, 1943, 323 p. Réédition Utovie.
  • Les affaires de l’Ermitage, 1756-1757, Genève, Annales Jean-Jacques Rousseau, 1943.
  • La bataille de Dieu. Lamennais, Lamartine, Ozanam, Hugo, Genève, Au milieu du monde, 1944, 246 p. Réédition Utovie.
  • Les écrivains français et la Pologne, Genève, Au milieu du monde, 1945.
  • Sous le pseudonyme de Cassius : La vérité sur l’affaire Pétain, Genève, Au milieu du monde, 1945, 218 p. Réédition Utovie.
  • Rappelle toi, petit, Porrentruy, Portes de France, 1945. Réédition Utovie.
  • Lamartine et la question sociale, Paris, Laffont, 1946. Réédition Utovie.
  • Histoire des catholiques français au XIXe siècle (1815-1905), Genève, Au milieu du monde, 1947, 393 p. Réédition Utovie.
  • Lamartine en 1848, Paris, P.U., 1948. Réédition Utovie.
  • La tragédie de Quarante Huit, Genève, Au Milieu du Monde, 1948.
  • Cette nuit-là, Neuchâtel, Le Griffon, 1949. Réédition Utovie.
  • L’humour de Victor Hugo, Boudry, La Baconnière, 1951.
  • Victor Hugo par lui-même, Paris, Le Seuil, « Ecrivains de toujours », 1951, 190 p.
  • Victor Hugo. Pierres (vers et prose), Genève, Éditions du Milieu du monde, 1951.
  • Le coup du 2 décembre, Paris, Gallimard, 1951. Réédition Utovie.
  • Victor Hugo et la sexualité, Paris, Gallimard, 1954.
  • M. de Vigny homme d'ordre et poète. N.R.F. Gallimard 1955, in- 12 de 202 pp. + 3 ff. non chiffrés. Fac-similé, en frontispice, d'une page du manuscrit de Vigny. H. Guillemin donne les preuves que Vigny fut indicateur de police (voir le dossier dédicaces). C'est un portrait bien curieux et bien inattendu d'Alfred de Vigny que celui qui émerge de ce livre. Henri Guillemin, grâce à de nombreux documents inédits, enfin mis au jour, nous restitue la figure complexe et assez inquiétante du poète des Destinées. La révélation capitale de cette étude est celle du rôle (qu'on n'imaginait guère) que Vigny joua spontanément, dans une espèce de passion civique, auprès de la police impériale, qu'il renseigna, pendant plusieurs années, sur les « mauvais esprits » et gens dangereux de la région charentaise où il avait ses terres. On trouvera ici en outre un important supplément au Journal d'un Poète, des indications précieuses sur la genèse des Destinées, des projets de poèmes, des notes pour Daphné et pour les Mémoires, et une vingtaine de lettres inédites.
  • Claudel et son art d’écrire, Paris, Gallimard, 1955.
  • Les origines de la Commune. Tome I : Cette curieuse guerre de 70. Thiers - Trochu - Bazaine, Paris, Gallimard, 1956, 266 p. Réédition Utovie.
  • A vrai dire, Paris, Gallimard, 1956, 214 p. Guillemin y reprend contre André Gide les accusations portées deux ans plus tôt dans son article « A propos du Journal de Gide », Journal de Genève, 9 janvier 1954, page 3. André Gide aurait, en 1946, dissimulé des passages collaborationnistes de son Journal publiés en 1940. Comme le remarqua très vite Henri Massis, l'accusation ne tient pas, Guillemin ayant mélangé les textes des deux périodes.
  • Benjamin Constant muscadin, Paris, Gallimard, 1958.Réédition Utovie.
  • Madame de Staël, Benjamin Constant et Napoléon, Paris, Plon, 1959, 210 p.
  • Les origines de la Commune. Tome II : L’héroïque défense de Paris, Paris, Gallimard, 1959. Réédition Utovie.
