Hugue capet

Hugue capet

Hugues Capet

Hugues Capet
Roi des Francs
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Gravure d'Hugues Capet face à un vassal, par Alphonse-Marie-Adolphe de Neuville, 1883.

Règne
juillet 987 ? - 24 octobre 996
Sacre en juin ou le 3 juillet 987?
Dynastie Capétiens
Titre complet Roi des Francs
Prédécesseur Louis V
Successeur Robert II
Héritier Robert II Red crown.png

Autres fonctions
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Biographie
Naissance vers 940
Décès 24 octobre 996
au lieu-dit « Les Juifs », près de Prasville (Eure-et-Loir).
Père Hugues le Grand
Mère Hedwige de Saxe
Conjoint(s) Adélaïde de Poitiers
Descendance Gisèle (v.968 - v. 1000)
Edwige (v. 969 - 1013)
Robert II Red crown.png (v. 972 - 1031)
Adélaïde (v. 973 - 1068?)

Rois des Francs

Hugues Capet (né vers 940, mort au lieu-dit « Les Juifs », près de Prasville (Eure-et-Loir) le 24 octobre 996[1]), duc des Francs (960-987) puis, roi des Francs (987-996), fut le premier souverain de la dynastie capétienne. Fils de Hugues le Grand et de son épouse Hedwige de Saxe, il est l'héritier des puissants Robertiens, la lignée qui est en compétition pour le pouvoir avec les grandes familles aristocratiques de Francie aux IXe et Xe siècles.

La fin du Xe siècle connaît le début d'une révolution économique et sociale qui allait trouver son apogée vers 1100[2]. Les progrès agricoles, le début des défrichements et l'augmentation des capacités d'échanges entraînée par l'introduction du denier d'argent par les premiers Carolingiens, entraînent une dynamique économique encore timide mais réelle. Dans le même temps, la fin des invasions et la continuité des guerres personnelles entraînent la construction des premiers châteaux privés où peuvent trouver refuge les paysans. En parallèle, la nouvelle élite guerrière, les chevaliers, entre en concurrence avec l'ancienne aristocratie foncière carolingienne. Pour canaliser ces nouveaux venus et pour assurer la protection de leurs biens, l'aristocratie et l'Église soutiennent et exploitent le mouvement de la paix de Dieu. C'est dans ce contexte qu'Hugues Capet peut instaurer la dynastie capétienne.

Il bénéficie tout d'abord de l'œuvre politique de son père qui parvient à contenir les ambitions de Herbert II de Vermandois, puis à en neutraliser la lignée. Cependant, cela ne peut se faire qu'en aidant les Carolingiens, pourtant totalement évincés de la course à la couronne depuis la déchéance de Charles le Simple, à se maintenir. En 960, Hugues Capet hérite du titre de duc des Francs obtenu par son père en échange de la concession de la couronne à Louis IV d'Outremer. Mais, avant de parvenir au pouvoir, il doit se libérer de la tutelle des Ottoniens et éliminer les derniers Carolingiens. C'est avec le soutien de l'Église, et en particulier de l'évêque Adalbéron de Reims et de Gerbert d'Aurillac, tous deux proches de la cour ottonienne, qu'il est enfin élu et sacré roi des Francs en 987.

La relative faiblesse d'Hugues Capet est paradoxalement un atout pour son élection par les autres grandes familles avec le soutien des Ottoniens, car il est peu menaçant aux yeux des grands vassaux et pour les ambitions impériales. Cependant, si effectivement le nouveau roi ne parvient pas à soumettre ses vassaux indisciplinés, son règne voit une modification de la conception du royaume et du roi. Ainsi, Hugues Capet renoue avec l'Église en s'entourant systématiquement des principaux évêques et se rapproche de l'aristocratie en s'alliant avec les grands princes territoriaux (le duc de Normandie ou le comte d'Anjou), ce qui renforce son trône. Cette histoire du premier Capétien nous est surtout connue grâce au moine lettré Richer de Reims.

La Francia occidentalis se trouve définitivement séparée de l'Empire et le premier Capétien, comme ses successeurs, met toute son énergie à créer une dynastie continue en consolidant son pouvoir sur son domaine et en y associant son fils Robert le Pieux le jour de Noël de l'an 987[3]. La couronne est effectivement transmise à son fils à sa mort en 996. La dynastie capétienne qu'il fonde ainsi dure plus de huit siècles et donne naissance à des lignées de souverains en Espagne, au Portugal et au Brésil[4].

Sommaire

La Francie des Robertiens

Le royaume et la société au Xe siècle

Géographie

Le royaume recouvre l'ancienne Francie occidentale dont les frontières avaient été définies au partage de Verdun en 843. Hugues est désormais le nouveau souverain du royaume de Francie, qu'on n'appelle plus Francia occidentalis depuis la seconde moitié du Xe siècle[5]. Les quatre fleuves (Escaut, Meuse, Saône et Rhône) constituent ses limites au nord et à l'est, le séparant de l'empire ottonien. Au sud, les Pyrénées ne constituent pas une limite puisque le comté de Barcelone fait partie du royaume[6]. Par contre la principauté (comté, royaume, duché selon les sources) de Bretagne n'en fait pas partie. Enfin, le tracé des côtes est très différent de celui que nous connaissons, car les golfes ne sont pas colmatés, en particulier dans le bassin d'Arcachon et le golfe de Saint-Omer, et les embouchures des fleuves évoluent encore. Qu'il s'agisse de la Charente ou de la Flandre maritime, la côte ferme est loin à l'intérieur des terres actuelles, « précédées d'immenses vasières, fréquemment envahies par la mer[7] ».

Genèse d'un renouveau économique

Paysans aux champs. Enluminure médiévale. Bibliothèque royale de l'Escurial, Madrid, XIIIe siècle.

L'an mil connaît une croissance économique dont l'apogée se fera nettement sentir aux XIIe et XIIIe siècles. Dès le milieu du Xe siècle, on assiste à une première phase de croissance agraire. Il semble que l'« angoisse de la faim » amène la paysannerie à produire mieux et plus. Ainsi, les paysans s'adaptent : meilleure connaissance du sol, adaptation des labours selon le milieu, évolution de la méthode d'attelage (collier d'épaule et fer à cheval), développement de la micro-hydraulique (fossé de drainage et irrigation)[8].

La frappe de monnaie d'argent et son homogénéisation par les premiers Carolingiens a déclenché une véritable mutation économique qui porte pleinement ses fruits avec la fin des invasions. Plus adapté que la monnaie d'or héritée de l'Antiquité qui ne convient que pour des transactions très onéreuses, le denier d'argent permet l'introduction de millions de producteurs et de consommateurs dans le circuit commercial[9]. Les paysans commencent à pouvoir revendre leur surplus et deviennent donc intéressés à produire au-delà de ce qui est nécessaire à leur subsistance et aux droits seigneuriaux[10]. Ce phénomène est attesté par la multiplication des marchés et des ateliers de frappe de monnaie dans tout l’Occident dès le IXe siècle[11]. Dans certains cas, les propriétaires, ecclésiastiques ou laïcs, fournissent des charrues, investissent dans des équipements améliorant la productivité : moulins à eau en remplacement des meules à bras, pressoirs à huile ou à vin (en remplacement du foulage)[12], etc. L'utilisation de l'énergie hydraulique plutôt qu’animale ou humaine permet une productivité sans comparaison avec celle disponible dans l’Antiquité et le haut Moyen Âge : chaque meule d'un moulin à eau peut moudre cent cinquante kilogrammes de blé à l'heure, ce qui correspond au travail de quarante esclaves[13].

Les rendements des terres cultivées peuvent atteindre jusqu'à cinq ou six pour un. Ces progrès dégagent de la main-d’œuvre pour d’autres activités. Pierre Bonnassie a montré que, après les grandes famines de 1005-1006 et de 1032-1033, la population devient de moins en moins exposée aux dérèglements alimentaires et, par voie de conséquence, aux épidémies : la mortalité diminue[14]. Il ne faudrait pas surestimer cette époque de renouveau économique et social car le changement n'en est qu'à sa genèse et la paysannerie est encore la victime des mauvaises récoltes, comme, sous le règne de Robert le Pieux, où on assiste, selon Raoul Glaber, à des famines foudroyantes où le cannibalisme est de règle dans certaines régions (1005-1006 et 1032-1033)[14]. La croissance démographique et l'augmentation de la production agricole s'auto-entretiennent en un cercle vertueux : elles sont la clef du renouveau médiéval.

La société carolingienne s'efface progressivement. Ainsi, on constate la disparition de l'esclavagisme dans le Midi au profit des paysans libres. Néanmoins, un nouveau pouvoir s'affirme : la seigneurie banale. À partir de 990, l'effritement des institutions de l'époque précédente amène à un nouvel usage, celui des « coutumes ». Au XIe siècle, il s'agit des droits exigés par le seigneur banal et qu'aucune autorité supérieure n'est capable de contrer. Cependant, la mise en place de la seigneurie n'empêche pas le progrès technique et l'avancée agricole[15].

Denier frappé par les Vikings

Le denier d'argent est l'un des principaux moteurs de la croissance économique depuis le IXe siècle. La faiblesse du pouvoir royal a entraîné la frappe de monnaie par de nombreux évêques, seigneurs et abbayes. Alors que Charles le Chauve comptait 26 ateliers de frappe monétaire, Hugues Capet et Robert le Pieux n'ont plus que celui de Laon[16]. Le règne d'Hugues Capet marque l'apogée de la féodalisation de la monnaie. Il en résulte une diminution de l'uniformité du denier et l'apparition de la pratique de la refrappe de la monnaie aux marchés (on se fie au poids de la pièce pour en déterminer la valeur). Par contre, on est dans une période où l'augmentation des échanges est soutenue par l'augmentation du volume de métal disponible. En effet, l'expansion vers l'est de l'empire permet aux Ottoniens de pouvoir exploiter de nouveaux gisements d'argent. La marge de manœuvre de Robert le Pieux est faible. Or, la pratique du rognage ou des mutations, entraîne des dévaluations tout à fait préjudiciables.

Renouveau spirituel

Articles détaillés : Ordre de Cluny et Abbaye de Gorze.
Consécration de Cluny III par le pape Urbain II. Bibliothèque Nationale de France, XIIe siècle.

L'Église n'est pas épargnée par les désordres des IXe et Xe siècles. Des charges d'abbés, paroissiales ou ecclésiastiques, sont données à des laïcs pour se former des clientèles et la discipline monastique se relâche ; le niveau culturel des prêtres devient médiocre[17]. En contrepoint, les rares monastères qui ont conservé une conduite irréprochable acquièrent une grande autorité morale. Ces monastères intègres reçoivent de nombreuses donations pour obtenir des prières d'absolution, en particulier postmortem[18]. Le choix des abbés s'oriente de plus en plus vers des hommes d'une grande intégrité et certains tels Guillaume d'Aquitaine vont jusqu'à donner l'autonomie et l'immunité à des monastères qui élisent leur abbé. C'est le cas des abbayes de Gorze, Brogne ou Cluny. D'autres monastères utilisent de faux certificats d'immunité pour acquérir l'autonomie[19].

Parmi eux, Cluny connaît le développement et l'influence les plus remarquables. Sous la férule d'abbés dynamiques tels qu'Odon, Maïeul — un ami personnel d'Hugues Capet — ou encore Odilon, l'abbaye entraîne d'autres monastères qui lui sont rattachés, et constitue bientôt un ordre très puissant (en 994, l'ordre de Cluny compte déjà trente-quatre couvents)[20]. L'une des grandes forces de Cluny est de recruter une bonne partie de ses membres et particulièrement ses abbés dans la haute aristocratie[21].

Ces monastères sont le fer de lance d'un profond mouvement de réforme monastique. Leur œuvre moralisatrice touche bientôt tous les niveaux de la société. En particulier, elle s'attaque à canaliser la chevalerie par le mouvement de la Paix de Dieu puis de la Trêve de Dieu. Ce mouvement, très influent, pousse à la création d'États stables et en paix. Ces réformateurs ont le souvenir de l'empire carolingien qui soutenait la réforme bénédictine, la fondation de nombreuses abbayes et leur épanouissement spirituel, s'appuyant largement sur l'Église pour gouverner. La montée en puissance des Ottoniens leur donne l'occasion d'œuvrer à la reconstitution d'un empire universel. Hugues Capet, abbé laïc mais soutenant activement la réforme, est un candidat idéal pour occuper le trône de Francie car il est aussi considéré comme insuffisamment puissant pour échapper à l'influence des Ottoniens.

« Mutation féodale »

Articles détaillés : Féodalité, Paix de Dieu et Motte castrale.
Domicilium de Langeais (fin du Xe siècle), bâti par Foulques Nerra. Rare vestige contemporain d'Hugues Capet.

Le contexte historique est celui de la « mutation féodale ». Cette notion que Georges Duby centre autour de l'an mil est discutée par Dominique Barthélemy pour lequel cette évolution se déroule sur plusieurs siècles.

L’empire carolingien se désagrège dès le milieu du IXe siècle. Avec l'arrêt de l'expansion territoriale, les empereurs n'ont plus de nouvelles terres ou charges pour rétribuer leurs vassaux et n'ont donc plus prise sur eux. Peu à peu, ils doivent leur concéder la transmission héréditaire de terres et de charges, puis une autonomie de plus en plus grande. D'autre part, sur le plan militaire, l’ost carolingien puissant mais lent à rassembler se révèle incapable de répondre aux raids vikings ou sarrasins dont le principal atout est la mobilité[22]. Les châteaux en bois ou mottes castrales sont apparus aux alentours de l'an mil entre la Loire et le Rhin[23]. Cela répond aussi à la logique d'une société médiévale qui évolue : à partir de 980, le royaume des Francs est secoué par la « révolution aristocratique » qui voit les campagnes se couvrir de ces forteresses primitives en bois.

Autour d'elles prolifèrent les nouvelles coutumes (mals usos)[24]. Les vieux pagi carolingiens sont éclipsés par un nouveau ressort territorial fondé sur le territoire du château (districtus)[25]. Les châteaux (les mottes) initialement conçus comme refuges, deviennent le signe de l'autorité, du développement économique et de l’expansion des terroirs.

L'histoire romantique du XIXe siècle décrit une « anarchie généralisée » et une France « hérissée » de châteaux autour de l'an mil. On est actuellement plus nuancé sur la réalité de ce phénomène car, dès l'origine, les autorités tentent de canaliser les constructions castrales[26]. Des actes qui révèlent cette volonté d'interdire les constructions fortifiées ont été conservés : le Capitulaire de Pîtres (864) ou encore les Consuetudines et Justicie normandes (1091)[27]. Mais, dans ces temps d'invasions et de guerres privées continuelles, les habitants viennent se regrouper à proximité du château, ce qui légitime le châtelain et l'exercice du ban seigneurial : on parle d'incastellamento pour le Midi et d'encellulement pour le Nord de la France.

Dès lors, cette nouvelle élite guerrière appuyée sur ces châteaux entre en conflit d'intérêt avec l'aristocratie et l'Église dont les revenus dépendent de l'économie paysanne[28]. Comtes, évêques et abbés qui appartiennent à de grandes lignées aristocratiques doivent réagir pour réfréner les ambitions qui entraînent nombre de guerres privées et pillages. Ces représentants des grandes familles exploitent et propagent le mouvement de la paix de Dieu, né de l'exaspération des paysans et des clercs soumis à l'arbitraire des hommes en armes (milites)[29]. La codification et la moralisation de la conduite des chevaliers sur des critères religieux entraînent l'élaboration, par l'évêque Adalbéron de Laon, d'une société divisée en trois ordres sociaux : ceux qui travaillent (laboratores), ceux qui prient (oratores) et ceux qui combattent (bellatores).

Enfin, malgré la décentralisation du pouvoir, le roi conserve une autorité politique. L'époque est à la revendication de terres et de charges ; aussi, l'hommage rendu à son suzerain permet d'en officialiser la propriété. Le roi, qui est sacré, garde donc un rôle arbitral qui permet à la fonction de durer au Xe siècle. Au XIe siècle, elle sera encore remise en cause par certains princes (comtes de Blois, comte de Vermandois).

Les Robertiens

Article détaillé : Robertiens.
Généalogie des Robertiens entre les VIe et Xe siècles

Depuis la fin du IXe siècle, la politique royale ne peut se faire sans les descendants de Robert le Fort dont fait partie Hugues Capet. L'octroi de la couronne étant devenu électif, les plus grandes familles du royaume se la disputent. Les Robertiens profitent de la jeunesse puis de la déchéance de Charles le Simple pour monter sur le trône. Eudes Ier ou Robert Ier, respectivement grand-oncle et grand-père d'Hugues Capet, ont été roi des Francs (888-898 et 922-923).

Cependant, son père Hugues le Grand est confronté à la montée en puissance de Herbert de Vermandois qui contrôle tour à tour le Vexin, la Champagne et Laon, octroie l'archevêché de Reims à son fils Hugues et s'allie à l'empereur Henri l'Oiseleur[30]. Le Robertien, qui avait déjà dû renoncer à la couronne en 923 au profit de Raoul de Bourgogne, faute d'héritier mâle susceptible de gérer sa principauté[30], place sur le trône en 936 le jeune carolingien Louis IV, pourtant réfugié chez son oncle en Angleterre depuis la déchéance de son père Charles le Simple et dépourvu de toute possession en Francie[31], soulignant qu'il serait illégitime de pousser vers le trône quelqu'un qui serait issu d'un lignage étranger à celui de Charlemagne.

Cette manœuvre lui permet cependant de devenir le personnage le plus puissant en Francie de la première moitié du Xe siècle : à son avènement, Louis IV lui donne le titre de dux Francorum (duc des Francs), ce qui annonce à nouveau le titre royal[31]. Le roi le qualifie officiellement (peut-être sous la pression) comme « le second après nous dans tous nos royaumes »[32]. Il gagne encore en puissance quand son grand rival Herbert de Vermandois meurt en 943, car sa puissante principauté est alors divisée entre ses quatre fils[33].

Carte 1 : Le royaume de Francie au temps des derniers Carolingiens. D'après L. Theis, L'Héritage des Charles, Seuil, Paris, 1990, p. 168.

Hugues le Grand domine alors de nombreux territoires entre Orléans-Senlis et Auxerre-Sens, alors que le souverain carolingien est plutôt replié au nord-est de Paris (Compiègne, Laon, Soissons) (carte 1)[32]. Enfin, le duc des Francs est à la tête d'évêchés et d'abbayes comme celles de Marmoutier (près de Tours), de Fleury-sur-Loire (près d'Orléans) et de Saint-Denis. Il est aussi abbé laïc de la collégiale de Saint-Martin de Tours par laquelle Hugues le Grand et surtout son fils Hugues « Capet » hériteront peut être de leur surnom en référence à la cappa (la cape de saint Martin) conservée comme relique dans ce lieu[34].

Sa puissance provient aussi de ses alliances : Hugues le Grand s'est marié une première fois avec la sœur d'Athelstan du Wessex, un des plus puissants souverains d'Occident au début du Xe siècle après qu’il eut chassé les Vikings du Danelaw[35]. Quand Otton Ier en restaurant l'Empire en fait la première puissance d'Europe, Hugues le Grand épouse sa sœur[36]! Cependant, la puissance dont doit hériter Hugues Capet a ses limites : ses vassaux sont eux-mêmes suffisamment puissants pour avoir une large autonomie et jouer une politique d'équilibre entre Carolingiens et Robertiens[37].

Biographie

Sources primaires

Nous sommes mal renseignés sur le règne d'Hugues Capet. Aucun lettré de son temps n'a jugé nécessaire de rédiger sa biographie. Des éléments épars figurent dans l'histoire contemporaine rédigée par le moine Richer de Reims, dans la Correspondance de Gerbert d'Aurillac puis dans l'œuvre d'Abbon de Fleury, tous clercs et largement favorables au nouveau roi. Les événements confus qui se succèdent sont difficiles à reconstituer[38].

Enfance

Héritier d'Hugues le Grand

Hugues est né dans un lieu inconnu vers 939-941[39]. Il est le fils de Hedwige de Saxe (sœur d'Otton Ier) et d'Hugues le Grand.

Sceau impérial d'Otton Ier, 968.

En 956, Hugues le Grand meurt et son fils Hugues Capet est censé hériter d'une puissance de premier ordre : à Rome, le pape le reconnaît « glorieux prince des Francs ». Au milieu du Xe siècle, la compétition pour la couronne entre Carolingiens et Robertiens est entamée, et la victoire de ces derniers est déjà presque inéluctable[40]. La légitimité robertienne se concrétise encore davantage par le jeu des alliances. Il coule dans les veines d'Hugues Capet un peu de sang carolingien apporté par sa grand-mère paternelle (Béatrice de Vermandois), mais aussi du sang germain par ascension direct. Cette origine proviendrait de Rhénanie et non pas de Saxe selon Karl Ferdinand Werner[41]. Enfin, son père s'était allié avec le nouveau roi de Germanie Otton Ier, dont il avait épousé la sœur Hedwige de Saxe pour contrecarrer tout désir de Louis IV sur la Lotharingie[42]. Au total, à la mort de son père, Hugues Capet hérite théoriquement d'un titre prestigieux et d'une puissante principauté.

La Francie sous influence des Ottoniens

Mais, à partir de 962, l'Occident est désormais dominé par le vainqueur de la chrétienté face aux Hongrois, Otton Ier, qui restaure le titre impérial et s'empare au passage de l'Italie. Le nouvel empereur accroît sa puissance sur la Francie occidentale en portant son attraction sur certains évêchés frontaliers ; bien qu'élu de Lothaire, l'archevêque de Reims (qui assure le choix des rois de Francie) Adalbéron de Reims tend à afficher ses sympathies impériales[43]. Pris en étau, le roi Lothaire s'appuie sur d'autres évêchés (Langres, Châlons, Noyon) et sur le comte de Flandre Arnoul Ier.

À la mort de son père, Hugues, l’aîné, n'est âgé que d'une quinzaine d'années et a deux frères. Otton Ier entend mettre sous tutelle la Francie, ce qui lui est possible étant l'oncle maternel d'Hugues et de Lothaire, nouveau roi des Francs qui a succédé à l'âge de 13 ans à Louis IV en 954. Le royaume de Francie en 954 et la principauté robertienne en 956 sont mis sous la tutelle de Brunon, archevêque de Cologne et duc de Lotharingie, frère du roi Otton Ier. Son objectif est de maintenir l'équilibre entre les Robertiens, les Carolingiens et les Ottoniens[40]. La tutelle d'Hugues est doublée par celle de Lothaire. En 960, le roi des Francs consent à rendre à Hugues l'héritage de son père, avec le marquisat de Neustrie et le titre de duc des Francs. Mais, en contrepartie, le duc doit accepter la nouvelle indépendance acquise par les comtes de Neustrie pendant la vacance du pouvoir[44]. Son frère Otton n'obtient que le duché de Bourgogne[45]. Andrew W. Lewis a ainsi cherché à montrer qu'Hugues le Grand avait préparé une politique patrimoniale pour assurer à son fils aîné la majeure partie de son héritage comme le faisaient toutes les grandes familles dès cette époque[46].