  • Zola, légende et vérité, Paris, Julliard, 1960, 193 p. Réédition Utovie.
  • Les origines de la Commune. Tome III : La capitulation, Paris, Gallimard, 1960. Réédition Utovie.
  • Éclaircissements, Paris, Gallimard, 1961.
  • L’énigme Esterhazy, Paris, Gallimard, 1962, 263 p. Réédition Utovie.
  • Présentation des Rougon-Macquart, Paris, Gallimard, 1964.
  • L’homme des Mémoires d’Outre-Tombe, Paris, Gallimard, 1965. Réédition Utovie.
  • L’arrière-pensée de Jaurès, Paris, Gallimard, 1966, 235 p. Réédition Utovie.
  • La première résurrection de la République, 24 février 1848, Paris, Gallimard, 1967. Réédition Utovie.
  • Le « converti ». Paul Claudel, Paris, Gallimard, 1968, 242 p. Réédition Utovie.
  • Pas à pas, Paris, Gallimard, 1969.
  • Napoléon tel quel, Paris, Trévise, 1969, 153 p. Réédition Utovie.
  • Jeanne, dite Jeanne d’Arc, Paris, Gallimard, 1970. Réédition Utovie.
  • L’avènement de Monsieur Thiers, suivi de Réflexions sur la Commune, Paris, Gallimard, 1971. Réédition Utovie.
  • La liaison Musset-Sand, Paris, Gallimard, 1972. Réédition Utovie.
  • Précisions, Paris, Gallimard, 1973.
  • Nationalistes et nationaux (1870-1940), Paris, Gallimard, « Idées », 1974, 476 p.
  • Regards sur Bernanos, Paris, Gallimard, 1976.
  • Sullivan ou la parole libératrice, Paris, Gallimard, 1977.
  • Victor Hugo, Paris, Le Seuil, 1978.
  • Charles Péguy, Paris, Le Seuil, 1981.
  • L’affaire Jésus, Paris, Le Seuil, 1982, 152 p.
  • Le général clair-obscur, Paris, Le Seuil, 1984.
  • L’engloutie. Adèle, fille de Victor Hugo, Paris, Le Seuil, 1985, 158 p.
  • Robespierre, politique et mystique, Paris, Le Seuil, 1987, 422 p.
  • Silence aux pauvres !, Paris, Arléa, 1989, 120 p.
  • Vérités complémentaires, Paris, Le Seuil, 1990, 386 p.
  • Du courtisan à l’insurgé. Vallès et l’argent, Paris, Arléa, 1990, 164 p.
  • La cause de Dieu. Essai, Paris, Arléa, 1990, 215 p.
  • Regards sur Nietzsche, Paris, Le Seuil, 1991, 310 p.
  • Une certaine espérance. Conversations avec Jean Lacouture, Paris, Arléa, 1992, 186 p. Réédition Utovie.
  • Malheureuse Église, Paris, Le Seuil, 1992, 250 p.
  • Les passions d’Henri Guillemin, Boudry, La Baconnière, 1994, 448 p.

Les conférences audio sont également éditées en livre + CD par les Éditions d'Utovie.

Autour d'Henri Guillemin

  • Patrick Berthier, Le cas Guillemin, Paris, Gallimard, 1979, 243 p.
  • Patrick Berthier, « Retour au « cas » Guillemin », Revue historique neuchâteloise, 2005/4, 321-340.
  • Maurice Maringue, Henri Guillemin le passionné, Éditions de l'Armançon, 1994, 152 p. Préface de François Mitterrand.

Notes et références

  1. « Guillemin/Hugo »
  2. (fr)Pascale Pellerin, « Rousseau, une dissidence spirituelle sous l'Occupation », sur rousseaustudies.free.fr
  3. (fr)« Le conférencier passionnant et passionné », sur pagespro-orange.fr : « Vous pouvez constater que l'O.R.T.F. me tient toujours, ou à peu près, pour un pestiféré. Mais, en revanche, je travaille constamment avec le Canada, la Belgique, la Suisse. » (lettre d'Henri Guillemin, 1965)
  4. « Jeanne dite "Jeanne d'Arc" »

Liens externes


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