Hugues Capet, duc des Francs (960-987)

Des débuts difficiles

Denier d'Hugues Capet, « duc par la grâce de Dieu » (Dux Dei Gratia), atelier de Paris (Parisi Civita), fin du Xe s.

Lorsqu'il reçoit sa charge ducale (duc des Francs, dux francorum) en 960, Hugues Capet est moins puissant que son père (carte 1). En effet, il est jeune, politiquement inexpérimenté et, surtout, il est mis sous tutelle par son oncle Brunon de Cologne, proche du pouvoir ottonien[47].

Face à cet affaiblissement, une forte poussée d'indépendance se produit chez les vassaux entre Seine et Loire. Le comte Thibaud de Blois, pourtant un ancien fidèle d'Hugues le Grand qui lui a confié la cité de Laon, s'assure une quasi-indépendance en se proclamant comte de Blois, en faisant fortifier ses principales villes et en s'emparant de Chartres et de Châteaudun[48].

Les diplômes royaux des années 960 montrent que les grands aristocrates ne sont plus uniquement fidèles au duc des Francs, comme au temps d'Hugues le Grand, mais également au roi Lothaire. En effet, on retrouve certains d'entre eux dans les armées royales luttant contre le duché de Normandie pour le compte de Lothaire[49]. Enfin, il semblerait pour Hugues que sa place de numéro deux du royaume aurait tendance à lui échapper. Deux chartes de l'abbaye de Montierender (968 et 980) font référence à Herbert III de Vermandois, alors comte de Château-Thierry, de Vitry et abbé laïc de Saint-Médard de Soissons, portant le titre de « comte des Francs » et même de « comte du palais » dans une charte de Lothaire[49].

Le sauveur de la royauté carolingienne

De son côté, Lothaire a aussi perdu du pouvoir face au renforcement de la monarchie ottonienne. Il fait pâle figure en participant au rassemblement des vassaux et parents d'Otton Ier en 965. Pourtant, à partir de la mort de l'empereur en 973, le roi veut renouer avec la politique de son grand-père : récupérer la Lorraine, « berceau des Carolingiens[48] ». Durant l'été 978, pour des raisons obscures, il décide de passer à l'action. Le principal témoin du temps, Richer de Reims explique :

« Comme Otton possédait la Belgique (la Lorraine) et que Lothaire cherchait à s'en emparer, les deux rois tentèrent l'un contre l'autre des machinations très perfides et des coups de force, car tous les deux prétendaient que leur père l'avait possédée. »

— Richer de Reims, apr. 990[50].

En août 978, accompagné des grands du royaume (dont le duc Hugues qui voit d'un bon œil une brouille entre Carolingiens et Ottoniens[51]), Lothaire pille par surprise Aix-la-Chapelle (la résidence d'Otton II) mais il doit rapidement battre en retraite et se réfugier à Étampes chez Hugues. Otton II s'engage à son tour dans l'offensive et lance ses armées aux portes de Paris. Charles de Lorraine, frère de Lothaire, est même couronné roi à Laon par l'évêque de Metz, Thierry Ier. Mais, aux portes de Paris, Hugues Capet barre la route à l'empereur germanique qui, voyant l'hiver approcher (on était le 30 novembre) est contraint de s'enfuir. Les troupes de Lothaire et d'Hugues Capet poursuivent Otton dont l'arrière garde, ne pouvant franchir l'Aisne en crue à Soissons, est complétement décimée, « ainsi il en mourut plus par l'onde que par l'épée[52] ». Cette victoire permet à Hugues Capet de retrouver ainsi sa place de premier aristocrate du royaume franc[53].

Le rôle de l'archevêché de Reims

Denier d'Adalbéron de Reims, archevêque de Reims, fin du Xe s.
Article détaillé : Adalbéron de Reims.

Jusqu'à la fin du Xe siècle, situé en terre carolingienne, Reims est le plus important des sièges archiépiscopaux de France. Il prétend à la primatie des Gaules et son titulaire a le privilège de sacrer les rois et de diriger leur chancellerie. De ce fait, l'archevêché rémois est traditionnellement favorable à la famille régnante et a, depuis longtemps, un rôle central dans la politique royale. Mais la cité épiscopale est dirigée par Adalbéron de Reims, neveu de Adalbéron de Metz (un prélat fidèle aux Carolingiens), élu par le roi Lothaire en 969, mais qui a des liens familiaux avec les Ottoniens[54]. L'archevêque est assisté par un des esprits les plus avancés de son temps, l'écolâtre[55] et futur pape Gerbert d'Aurillac. Adalbéron et Gerbert œuvrent pour le rétablissement d'un empire unique dominant toute l'Europe. Le roi Lothaire, âgé de 13 ans, est de fait sous tutelle de son oncle Otton Ier. Mais, en vieillissant, il s'affirme et prend de l'indépendance, ce qui contrecarre les projets impériaux de réunir toute l'Europe sous une unique couronne. Dès lors, l'évêché lâche Lothaire et soutient Hugues Capet[54].

En effet, pour que les Ottoniens puissent faire de la Francie un État vassal de l'empire, il faut impérativement que le roi des Francs ne soit pas de race carolingienne et qu'il soit suffisamment peu puissant et effacé pour accepter cette mise sous tutelle. Hugues Capet devient pour eux le candidat idéal, d'autant qu'il soutient activement la réforme monastique dans ses abbayes quand les autres prétendants continuent à distribuer des charges ecclésiales et abbatiales à leur clientèle. Une telle conduite ne pouvait que séduire les Rémois, très proches du mouvement clunisien.

Grâce à la correspondance de Gerbert, beaucoup d'informations sur ces évolutions politiques ont pu être obtenues :

« Le roi Lothaire n'est le premier en France que par son titre. Hugues l'est, non par le titre, mais par ses faits et gestes. »

— Gerbert d'Aurillac, Correspondance, v. 985.[56]

Les Rémois voient également d'un mauvais œil le rapprochement entre le roi et Herbert de Vermandois, l'éternel ennemi des Carolingiens, le descendant du traître qui avait permis l'arrestation de son grand-père Charles le Simple en 923. Enfin, Adalbéron et Gerbert sont tous les deux proches de la cour ottonienne et se rapprocher d'Hugues serait finalement faire renoncer la Lorraine à la Francie[43]. Enfin, Otton III a trois ans quand son père meurt : deux partis luttent alors pour assurer la régence, l'un emmené par Henri II de Bavière, dit le Querelleur et Lothaire (954-986), l'autre par les impératrices Théophano, sa mère, et Adélaïde de Bourgogne, sa grand-mère, camp adopté par Gerbert et Adalbéron qui soutiennent donc Hugues Capet contre Lothaire[57].

L'échec de Lothaire (979-986)

Tête de Lothaire, sculpture du XIIe s., Musée Saint-Rémi de Reims.

La fin du Xe siècle, riche d'événements complexes, n'est éclairée que par l’Histoire de Richer de Reims qu'il écrit après 990. Il complète la chronologie de Flodoard de Reims qui s'arrête en 966. Cependant, on sait que son récit manque de fiabilité. Richer a le désir de bien faire, ce qui l'amène parfois à modifier la chronologie et à faire la gloire de ses maîtres rémois : Adalbéron et Gerbert[58]. Voilà sur quelles bases nous connaissons la chute des Carolingiens.

Appuyé par l'évêché de Reims, Hugues est désormais le nouvel homme fort du royaume. En 979, alors que Lothaire souhaite assurer sa succession en associant au trône son fils aîné, c'est le duc des Francs qui prend en charge la réunion des principes regnorum, c'est-à-dire les grands du royaume. La cérémonie se déroule à Compiègne en présence du roi, d'Arnoul (un fils illégitime du roi Lothaire), d'Adalbéron de Reims sous la bénédiction d'Hugues. L'assemblée acclame Louis V, selon le rite carolingien, et l'archevêque de Reims le sacre roi des Francs[59].

L'année suivante, Lothaire, voyant grandir l'emprise d'Hugues, décide de se réconcilier avec Otton II : il accepte de renoncer définitivement à la Lorraine[60]. Mais Hugues, pour des raisons obscures, ne souhaite pas que Lothaire se réconcilie avec l'empereur germanique ; il s'empresse donc de prendre le castrum (la forteresse) de Montreuil, puis de partir pour Rome. Sur place, il rencontre l'empereur et le pape, en compagnie de ses fidèles Bouchard de Vendôme et Arnoul d'Orléans[61]. La tension monte entre Lothaire et Hugues. Le roi des Francs fait marier son fils Louis à Adélaïde d'Anjou qui lui apporte l'Auvergne et le comté de Toulouse, de quoi prendre en tenaille les territoires du robertien par le sud (982). C'est un échec, le couple se sépare deux ans plus tard[62].

Suite à la mort d'Otton II (983) et profitant du jeune âge d'Otton III, Lothaire renonce à son rapprochement avec les Ottoniens et, s'alliant au duc de Bavière, il décide de reprendre l'offensive en Lorraine en mars 985. Hugues se garde bien cette fois-ci d'être de l'expédition[63].

Lorsque le roi prend Verdun et fait prisonnier Godefroy (le frère de l'archevêque de Reims), Adalbéron et Gerbert demandent l'aide du duc des Francs. Mais la course folle de Lothaire s'achève puisqu'il meurt à son tour en mars 986[64].

Élu et sacré roi des Francs (987)

La fin des Carolingiens

La contradiction de certains faits donnés par Richer ne nous permet pas de comprendre toute l'action politique d'Hugues à la veille de son couronnement. Par exemple, on ne sait pas pourquoi il ne s'est pas opposé à l'association au trône de Louis, ni à sa succession en 986, alors qu'il s'est rendu à Rome pour rencontrer l'empereur germanique dans une intention hostile à Lothaire. Inquiet de la prise de Verdun et de l'appel d'Adalbéron, il semblerait que le duc des Francs avait lui-même rassemblé une armée. Peut-être envisageait-il de marcher contre Lothaire et de s'emparer du trône[65]?

Dans tous les cas, le nouveau souverain Louis V, comme l'avaient fait Louis IV et Lothaire, déclare qu'il prendrait les conseils du duc des Francs pour sa politique. Or, il reprend les visées de son père sur la Lorraine et on pense qu'il aurait souhaité lancer une offensive contre Reims et Laon du fait de leur rapprochement avec l'Empire[66]. On ne sait pas quel est le rôle d'Hugues à ce moment-là, les sources restent vagues. Apparemment, le duc des Francs aurait limité les intentions exagérées du roi carolingien. De fait, Louis convoque l'archevêque de Reims à son palais de Compiègne pour qu'il réponde de ses agissements. Mais, au cours d'une partie de chasse, le roi trouve la mort dans une chute de cheval le 21 ou le 22 mai 987 en forêt de Senlis[67].

L'éviction de Charles de Lorraine

En mai 987, les chroniqueurs, notamment Richer de Reims et Gerbert d'Aurillac, écrivent que, à Senlis, « s'éteignit la race des Charles ». Le roi défunt est aussitôt enterré à Saint-Corneille de Compiègne et non à Reims comme il le souhaitait[68]. Or, même si Louis V est mort sans enfant, il reste un Carolingien susceptible de monter sur le trône. Il s'agit de Charles de Lorraine, fils de Louis IV et frère de Lothaire. Cela n’a rien d'extraordinaire : ce n'est pas la première fois qu'un Carolingien est en concurrence avec un Robertien[69]. En fait, au temps du père d'Hugues Capet, on ne concevait pas de rompre avec les Carolingiens tant qu’il en existerait, et le prince Louis était perçu comme jeune et pur[70]. En 987, les temps ont changé. Depuis une dizaine d'années, Hugues Capet concurrence ouvertement le roi, il semble avoir soumis les grands vassaux, mais, surtout, son adversaire Charles de Lorraine est accusé de tous les maux : il a voulu usurper la couronne (978), il est l'allié d'Otton II puis il a accusé d'adultère la reine Emma d'Italie, femme de son frère[71]. Adalbéron de Reims convoque les plus hauts seigneurs de la Francie à Senlis et leur dit :

« Nous n'ignorons pas que Charles [de Lorraine] a des partisans : ils soutiennent qu'il a des droits à la couronne, transmis par ses parents. Mais on ne doit porter sur le trône qu'un homme exceptionnel par la noblesse du sang et la vertu de l'âme. Or, Charles n'obéit pas à l'honneur, il a perdu la tête au point de s'être remis au service d'un roi étranger Otton II et d'avoir pris femme dans une classe inférieure de la noblesse. »

— Richer de Reims, Histoire, IV, v. 990.[72]

De retour d'Angleterre, Abbon de Fleury, écolâtre de Saint-Benoît-sur-Loire, établit une légende selon laquelle les derniers Carolingiens auraient été maudits par le « Loup » (Passion de saint Edmund, v. 987). En effet, tout en insistant sur la sainteté de la tête royale due au sacre, il rappelle que le loup avait précipité Louis IV et sa descendance, trop orgueilleux et brutaux à la différence du roi Edmund, souverain idéal et pacifique. Le clerc répand ainsi l'idée que les Carolingiens étaient comme condamnés par un jugement de Dieu que la contagion rendait héréditaire (Louis IV, Louis V). Il s'agit donc de bannir définitivement cette dynastie du trône[73]. Adalbéron plaide une dernière fois en faveur d'Hugues :

« Le trône ne s'acquiert point par droit héréditaire, et l'on ne doit mettre à la tête du royaume que celui qui se distingue par ses qualités. Donnez-vous donc pour chef le duc Hugues, recommandable par ses actions, par sa noblesse et par ses troupes, en qui vous trouverez un défenseur, non seulement de l'intérêt public mais aussi des intérêts privés. »

— Richer de Reims, Histoire, IV, v. 990.[74]

Où et quand Hugues Capet a-t-il été sacré roi des Francs ?

Hugues fait immédiatement acquitter Adalbéron et ce dernier peut alors convoquer une nouvelle assemblée à Senlis (fief d'Hugues) et il retourne à Reims écarter toute proposition de la part de Charles de Lorraine. C'est bien Hugues qui va devenir le nouveau souverain[68]. En revanche, les historiens spécialistes de la période l'affirment : « En 1989, il faut le dire honnêtement, on ne sait toujours pas avec certitude quand, comment et où eurent lieu le couronnement et le sacre du premier Capétien. »[75] Mais que sait-on au juste ? C'est la chronologie fournie par Richer de Reims qui pose un problème. Le moine écrit qu'Hugues est couronné et sacré le 1er juin. Yves Sassier n'imagine pas qu'on puisse à l'époque sacrer le nouveau souverain dix jours seulement après la mort du Carolingien. Il semble plutôt qu'Hugues ait été acclamé roi par l'assemblée de Senlis (peut-être le 3 juin) puis couronné et sacré roi le 3 juillet à Noyon[76].

« Le duc fut porté au trône et reconnu roi par les Gaulois, les Bretons, les Normands, les Aquitains, les Goths, les Espagnols (du comté de Barcelone) et les Gascons. »

— Richer de Reims, Histoire, IV, v. 990., [74]

Mais les sources font également mention d'une cérémonie à Reims, d'où l'idée émise de deux cérémonies : une à Noyon (laïque) et l'autre à Reims (religieuse)[77]. Finalement, de quoi est-on sûr ? Hugues Capet a été acclamé par l'assemblée de Senlis (quelques jours après la mort de Louis V), puis il a été couronné et sacré, soit à Reims, soit à Noyon, entre mi-juin et mi-juillet de l'an 987. Le choix de Noyon reste obscur : pourquoi avoir choisi une cité autre que Reims alors que le nouveau souverain venait d'être élu sur l'appui d'Adalbéron de Reims ? S'agit-il d'une manœuvre afin de contrer l'archevêque de Reims comme Hugues le fera quelques mois plus tard en faisant sacrer son fils à Orléans[76] ? On ne sait rien du déroulement du sacre et du couronnement d'Hugues ; en revanche il est à peu près certain qu'il portait un manteau de pourpre tissé d'or (et peut-être brodé de sujets pieux), des bas rouges, des chaussures violettes, une couronne à arche ornée de quatre fleurons et un sceptre[78].

Règne

Robert le Pieux, associé à la couronne

Un des premiers soucis du nouveau roi est d'assurer la perpétuation d'une dynastie. Il essaye de convaincre Adalbéron de sacrer son fils Robert. Mais l'archevêque, très proche du pouvoir ottonien qui préfère l'alternance des grandes familles sur le trône de Francie plutôt qu'une puissante dynastie capable de lui faire concurrence, refuse. Hugues, venant de recevoir une lettre de Borell II, comte de Catalogne, lui demandant de le soutenir contre Al-Mansur qui vient de razzier Barcelone, fait valoir qu'il a besoin d'avoir un successeur au cas où l'expédition contre les sarrasins tournerait mal. Adalbéron doit céder et Robert le Pieux est sacré, âgé d'une quinzaine d'années, le jour de Noël 987[79].

Hugues Capet rêve de le marier à une princesse byzantine, mais ce projet échouant, Robert doit épouser la veuve d'Arnoul II, comte de Flandre, et fille de Bérenger II, roi d'Italie, membre de la famille carolingienne[79]. Rozala d'Italie est de vingt ans son aînée. N'ayant pas réussi à avoir d'enfant avec elle et parce qu'elle était trop âgée, Robert la répudie vers 991/992[80].

Associé à la couronne, Robert assiste son père pour les questions militaires (conquête de Laon 988-991). D'autre part, sa solide instruction assurée par Gerbert d'Aurillac à Reims, lui permet de traiter des questions religieuses dont il est rapidement le garant (il dirige le concile de Verzy en 991 et celui de Chelles en 994). Il est presque certain que, contrairement à son fils, Hugues soit illettré et ne parle pas le latin mais le roman (latin vulgaire du Nord)[81].

Capture de Charles de Lorraine

Article détaillé : Charles de Basse-Lotharingie.

Durant son règne, Hugues doit faire face à de nombreux opposants. En premier lieu, un de ses grands rivaux : Charles de Lorraine. Ce dernier réapparaît en 988 lorsqu'il s'empare de la ville de Laon, un des derniers bastions carolingiens. Pour se faire respecter, le roi assiège par deux fois la ville sans résultat[82]. Préoccupé par cet échec, Hugues contacte plusieurs souverains afin d'obtenir leur aide. Nous avons connaissance d'une lettre rédigée en juillet 988, sous la plume de Gerbert, dans laquelle le premier Capétien ne se contente pas d'informer l'impératrice Théophano (régente de son fils Otton III) des actions de Charles de Lorraine. En effet, il lui propose une rencontre :

« Soucieux de confirmer pour toujours notre mutuelle amitié, nous avons décidé qu'Adélaïde, la compagne de notre trône, vous rencontrera le 22 août au village de Sternay et que nous observerons à perpétuité entre votre fils et nous, sans fraude ni dol, toutes les décisions bonnes et justes que vous y aurez prises ensemble. »

— Hugues Capet à Théophano, 988.[83]

Or, étant à Meersburg (près du lac de Constance) au cours du mois d'août, il semble que Théophano ne se soit pas déplacée. Alors, Hugues décide de ruser.

Après la mort d'Adalbéron de Reims (989), il décide d'élire comme nouvel archevêque le carolingien Arnoul (un fils illégitime du roi Lothaire) plutôt que Gerbert. On pense qu'il s'agit d'apaiser les partisans du Carolingien, mais la situation se retourne contre le roi puisque Arnoul livre Reims à Charles[82]. Les alliances se forment alors ; la guerre est ouverte : Charles est allié à l'archevêque de Reims et à Herbert de Vermandois, et Hugues reçoit le soutien d'Eudes de Blois en échange de Dreux. Quant au pape, il est sollicité par les deux adversaires, tandis que la cour d'Otton III reste neutre, malgré les demandes d'Hugues[84]. La situation se débloque par la trahison d'Adalbéron de Laon, évêque de Laon, qui s'empare de Charles et d'Arnoul pendant leur sommeil et les livre au roi (991). Pour parvenir à ses fins, Adalbéron s'est fait recevoir à Laon en faisant croire à Charles et Arnould qu'il voulait se réconcilier avec eux afin de récupérer son évêché. Bien accueilli à Laon, il jure sur le pain et le vin (le jour du Dimanche des Rameaux[85] 29 mars ou le jour du Jeudi saint[86] 2 avril 991) de conserver sa foi à Charles, avant d'ouvrir les portes de la ville à l'ennemi durant la nuit[87] ! Le dernier carolingien, est emprisonné à Orléans et meurt à une date inconnue[82].

Cette trahison, qui survient en plein mouvement de la Paix de Dieu (le concile de Charroux date de 989), frappe vivement les imaginations dans la moitié sud du royaume : Adalbéron de Laon est totalement discrédité dans ces provinces et l'image d'Hugues Capet est ternie[88]. La guerre impitoyable menée contre Charles de Lorraine pour Laon et Reims (988-991), connue par le récit de Richer de Reims et les lettres de Gerbert, ont rendu le roi hostile aux yeux d'une partie l'Église. La vision que nous avons de la politique du Capétien est exclusivement celle des religieux, d'où le recul à prendre vis-à-vis du jugement à donner sur Hugues Capet[89]. Les intérêts des uns et des autres souvent mis en place par des familles différentes ne sont pas convergents. Des rivalités se font jour et les conflits entre princes sont relayés par leurs alliés religieux respectifs. Adémar de Chabannes nous donne une vision presque « manichéenne » du règne d'Hugues Capet. Le même auteur nous fournit à la fois un portrait négatif et positif du souverain. C'est lui qui nous conte l'histoire d'un défi du comte Audebert à l'égard d'Hugues et Robert « Qui vos reges constituerunt ? » (« Qui vous a fait roi ? »)[90].

Pendant longtemps, on a affirmé que les sujets méridionaux avaient systématiquement rejeté le premier Capétien. Récemment, des études ont émis des nuances. Il semblerait que le rejet soit plutôt d'ordre politique (la capture de Charles de Lorraine) plutôt que dynastique. En effet, on sait que le duc d'Aquitaine refuse de se soumettre à son roi, « réprouvant ce crime des Francs [la capture de Charles] » et l'évêque de Laon est comparé à Judas le « traître »[91]. Finalement, ils font la paix sur les bords de la Loire. Cette remarque est encore plus explicite dans la cité de Limoges. Les actes affirment que, jusqu'en 988, on reconnaît Hugues et même l'association de Robert puisqu'on les date de leur règne « regnante Ugo rege anno II et Rotberto filio suo anno primo » (« signé de la deuxième année du règne du roi Hugues et de la première de son fils Robert »). Mais cela ne dure pas, quelques mois plus tard, les chartes ne sont plus datées des règnes : il semblerait que le changement soit dû à la prise de connaissance de l'histoire de la capture de Charles de Lorraine et à la trahison de Adalbéron de Laon. Une fois mises au courant, les cités méridionales auraient rejeté la légitimité d'Hugues et de Robert[92].

Concile de Saint-Basle de Verzy

Liste des évêques présents au concile de Saint-Basle et/ou souscripteurs du diplôme de Corbie (988) et pour Saint-Crépin de Soissons[93]
Évêque Saint-Basle Diplôme de Corbie Diplôme de Saint-Crépin
Amiens X X X
Beauvais X X X
Noyon X X
Laon X X
Soissons X X X
Reims X X
Senlis X
Paris X
Sens X X
Orléans X
Auxerre X
Langres X
Bourges X X
Autun X
Mâcon X

Arnoul, qui a trahi le roi pour ouvrir les portes de son archevêché de Reims à son oncle Charles de Lorraine, dernier prétendant carolingien possible, est soutenu par le Saint-Siège. Hugues le fait juger au concile de Saint-Basle-de-Verzy (18 et 19 juin 991). L'assemblée est composée de treize évêques (ce qui est peu) et présidée par l'archevêque Seguin de Sens, peu favorable au roi. En revanche, les débats sont soutenus par l'évêque Arnoul d'Orléans, un proche du roi. Responsable de la défense, Abbon de Fleury avance que le souverain ne peut convoquer de concile et que seul le pape est compétent pour juger l'affaire. Arnoul d'Orléans lui réplique par un très violent réquisitoire contre le Saint-Siège[94]. Arnoul est déposé. Quelques jours plus tard, Gerbert d'Aurillac est nommé archevêque de Reims. Le pape Jean XV n'accepte pas cette procédure et veut convoquer un nouveau concile à Aix-la-Chapelle, mais les évêques de Francie refusent et confirment leur décision à Chelles (hiver 993-994)[95].. Gerbert, soutenu par d'autres évêques, prend position, pour l'indépendance des Églises vis-à-vis de Rome (qui est contrôlée par les empereurs germaniques). Afin d'éviter une excommunication des évêques ayant siégé au concile de Sainte-Basle, et donc un schisme, Gerbert préfère lâcher prise. Il abandonne l'archevêché et se rend en Italie. Toute l'habileté politique d'Hugues Capet consiste, dès le début de l'affaire, à demander le soutien de l'empereur et du pape (qu'il n'obtient évidemment pas), et utiliser les divisions de l'Église pour mettre en première ligne les évêques francs qu'il émancipe en échange de leur soutien. L'usage de la voie conciliaire est donc un moyen habile de contrer l'influence de l'empereur, sans entrer directement en conflit.

En parallèle, Abbon de Fleury, qui avait vigoureusement défendu Arnoul, écrit que, à partir du règne d'Hugues Capet, la théorie de la royauté forgée par Hincmar de Reims est reprise : le roi règne avec les conseils des ecclésiastiques. Lui et ses contemporains, pour des raisons obscures et totalement opposées au jugement précédent, assignent à partir de ce moment un grand intérêt à la royauté. Abbon rappelle qu'il faut être fidèle au roi et que chacun des grands seigneurs ne se trouve finalement être qu'un dépositaire du service dû au roi[96]. Oubliée sous les derniers Carolingiens, l'image du « roi idéal » fait son apparition : « Le pouvoir se situe toujours dans la sphère élevée du public et s'exerce comme office en vue du bien commun », ajoute Abbon. Il semble que, sur ce point, Hugues, pour redorer son blason aux yeux des évêques (en construisant des bâtiments religieux par exemple), ait dû légitimer ses actions contre les Carolingiens :

« Si Louis, de sainte mémoire, avait laissé une progéniture, celle-ci lui aurait légitimement succédé. »

— Hugues Capet selon Richer, 990.[97]

Abbon entend sauvegarder pour l'avenir la mémoire capétienne qui reste encore fragile dans les mentalités du XIe siècle. Sous Hugues Capet et encore chez Robert le Pieux, le souverain est largement conseillé et entouré par les évêques dans la tradition carolingienne.

L'insoumission des grands féodaux

Les historiens (notamment Ferdinand Lot[98] ou J.-F. Lemarignier) ont longtemps écrit qu'Hugues était un souverain très faible durant le règne duquel les châtelains avaient remplacé les princes familiers du palais et que la Paix de Dieu avait été décidée pour contrecarrer un rayonnement royal insuffisant[89]. Encore une fois, les études récentes ont nuancé ces propos trop négatifs. En 987, les contemporains ont dû avoir des doutes tant on craignait la remise en cause de l'ordre carolingien. Certains ont montré ouvertement leur hostilité (Charles de Lorraine, Eudes de Blois) et d'autres (surtout les ecclésiastiques) ont préféré patienter. On a vu qu'il y a encore, sous le règne d'Hugues, des habitudes carolingiennes.

Les Catalans sont souvent montrés comme étant les premiers à avoir rejeté la légitimité d'Hugues. Arraché aux musulmans par les Carolingiens, le comté de Barcelone a longtemps vénéré ces derniers. Pourtant, le premier Capétien ne rend pas visite aux abbayes méridionales, et donc ces dernières ne font plus appel à lui pour confirmer leurs privilèges : il y a plutôt éloignement que rupture[99]. En outre, Michel Zimmermann a montré que la rupture entre la couronne de Francie et la Catalogne n'est pas nouvelle : « Depuis Charles le Simple et les derniers Carolingiens, on assiste à un manque d'empressement des souverains à réclamer la prestation de fidélité devant leur incapacité à fournir la protection en contrepartie. » Les comtes de Barcelone renoncent donc, après 900, à faire le voyage pour l'hommage royal. On comprend désormais pourquoi la Catalogne refuse l'exigence d'Hugues en janvier 988[100]. Entre-temps, Barcelone a été assiégée en 985 par Al-Mansur. Le comte Borell II fait appel à son protecteur le roi des Francs, mais Lothaire meurt au cours de l'année 986 et Louis V a un règne trop bref pour préparer une expédition. Au lendemain de l'avènement d'Hugues Capet, Borrell renouvelle son appel et Hugues promet son aide en échange d'un hommage en Aquitaine, en vain[101].

Enfin, Hugues doit faire face, durant tout son règne, à l'opposition d'Eudes de Blois dont les possessions prennent en tenaille le domaine royal. Le comte de Blois s'assure de la prise de Melun, alors tenue par Bouchard de Vendôme, en soudoyant le châtelain et les milites (chevaliers) du château[102]. Suite à ce coup de force, une coalition se forme entre le roi, le comte d'Anjou et le duc de Normandie (991) : Melun est reprise et Eudes vaincu. Ce dernier reprend les armes et prend Nantes, aussitôt reprise par le comte d'Anjou Foulques Nerra. Inquiets de la puissance de l'Angevin, Richard Ier de Normandie, Eudes de Blois et Baudouin IV de Flandre s'allient contre lui (995-996). Le conflit sans fin est interrompu par la mort d'Eudes en mars 996, puis par celle d'Hugues Capet vers la fin octobre de la même année[103].

Fin de règne

Eudes de Blois meurt en mars 996, laisse une veuve dont est épris Robert le Pieux. Hugues Capet refuse cette union qui apporterait la Bourgogne à son fils, car Berthe de Bourgogne est sa cousine au troisième degré, et le mariage serait consanguin.

Durant l'été 996, déjà malade, Hugues se serait rendu avec son fidèle Bouchard au monastère de Souvigny où repose son ami saint Mayeul (mort en 994). Le roi est peut-être atteint de la variole, Richer témoigne : « Hugues, qui avait le corps tout couvert de pustules, s'éteignit dans son château les Juifs. »[104] « Les Juifs » est un hameau aujourd'hui disparu, près de Chartres, au cœur de la Beauce. Il n'est plus en guerre contre Eudes de Blois, mort en mars 996, et il a environ 55 ans quand il s'éteint durant les neuf Calendes de l'an 996[105]. Il disparaît « sans faire de bruit » après avoir surmonté sans gloire les difficultés que lui créèrent ses ennemis. Le roi défunt est sitôt transporté à l'abbaye de Saint-Denis où il est inhumé devant l'autel de la Sainte-Trinité aux côtés d'Eudes, un illustre ancêtre de la famille[106].

Le royaume d'Hugues Capet

Les principautés territoriales

Hugues Capet, comme ses prédécesseurs, se fait appeler « rex Francorum » (roi des Francs) et non pas « roi de France », ce qui signifie qu'il se sent plutôt le souverain d'un peuple, les Francs (les hommes libres), que d'un territoire. Bien entendu, ces liens ne reposent pas sur une présence physique qui ferait connaître le roi dans l'ensemble du royaume. Il est même possible que le premier Capétien se désintéresse progressivement du sud du royaume puisque les abbayes ne font plus appel à lui pour la confirmation de leurs biens[42]. S'il est connu au nord de la Loire, cela est moins vrai dans les régions méridionales, comme le confirme le récit d'Abbon de Fleury de son voyage en Gascogne :

« Me voici plus puissant en ce pays que le roi, car ici personne ne connaît sa domination. »

— Abbon de Fleury, v. 1000.[107]

Carte 2 : Le royaume d'Hugues Capet au début de son règne, fin du Xe siècle.

En effet, depuis le milieu du IXe siècle, les comtés créés au temps des Carolingiens sont devenus progressivement indépendants devant la faiblesse du pouvoir royal. Les plus puissants d'entre eux sont localisés aux marges du royaume (carte 2) :

  • Le comté de Barcelone : a pris son indépendance depuis 985.
  • Le comté de Flandre : situé à l'extrême nord du royaume, il est dirigé par Arnoul II le Jeune puis Baudouin IV Belle-Barbe. La famille comtale, traditionnellement proche du pouvoir carolingien, a soutenu la candidature de Charles de Lorraine en 987.
  • Le duché de Normandie : situé à l'ouest de Paris, c'est un puissant duché géré efficacement par le duc Richard Ier qui y mène une politique de reconstruction religieuse. Le duc est un fervent opposant aux Carolingiens et l'allié des Robertiens. Il épouse Emma, sœur d'Hugues Capet (960), et reconnaît ce dernier comme son seigneur (968) puis son souverain[108].
  • Le comté d'Anjou : riche et puissant, le comte d'Anjou Foulques Nerra est un appui fidèle du roi capétien qu'il soutiendra durant tout le règne.
  • Les comtes de Blois, de Châteaudun, de Chartres et de Reims : Eudes Ier de Blois est l'ennemi personnel d'Hugues Capet. Hugues le Grand avait confié à la famille de Blois un château qui est devenu indépendant au cours du Xe siècle. Son allié, Herbert IV de Vermandois, possède Troyes, Meaux, Provins et Vitry, et il est également un des grands ennemis du premier Capétien.
  • Le duché de Bretagne : selon les historiens, soit bénéficie d'une large autonomie soit était complètement indépendant depuis 851 par l'attribution du titre de roi à Erispoë par Charles le Chauve après une défaite cuisante de ce dernier. Ce royaume disparaît près de 50 ans plus tard avec sa conquête par les Normands entre 913 et 917. Ce territoire devient duché après la prise de Nantes par Alain Barbetorte mais reste sous influence Normande, les ducs de Bretagne rendant hommage aux ducs de Normandie[109][110]. Sa situation à la fin du Xe siècle est mal connu, faute de sources suffisantes, il semble toutefois que deux puissants seigneurs se partagent ce territoire, l'archevêque de Dol et le comte de Rennes. C'est l'époque d'une querelle dynastique qui fait suite à la mort de Drogon, fils du duc Alain Barbetorte, sans héritier (il était âgé de 4 ans). En 990, on sait que Conan Ier prend le titre de prince de Bretagne. Le fait que la Bretagne ne fasse pas partie des pairies de France, malgré sa puissance, tendrait à démontrer, contrairement à ce qu'essaie de prouver l'historiographie française, que ce duché ne faisait pas partie du royaume de France.
  • Le duché d'Aquitaine : c'est la plus vaste des principautés territoriales (un quart du royaume). Par sa langue, ses coutumes, son climat, tout oppose l'Aquitaine au nord de la Francie. Le duc d'Aquitaine, Guillaume IV de Poitiers, se sent libre loin de Paris. Néanmoins, sa sœur Adélaïde est la reine des Francs.
  • Le duché de Bourgogne : il est tenu par le frère du roi, Henri le Grand à partir de 965, suite à la mort de son autre frère Otton. Il est l'allié d'Hugues.

Les possessions du roi

Carte 3 : Le rayonnement d'Hugues Capet vers 995. D'après Y. Sassier (1987), p. 238.

Les historiens se sont longtemps demandé pourquoi Hugues n'avait récupéré, suite à son couronnement, qu'un minuscule territoire qui allait constituer le domaine royal. Il semblerait que son élection eût été plus une reconnaissance affective qu'une reconnaissance de sa puissance vis-à-vis des grands seigneurs[111]. En effet, ses plus proches voisins (duc de Normandie ou comte d'Anjou) sont plus riches que lui en terres et en hommes. Les possessions du nouveau roi sont réduites à des morceaux de l'ancien duché robertien, consolidé jadis par son père. Ces amputations ne sont absolument pas l'objet de pertes territoriales liées à la réclamation d'un frère cadet du roi[112].

Ce territoire est dominé par deux grandes villes, Paris et Orléans, puis par quelques villes moyennes, Étampes, Melun, Corbeil, Dreux et Senlis. Ces places fortes sont en réalité des chefs-lieux de pagi au sein desquels le roi n'exerce que le pouvoir comtal[112]. Dans chacune de ces villes, Hugues Capet dispose d'un palais, d'une troupe de chevaliers et de revenus fonciers et économiques[113]. Chacune de ses possessions est disjointe des autres puisque de gênants vassaux (Montmorency, Montlhéry...) sont venus s'y intercaler[111]. Enfin, le premier Capétien dispose aussi d'abbayes qui restent de puissants appuis économiques et stratégiques : Saint-Martin à Tours, Saint-Benoît-sur-Loire (Fleury-sur-Loire), Saint-Maur-des-Fossés, Saint-Germain-des-Prés et Saint-Denis. Il ne reste quasiment rien du domaine carolingien, si ce n'est autour de Laon[111]. Il serait cependant illusoire de borner le rayonnement d'Hugues Capet à son seul domaine royal. Son influence s'étend sur une région beaucoup plus vaste d'Orléans à Amiens (carte 3).

L'administration au temps d'Hugues Capet

Comme on l'a dit, nous sommes assez mal renseignés sur le règne d'Hugues Capet. On n'a conservé qu'un petit nombre d'actes émis par sa chancellerie : à peine une douzaine. C'est infime comparé aux plusieurs centaines de son contemporain Otton III[114].

La continuité carolingienne

Monogramme de Charlemagne, Karolus Rex (Charles roi), (IXe s.).

Hugues Capet apparaît comme un souverain qui reste très « carolingien » dans certains de ses comportements[67]. Dans un premier temps, il associe son fils unique, Robert, à la couronne. Le prince, âgé d'environ 15 ans, est acclamé puis sacré en la cathédrale d'Orléans par Adalbéron de Reims, le soir de Noël 987. Cette pratique était déjà usitée au temps des Carolingiens, mais le passé a montré que cette précaution n'empêchait pas l'élection d'un autre roi (Charles III en 922)[115]. De plus, Charles de Lorraine est toujours sur le devant de la scène et le roi a quelque peine à convaincre l'archevêque de Reims de le soutenir. Ce dernier, dont le rôle est capital pour légitimer le sacre, ne souhaite pas voir la nouvelle dynastie se renforcer précipitamment. Mais, face à l'argument d'Hugues, qui affirme ne pas pouvoir laisser le royaume sans chef et sans succession assurée dans un univers hostile (les vassaux ennemis du roi, les Musulmans), l'archevêque doit céder[116].

Plus curieusement, on assiste au maintien par le roi lui-même et par son entourage d'une tradition impériale de la monarchie franque. Ainsi, une charte royale d'Hugues Capet, datée de 992, le présente lui-même et son fils se déclarant « détenteurs du pouvoir sur l'Empire des Francs » (imperii Francorum (...) potiti)[117]. Un autre souvenir franc est la confection d'un manteau royal sur ordre de la reine Adélaïde, confié à la garde de Saint-Denis. Ce vêtement, appelé orbis terrarum, symbolise le monde. C'est un manteau impérial et sa signification est claire : « celui qui s'en pare porte le monde sur ses épaules, tel Atlas »[118]. Jusqu'en 988, on sait que tous les actes royaux du premier Capétien suivent une pratique carolingienne selon laquelle la signature (souscription) est réalisée à la fois par la chancellerie et par le roi, qui y appose les signes royaux : son monogramme (modèle carolingien) et le sceau. Après cette date, encore un acte sur deux (connu) se fera de cette manière[119].

Évolution des actes entre Hugues Capet et Philippe Ier (987-1108)[120]
Souverain Diplômes de type carolingien Diplômes à souscriptions multiples Chartes non royales souscrites par le roi Inutilisables
Hugues Capet 11 1 1 4
Philippe Ier 11 46 26 7

Enfin, le rétrécissement, tant décrié par certains historiens, des relations par actes au temps des premiers Capétiens, est peu net. Sous les Carolingiens, les diplômes royaux sont rares en Normandie, Anjou, Poitou, Berry et Auvergne, et même inexistants en Gascogne, Bordelais et Toulousain. Au temps d'Hugues Capet, on envoie moins de documents en Flandre et en Auvergne, mais on note une multiplication des actes vers la Normandie, la Touraine et le Berry. Il n'y a donc pas une véritable coupure avec les expéditions carolingiennes (excepté dans l'extrême sud)[121]. Bref, Richer présente le roi Hugues comme un « roi guerrier » qui accomplit des exploits avec son armée. Pour être un vrai Carolingien, il ne lui manque que le sang de Charlemagne [122]!

La rupture capétienne

Charte d'Hugues Capet cédant les terres de Maisons-Alfort à l'abbaye Saint-Maur-des-Fossés (988).

Jusqu'en 987, les clercs ne produisent plus de grands textes. Les règnes des derniers Carolingiens ne stimulent pas les penseurs et semblent mettre de côté les hommes d'Église. Avec Hugues Capet, la situation semble changer. Dans un de ses diplômes, le roi apparaît comme l'intermédiaire entre les clercs et le peuple (mediator cleri et plebis)[123]. D'ailleurs, Abbon de Fleury et Richer de Reims sont conscients du changement avec l'ancienne dynastie. Le moine de Reims ajoute qu'Hugues et Robert réagissent :

« Non par une impulsion précipitée mais comme ils avaient coutume en toutes choses, en prenant conseil de la façon la plus attentive. »

— Richer de Reims, Histoires, v. 990., [124]

Carte 4 : Représentation des destinataires des actes d'Hugues Capet. D'après J.-F. Lemarignier, Le gouvernement royal aux temps des premiers Capétiens (987-1108), Picard, Paris, 1965.

Et les deux rois eux-mêmes, sous la plume de Gerbert d'Aurillac, insistent sur cette nécessité de consilium « ne voulant en rien abuser de la puissance royale nous décidons toutes les affaires de la res publica [la chose publique] en recourant aux conseils et sentences de nos fidèles »[124]. En fait, au besoin, les évêques du Nord assistent et soutiennent le roi lors de plaids royaux ou de synodes. Mais Hugues a besoin de l'appui de l'Église pour asseoir davantage sa légitimité, ainsi que parce que les contingents de cavaliers qui composent son armée proviennent en grande partie des évêchés[108].

Concernant les actes royaux, on a vu que le roi n'est réellement présent que dans la région située entre l'Oise et la Seine. Les diplômes royaux peuvent être également des chartes privées comportant un grand nombre de souscriptions. Avec Hugues Capet s'ouvre une nouvelle pratique dans la rédaction des actes. Jusqu'en 987, ils faisaient uniformément l'objet, on l'a souligné, d'une signature de la chancellerie jointe à celle du roi. Dorénavant, le roi doit faire souscrire certains de ses diplômes (un seul connu pour Hugues Capet) non par le seul chancelier, mais par les personnes qui l'entourent (les grands seigneurs).

Désormais, il semblerait que l'autorité royale ne serve plus, à elle seule, à valider la décision qui est prise[125]. En effet, les actes émanant de la chancellerie sont principalement des privilèges qui confirment les domaines des établissements religieux (par exemple Saint-Maur-des-Fossés, 988) et les placent sous la protection du roi (carte 4) : les clercs estiment-ils inutile de demander la protection d'un souverain aussi faible ?[111] Cette remarque est aujourd'hui discutée puisqu'on considère que ce changement administratif traduit moins un affaiblissement royal qu'un changement de méthode progressif à partir d'Hugues Capet[126]. Les derniers Carolingiens délivraient encore un nombre important de diplômes aux églises situées dans le Midi. Il s'agissait pour eux de mettre en place un sentiment de légitimité et de protection royale contre les musulmans proches, politique mise entre parenthèses depuis le milieu du Xe siècle[127].

Progrès culturels et architecturaux

Chapelle Saint-Jean-Baptiste fondée en 1003-1004 par Adélaïde d'Aquitaine et dépendant de l'abbaye Sainte-Marie d'Argenteuil.

On assiste à un nouvel essor culturel décrit par Helgaud de Fleury à partir de la fin du Xe siècle. Si l'Antiquité a toujours été présente dans la culture du haut Moyen Âge, le paysage monumental est en train de changer. On connaît aujourd'hui l'existence d'un art préroman clairement différencié de l'art carolingien[128].

On prête à Hugues Capet et à la famille royale un certain nombre de constructions : le souverain continue la construction du monastère Saint-Magloire entreprise par son père à Paris, tandis que la reine Adélaïde fait bâtir à Senlis une chapelle pour abriter les reliques de saint Frambourg et une autre à Argenteuil pour l'abbaye Notre-Dame[129]. Hugues Capet agit en étroite collaboration avec le centre culturel de Saint-Benoît-sur-Loire. Les évêques jouent également un rôle primordial ; on travaille dans certaines cités à reconstruire ou à agrandir les sanctuaires : c'est le cas, à la fin du Xe siècle, de Beauvais et surtout de Reims. Justement, Richer de Reims nous décrit la reconstruction de la cathédrale de Reims par l'archevêque Adalbéron de Reims en 976. Plusieurs travaux sont effectués : on abat les cryptes occidentales et l'ouvrage voûté carolingien à l'entrée, on le remplace par un clocher-porche, puis on y place le corps de saint Calixte avant de faire élever un autel avec un oratoire. Enfin, l'autel principal est décoré d'une croix d'or et on fait percer de nouvelles fenêtres décorées de diverses histoires[130]. En revanche, tous les contemporains ne sont pas forcément du même goût. En effet, pour le continuateur de Flodoard, qui poursuit les annales depuis la mort de ce dernier, cette reconstruction est considérée comme un « sacrilège »[131].

Les centres urbains se développent également. À Tours, le quartier Saint-Martin, protégé par son castrum de pierre, engendre une agglomération dynamique avec de nombreuses boutiques. À Paris, à l'époque d'Hugues Capet, la cité est tout entière occupée par le quartier épiscopal à l'est et le palais royal à l'ouest. Entre les deux, on note la présence d'un quartier dont les habitants fournissent le roi et l'évêque en produits précieux[132]. Sur les deux rives s'élèvent des bourgs monastiques autour desquels s'étendent des vignes, des ateliers et des ports fluviaux (Saint-Germain-des-Prés). Ailleurs, à Châteaudun, la collégiale Notre-Dame apparaît en 1003 dans l'enceinte du castrum édifié par le comte de Blois, mais cela reste un cas isolé puisque les châteaux privés restent rares. À la fin du XIe siècle, le timide éveil économique permet de poursuivre les grands traits urbains des cités (caractérisé par une structure polynucléaire) : cité épiscopale, castrum et suburbium hérités du haut Moyen Âge[133].

Hugues Capet et l'Église

Saint Valéry apparaissant à Hugues Capet (Grandes Chroniques de France, XIVe siècle.), Paris, Bibliothèque nationale de France.

Hugues Capet, lui-même abbé, comprend vite tout l'intérêt qu'il peut tirer de la réforme clunisienne. Il entretient des liens d'amitié avec Maïeul de Cluny, fait montre de dévotion aux cérémonies religieuses et de soutien à la réforme monastique. Il octroie, en 994 à l'abbé Heldric de Saint-Germain d'Auxerre, l'élection de l'abbé par les seuls moines, et non plus par l'évêque d'Auxerre[134]. Il est logiquement soutenu pour son élection par les réformateurs de l'Église et, en particulier, par Gerbert d'Aurillac et Adalbéron de Reims, personnalités influentes et proches des Ottoniens. Ce d'autant que les Carolingiens se sont montrés menaçants pour Otton II et Otton III.

Mais, une fois au pouvoir, il doit, au yeux des Ottoniens, rester suffisamment faible pour que la Francie ne puisse s'ériger en contre-pouvoir. Par exemple, Adalbéron rechigne à sacrer son fils Robert, pourtant formé par son écolâtre Gerbert. Il faut toute l'habileté politique d'Hugues Capet pour le convaincre. Ce dernier délègue ensuite à Robert le Pieux de réelles responsabilités religieuses et militaires qui l'imposent de fait comme son successeur. La réforme monastique ne pouvant pas emporter l'adhésion de tous les abbés et évêques laïcs, des divisions existent au sein de l'Église. Odilon de Cluny et le mouvement de la Paix de Dieu sont fortement critiqués par des personnalités ecclésiastiques de premier ordre, surtout au nord de la Loire, comme Adalbéron de Laon ou Gérard de Cambrai. Les Ottoniens contrôlent le Saint-Siège et manœuvrent pour que, en Francie, le pouvoir reste partagé entre Carolingiens et Robertiens.

La trahison de l'archevêque Arnoul a porté un rude coup au crédit du roi. Cependant, ce dernier manœuvre avec habileté, utilisant la voie conciliaire pour contrer les décisions du Saint-Siège (qui est assujetti à l'empereur). De plus, en contraste avec le peu de moyens dont dispose le roi, sa légitimité s'affermit grâce au soutien de grands ecclésiastiques : ils voient bien que le roi, bien que faible, incarne la tradition d'une autorité supérieure, seule capable de maintenir l'ordre et la paix dans la société chrétienne. Les évêques aquitains et languedociens élaborent sans doute, faute de mieux, la Paix de Dieu au moment même où Hugues Capet commence à régner, mais leurs confrères du Nord, plus proches de la royauté, cherchent à lui apporter un soutien idéologique (Gérard de Cambrai, Adalbéron de Laon)[135].

Justement, Abbon de Fleury, qui avait vigoureusement défendu Arnoul au concile de Verzy, écrit que, à partir du règne d'Hugues Capet, la théorie de la royauté, forgée par Hincmar de Reims, est reprise : le roi règne avec les conseils des ecclésiastiques. Lui et ses contemporains, pour des raisons obscures et totalement opposées au jugement précédent, assignent à partir de ce moment un grand intérêt à la royauté. Abbon rappelle qu'il faut être fidèle au roi et que chacun des grands seigneurs ne se trouve finalement être qu'un dépositaire du service dû au roi[136]. Oubliée sous les derniers carolingiens, l'image du « roi idéal » fait son apparition : « le pouvoir se situe toujours dans la sphère élevée du public et s'exerce comme office en vue du bien commun », ajoute Abbon. Il semble que, sur ce point, Hugues, pour redorer son blason aux yeux des évêques (en construisant des bâtiments religieux par exemple), ait dû légitimer ses actions contre les Carolingiens :

Médaillon présentant Hugues Capet de profil, 1630-1640, Bibliothèque nationale de France.
« Si Louis, de sainte mémoire, avait laissé une progéniture, celle-ci lui aurait légitimement succédé. »

— Hugues Capet selon Richer, 990.[137]

Abbon entend sauvegarder pour l'avenir la mémoire capétienne, qui reste encore fragile dans les mentalités du XIe siècle. Contrairement aux derniers Carolingiens, les premiers Capétiens s'attachent un clan d'évêques au nord-est de Paris (Amiens, Laon, Soissons, Châlons...), dont le soutien se montrera déterminant dans la suite des événements[124]. Hugues Capet et Robert le Pieux ont besoin de l'appui de l'Église pour asseoir davantage leur légitimité, entre autres parce que les évêchés fournissent de gros contingents pour l'armée royale[108]. Dans un de leurs diplômes, les deux rois apparaissent comme les intermédiaires entre les clercs et le peuple (mediatores et plebis)[123]. Et les deux rois eux-mêmes, sous la plume de Gerbert d'Aurillac, insistent sur cette nécessité de consilium : « Ne voulant en rien abuser de la puissance royale nous décidons toutes les affaires de la res publica en recourant aux conseils et sentences de nos fidèles.[124] ».

Au total, malgré un pouvoir réel relativement faible, Hugues Capet parvient à jouer des divisions au sein de la grande aristocratie et de l'Église pour obtenir suffisamment de soutiens pour transmettre héréditairement sa couronne, en dépit de la puissance des Ottoniens. Cependant, la restauration d'un pouvoir royal plus fort répond aussi à un mouvement plus large : la Paix de Dieu est en train de fonder progressivement une société à trois ordres, dans laquelle le clergé, qui est dépositaire de la culture, se rend indispensable à l'exercice du pouvoir.

Pourtant, l'évolution se fait au XIe siècle avec un soutien clérical qui apparaît de moins en moins indispensable (en particulier à partir du règne de son petit-fils Henri Ier) au profit des puissants laïcs.

Bibliographie

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Sources

Ouvrages

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Articles

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Articles connexes

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Liens externes

Notes et références

  1. Les chroniqueurs ne nous donnent pas la date de décès du roi. En revanche, les obituaires de l'abbaye de Saint-Denis enregistrent son décès aux « IX Kal Nov », aux 9 calendes de novembre, c'est-à-dire le 24 octobre 996. Obituaires de Sens, Tome I.1, Abbaye de Saint-Denis, p. 329. [1]. L'historien Yves Sassier propose quant à lui entre le 22 et le 25 novembre 996. Y. Sassier, Hugues Capet : naissance d'une dynastie‎, Fayard, Paris, 1987, p. 265.
  2. Voir aussi Optimum climatique médiéval.
  3. C. Beaune, « roi », Dictionnaire du Moyen Âge, PUF, Paris, 2002, p. 1232.
  4. M. Parisse, « Qu'est-ce que la France de l'an Mil ? », La France de l'an Mil, Seuil, Paris, 1990, p. 29-30.
  5. Certains historiens prétendent que Charles le Simple a été le premier roi de Francie (et non de Francia occidentalis), d'autres préfèrent Lothaire. M. Parisse (1990), p. 35-36.
  6. C. Gauvard, La France au Moyen Âge du Ve au XVe siècle, PUF, Paris, 1999, p. 163-164.
  7. R. Delort, « France, Occident, monde à la charnière de l'an Mil », La France de l'an Mil, Seuil, Paris, 1990, p. 20.
  8. P. Bonnassie, « D'une servitude à l'autre : Les paysans du royaume 987-1031 », La France de l'an Mil, Seuil, Paris, 1990, p. 134-135.
  9. J. Dhondt, « Les dernières invasions » tiré de Histoire de la France des origines à nos jours sous la direction de Georges Duby, Larousse, 2007, p. 249.
  10. P. Noirel, L'Invention du marché, p. 140
  11. P. Contamine, M. Bompaire, S. Lebecq, J.-L. Sarrazin, L'économie médiévale, Collection U, Armand Colin, 2004, p. 96.
  12. P. Contamine (2004), p. 65-67
  13. J. Gimpel, La Révolution industrielle du Moyen Âge, Seuil, Paris, 1975, p. 149-150.
  14. a  et b P. Bonnassie (1990), p. 126-127.
  15. D. Barthélemy, L'ordre seigneurial, XIe ‑ XIIe siècle, Seuil, Paris, 1990, p. 90-98.
  16. Philippe Contamine, Marc Bompaire, Stéphane Lebecq, Jean-Luc Sarrazin, L'économie médiévale, Collection U, Armand Colin 2004, page 128
  17. Georges Duby, Les féodaux (980-1075) tiré de Histoire de la France, Larousse 2007, p. 277.
  18. Georges Duby (2007), p. 276.
  19. Christian Lauranzon-Rosaz, La Paix des Montagnes: Origines auvergnates de la Paix de Dieu, p.19
  20. Michel Balard, Jean-Philippe Genet et Michel Rouche, Le Moyen Âge en Occident, Hachette 2003, p. 104-105
  21. Jacques Paviot,Le moine est maître chez lui Historia Thématique N°90: La France féodale p.43
  22. J. Renaud, Les Vikings en France, Clio.fr
  23. A. Debord, « Les fortifications de terre en Europe occidentale du Xe au XIIe siècles », Archéologie médiévale, tome XI, 1981, Centre de Recherches Archéologiques Médiévales, Caen, p. 10.
  24. D. Barthélemy, « Dominations châtelaines de l'an Mil », La France de l'an Mil, Seuil, Paris, 1990, p. 105.
  25. M. Arnoux, « Châtellenie », Dictionnaire encyclopédique du Moyen Âge, Cerf, Paris, 1997, p. 313-314.
  26. J.-P. Poly, La mutation féodale, XIe ‑ XIIe siècles, PUF Clio, Paris, 1980, p. 85
  27. R. Aubenas, « Les châteaux forts des Xe et XIe siècles. Contribution à l'étude des origines de la féodalité », Revue historique de droit français et étranger, 17, 1938, p. 548-586.
  28. D. Barthélemy, « Le pillage, la vengeance et la guerre », Collections de l'Histoire, 16, 2002.
  29. Christian Lauranzon-Rosaz, La Paix des Montagnes: Origines auvergnates de la Paix de Dieu, p. 3, Site de l'Université de droit de Clermont-Ferrand [lire en ligne]
  30. a  et b Laurent Theis, Histoire du Moyen Âge Français, Perrin 1992, p. 64
  31. a  et b Laurent Theis (1992), p. 65
  32. a  et b C. Gauvard (1999), p. 118.
  33. Laurent Theis, Histoire du Moyen Âge français, Perrin 1992, p. 67
  34. D'ailleurs, il est à noter que chaque abbé laïc portait par tradition une chape ou cape sur le dos. Il semble que ce soit Adémar de Chabannes qui, le premier, parle de « roi à la chape » dans sa chronique vers 1030. M. Parisse (1990), p. 29.
  35. Pierre Riché, Les Carolingiens, une famille qui fit l'Europe, Hachette 1983, p.280.
  36. Pierre Riché (1983), p. 287.
  37. Pierre Riché (1983), p. 289.
  38. M. Bourin, « 987, Hugues capet fonde la dynastie capétienne », Les grandes dates de l'histoire de France, Le Seuil, 2005.
  39. Dans la conception chrétienne médiévale, la naissance (moment non religieux) n'est pas importante dans la vie du fidèle. Ainsi, cet événement n'est pas connu, même pour les plus puissants, avant le milieu du XIIe siècle. (Philippe Auguste semble être le premier souverain dont la date de naissance a été notée dans les archives, en août 1165.) La date de naissance proposée est souvent calculée selon l'âge approximatif qui est donné lors de la mort de la personne.
  40. a  et b C. Gauvard (1999), p. 119.
  41. Dans ses écrits, la principale source de la fin du Xe siècle, Richer de Reims, proche du pouvoir ottonien avait laissé entendre qu'Hugues Capet descendait du saxon Widukind afin de flatter les empereurs germaniques (revanche contre les Carolingiens). M. Parisse (1990), p. 30 ; C. Gauvard (1999), p. 118. ; Éric Bournazel, « Mémoire et parenté », La France de l'an Mil, Seuil, Paris, 1990, p. 120.
  42. a  et b M. Parisse (1990), p. 38.
  43. a  et b F. Menant (1999), p. 22.
  44. Y. Sassier, Royauté et idéologie au Moyen Âge, Colin, Paris, 2000, p. 183.
  45. Ce laps de temps entre la mort d'Hugues le Grand (956) et l'action de Lothaire en faveur d'Hugues Capet (960) semble avoir été organisé par Brunon de Cologne qui souhaitait peut-être laisser une longueur d'avance à Lothaire. F. Menant (1999), p. 19-20.
  46. Cette tradition rompt catégoriquement avec la vieille coutume franque qui consistait à partager le domaine paternel entre chacun de ses héritiers mâles (par exemple Clovis ou Louis le Pieux). A. W. Lewis, Le Sang royal. La famille capétienne et l'État, France, Xe-XIVe siècle, Gallimard, Paris, 1981, p. 31-41.
  47. L. Theis, L'Héritage des Charles, Seuil, Paris, 1990, p. 178-179.
  48. a  et b F. Menant (1999), p. 20.
  49. a  et b L. Theis (1990), p. 181.
  50. L. Theis (1990), p. 184.
  51. Jean Dhondt, « Les dernières invasions » tiré de Histoire de la France des origines à nos jours sous la direction de Georges Duby, Larousse, 2007, p. 247.
  52. Page 161 dans Histoire de Normandie par Orderic Vital, éditée par François Guizot
  53. L. Theis (1990), p. 186.
  54. a  et b F. Menant (1999), p. 21-22.
  55. Dans une école cathédrale, l'écolâtre est le clerc qui est responsable de l'enseignement. Gerbert d'Aurillac deviendra pape sous le nom de Sylvestre II en 999.
  56. R.-H. Bautier, « L'avènement d'Hugues Capet », Le roi de France et son royaume autour de l'an Mil, Picard, Paris, 1992, p. 28.
  57. Gerbert d'Aurillac, le pape Sylvestre II, Encyclopédie Universelle
  58. L. Theis (1990), p. 180.
  59. Richer date l'événement en 981. On ignore qui étaient les grands seigneurs du royaume présents lors de la cérémonie. L. Theis (1990), p. 186.
  60. L. Theis (1992), p. 72.
  61. L. Theis (1990), p. 187.
  62. L. Theis (1990), p. 188.
  63. L. Theis (1992), p. 73
  64. L. Theis (1990), p. 188-189.
  65. F. Menant (1999), p. 21.
  66. L. Theis (1990), p. 189.
  67. a  et b M. Parisse (1990), p. 32.
  68. a  et b F. Menant (1999), p. 23.
  69. En 888, Charles III et Eudes ; en 936, Louis IV et Hugues le Grand.
  70. M. Parisse (1990), p. 30-31.
  71. M. Parisse (1990), p. 31-32.
  72. J.-M. Lambin, Histoire-Géographie, 5e, Hachette Collèges, Paris, 1992, p. 69.
  73. En 954, Louis IV était mort à la suite d'un accident de cheval en forêt de Reims où il poursuivait, dit-on, un loup. Son petit-fils Louis V a trouvé la mort dans les mêmes circonstances en 987. J.-P. Poly, « Le Capétien thaumaturge : genèse populaire d'un miracle royal », La France de l'an Mil, Seuil, Paris, 1990, p. 294-305.
  74. a  et b J.-M. Lambin (1992), p. 69.
  75. M. Parisse (1990), p. 33.
  76. a  et b M. Parisse (1990), p. 32-33.
  77. Il semblerait que le choix de Noyon fasse référence au couronnement de Charlemagne en 768 afin de légitimer le nouveau roi aux yeux des partisans carolingiens. Quant à Reims, il s'agirait d'une reconnaissance envers Adalbéron puisque la tradition du sacre à Reims n'est pas encore établie. F. Menant (1999), p. 24-25.
  78. H. Pinoteau, « Les insignes du roi vers l'an mil », Le roi de France et son royaume autour de l'an Mil, Picard, Paris, 1990, p. 78-81.
  79. a  et b P. Riché (1983), p. 303.
  80. « Le roi Robert, arrivé à l'âge de sa dix-neuvième année, dans la fleur de sa jeunesse, répudia, parce qu'elle était trop vieille, sa femme Suzanne, Italienne de nation » Richer de Reims, Histoire, IV.
  81. Lorsqu'il se rend, en 980, chez Otton II, son ami Arnoul d'Orléans lui sert d'interprète. L. Theis (1999), p. 25.
  82. a , b  et c F. Menant (1999), p. 32.
  83. Y. Sassier (1987), p. 218-220.
  84. Y. Sassier (1987), p. 221.
  85. Page 148 dans Hugues Capet, roi de France d'Edmond Pognon (1966)
  86. Histoire de l'ancien gouvernement de la France d'Henri Boulainvilliers (1727) Page 147
  87. L. Theis (1992), p. 75.
  88. Il est à noter que le mouvement de la Paix de Dieu, au temps d'Hugues Capet, n'a touché que la moitié sud du royaume. Par conséquent, Adalbéron de Laon (qui était lui-même opposé à l'idée de Paix de Dieu) est surtout critiqué au sud d'Orléans. F. Menant (1999), p. 30.
  89. a  et b M. Parisse (1990), p. 33.
  90. R. Landes, « L'accession des Capétiens : Une reconsidération selon les sources aquitaines », Religion et culture autour de l'an Mil, Picard, Paris, 1992, p. 153-154.
  91. R. Landes (1992), p. 154.
  92. R. Landes (1992), p. 159-160.
  93. Olivier Guyotjeannin, « Les évêques dans l'entourage royal sous les premiers Capétiens », Le roi et son royaume autour de l'an Mil, Picard, Paris, 1990, p. 93-95.
  94. L. Theis (1990), p. 75.
  95. F. Menant (1999), p. 33.
  96. O. Guillot (2003), p. 234.
  97. . O. Guillot (2003), p. 238-239.
  98. Hugues Capet, faible, incertain, dont la prudence dégénérait en pusillanimité
  99. M. Parisse (1990), p. 37-38.
  100. M. Zimmermann, « Entre royaume franc et califat, soudain la Catalogne », La France de l'an Mil, Seuil, Paris, 1990, p. 81.
  101. M. Zimmermann (1990), p. 96.
  102. D. Barthélemy (1990), p. 107.
  103. F. Menant (1999), p. 30-31.
  104. On a longtemps pensé, que le terme « Juifs » faisait référence à un assassinat par des médecins juifs mais, depuis 1957, on a compris qu'il s'agissait d'un lieu. B. Blumenkranz, « Où est mort Hugues Capet ? », Bibliothèque de l'École des Chartes, 1957, p. 168-171. Y. Sassier (1987), p. 265.
  105. Yves Sassier prétend que le roi serait mort entre le 22 et le 25 novembre 996. Y. Sassier (1987), p. 265.
  106. T. G. Waldman, "Saint-Denis et les premiers Capétiens", Religion et culture autour de l'an Mil, Picard, Paris, 1992, p. 193.
  107. C. Gauvard (1999), p. 165.
  108. a , b  et c F. Menant (1999), p. 28.
  109. Dom Mabillon, Extrait d'une Histoire des Ducs de Normandie. Recueil des Historiens de France, Tome X.
  110. M. Daru. Histoire de Bretagne. Editions Firmin Didot Père et Fils, Paris, 1826.
  111. a , b , c  et d F. Menant (1999), p. 27.
  112. a  et b D. Barthélemy (1990), p. 242.
  113. On sait qu'Hugues Capet fréquente les palais de Senlis et de Compiègne, mais il en possède d'autres. A. Renoux, « Palais capétiens et normands à la fin du Xe siècle et au début du XIe siècle », Le roi de France et son royaume en l'an Mil, Picard, Paris, 1990, p. 183.
  114. F. Menant (1999), p. 26-27.
  115. Cette tradition sera reprise jusqu'à Philippe Auguste à la fin du XIIe siècle. Olivier Guillot, Yves Sassier, Pouvoirs et institutions dans la France médiévale, tome 1, Des origines à l'époque féodale, Colin, Paris, 2000, p. 238.
  116. F. Menant (1999), p. 31.
  117. Y. Sassier (2000), p. 192
  118. On sait que ce manteau était porté par les empereurs germaniques, par exemple Henri II, à partir de 1002. Y. Sassier (2000), p. 192.
  119. O. Guillot (2003), p. 249.
  120. J.-F. Lemarignier, Le gouvernement royal aux temps des premiers Capétiens (987-1108), Picard, Paris, 1965.
  121. O. Guillot (2003), p. 240.
  122. M. Sot, « Les élévations royales de 888 à 987 dans l'historiographie du Xe siècle », Religion et culture en l'an Mil, Picard, Paris, 1990, p. 150.
  123. a  et b Y. Sassier (2000), p. 200.
  124. a , b , c  et d Y. Sassier (2000), p. 205.
  125. C. Gauvard (1999), p. 189. O. Guillot (2003), p. 249.
  126. O. Guyotjeannin, « Les évêques dans l'entourage royal sous les premiers Capétiens », Le roi de France et son royaume autour de l'an mil, Picard, Paris, 1992, p. 91-93.
  127. O. Guillot (2003), p. 239-240.
  128. X. Barral i Altet, « Le paysage monumental de l'an Mil », La France de l'an Mil, Seuil, Paris, 1990, p. 182-183.
  129. X. Barral i Altet (1990), p. 172.
  130. X. Barral i Altet (1990), p. 182.
  131. S. Lecouteux, « Une reconstitution hypothétique du cheminement des Annales de Flodoard, depuis Reims jusqu'à Fécamp » [2]
  132. A. Chédeville, « Le paysage urbain vers l'an Mil », Le roi de France et son royaume en l'an Mil, Picard, Paris, 1990, p. 161-162.
  133. André Chédeville (1990), p. 163.
  134. Le temps des premiers Capétiens, Encyclopédie Universelle
  135. F. Menant (1999), p. 30
  136. O. Guillot (2003), p. 234.
  137. O. Guillot (2003), p. 238-239.
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